BARBENTANE

en octobre 1916

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Sur les autres Fronts en France. A part les duels d'artillerie et les raids habituels, c'est le calme. Dans les Vosges l'arrivée brutale de la neige fige tout. En Champagne, on se bat à coup de mines, comme toujours. Entre la Somme et la mer du Nord, les soldats essayent de se protéger du mieux qu'ils peuvent des affreuses conditions météo...

Dans la Guerre Aérienne. L'automne n'est pas une période favorable à l'aviation, du moins celle qui est opérationnelle sur les fronts des combats. Par contre, on s'active sérieusement dans tous les bureaux d'étude. Chez les Allemands les premiers vols des Albatros D III sont prometteurs et l'industriel promet d'en construire au moins 100 par mois d'ici la fin de l'année. On ne s'apercevra que plus tard des deux graves défauts de cet appareil...

Chez les Britanniques, le Sopwith Pup commence à être livré dans les escadrilles. C'est un petit chasseur très maniable et à la vitesse ascensionnelle remarquable malgré la faiblesse de sa motorisation. Il est très apprécié des pilotes, car il est facile à piloter, même en haute altitude. Manfred von Richthofen lui-même loue cet appareil pour sa maniabilité, mais il le critique pour sa faible aptitude à effectuer des vols en piqué...

En France, la production, les tests et l'adoption des nouveaux appareils sont très lents. Rien n'est fait concrètement pour maintenir l'avance technologique acquise au printemps. Le Nieuport 17, dit Super BB, qui était l'avion suprême durant l'été, va être surclassé par les appareils ennemis au début de l'année 1917. Mais plutôt que de plancher sur de nouveaux appareils, la France produit en masse le Super BB et elle l'exporte partout dans le monde : Belgique, Chili, Colombie, Estonie, Hollande, Hongrie, Pologne, Roumanie, Siam, Ukraine et aux USA. Même les Allemands en font une copie construite à 90 exemplaires qu'ils baptisent Siemens-Schukert DI. Ce "Nieuport allemand" ne combat pas sur le front de l’ouest Européen. Heureusement, la société qui construit les Spad, bien conseillée par le capitaine et pilote Georges Guynemer, révise intelligemment son modèle en construction avec un moteur beaucoup plus puissant. Hélas, l'excellent Spad S-VII (dit plus tard Spad-Canon) n'arrivera dans les escadrilles qu'au mois de juin 1917, laissant pendant près de 6 mois les Allemands être les maîtres du ciel au-dessus de la France...

En octobre 1916, le capitaine Oswald Boelcke est désigné par les pilotes britanniques comme l'adversaire à abattre. Plusieurs fois ils bombardent son aérodrome près de Lagnicourt dans le Pas-de-Calais, mais sans résultat. Le 28 octobre, un nouvel appel du front lui parvient à 16h30 alors qu'il avait déjà effectué cinq missions avec son escadrille. Dix minutes plus tard, Boelcke et 5 autres pilotes décollent avec leur Albatros D-II. Au-dessus de Bapaume dans la Somme, ils engagent un combat aérien avec deux Airco DH-2 de la 24ème escadrille britannique pilotés par les lieutenants Knight et McKay. Boelcke attaque un avion, sans remarquer que son ami, le sous-lieutenant Erwin Böhme, avait choisi la même cible. La partie inférieure du fuselage de Böhme touche l'aile supérieure gauche de l'avion de Boelcke, et tous les deux s'écrasent au sol sous les yeux effarés de Manfred Von Richthofen. Böhme survit à l'accident, tandis que Boelcke meurt sur le coup. Dans sa hâte, il avait omis d'attacher sa ceinture, ce qui aurait pu lui sauver la vie. A l'annonce de son décès, les Britanniques larguent au-dessus du front allemand de la Somme une gerbe en son honneur...

Bien sûr, dès que la météo le permet, tous les avions décollent pour livrer bataille au-dessus de Verdun et de la Somme. Des raids alliés se poursuivent sur les aciéries de Lorraine et les zeppelins continuent de bombarder Londres. Mais ces bombardements deviennent de plus en plus risqués pour ces grands dirigeables, deux sont descendus dans le mois. Le 14, un raid franco-britannique de 40 avions largue 1 340 kilos de bombes sur la fabrique de fusils d'Oberndorf dans le Wurtemberg...

Dans la Guerre Maritime. Octobre 1916 marque un tournant. Travaillant d'arrache-pied depuis des mois pour la construction d'un sous-marin d'attaque vraiment transocéanique, les Allemands testent en conditions réelles leur nouveau modèle dit U-81 sorti des usines en août. Plus long et plus lourd que ses prédécesseurs, il accroît considérablement son rayon d'action avec une autonomie supérieure à 20 000 kilomètres, et sa profondeur en plongée atteint les 50 mètres. Son équipage est composé de 4 officiers avec 31 matelots, il peut emporter 12 torpilles, et un canon de 105 alimenté à 420 coups est installé sur son pont. Avec les deux modèles suivants, les U-87 et U-93, ils préfigurent déjà les sous-marins d'attaque de la deuxième guerre mondiale...

L'U-35, avec à son commandement le maintenant célèbre Lothar von Arnauld de La Perière, continue une patrouille commencée le 19 septembre dans la Méditerranée. Le 2 octobre, il torpille l'aviso français Rigel, placé en surveillance dans le sud des Baléares. Treize marins sont tués sur le coup, sa coque est déchirée à la hauteur de sa chaufferie qui est immédiatement envahie par l’eau. Ne s'avouant pas vaincu, le Rigel canonne le sous-marin chaque fois que ce dernier est visible. Malgré l’arrivée des chalutiers armés Fier et Héron avec les contre-torpilleurs Catapulte et Arquebuse, l’U-35 parvient à torpiller une seconde fois le Rigel à 13h30. Cette deuxième torpille déchire son arrière et tue encore quatre hommes. Alors que les marins du Rigel essayent toujours de toucher l'U-35 au canon, l’arrivée de deux autres torpilleurs français font enfin fuir le sous-marin. Le 3, il coule le Samos, un vapeur grec, au large des Baléares. Le 4 au matin, à l'ouest de la Sardaigne, il coule le Birk, un vapeur norvégien qui faisait le trajet de Philippeville à Marseille. Le même jour, dans l'après-midi, il aperçoit un grand navire français. Parti de Toulon la veille avec 2 000 soldats Serbes et Français, le croiseur auxiliaire français le Gallia navigue à l'ouest de la Sardaigne pour rejoindre Salonique. A 17h30, une torpille lancée par l'U-35 vient le toucher par le travers de la cale avant qui est chargée de munitions. L'explosion est considérable et détruit totalement le poste de télégraphie ce qui ne permet pas au bateau de lancer un SOS. Aussitôt c'est la panique à bord, tout le monde sait que le navire est fichu et qu'il va couler. La plupart des soldats se jettent à l'eau, rares sont ceux qui parviennent à mettre des chaloupes à la mer tant la gîte est forte. En moins de 15 minutes, le navire se dresse sur son arrière et coule à pic. A l'emplacement de l'épave maintenant engloutie des centaines de soldats et matelots ainsi que des mulets luttent pour rester en vie en s'accrochant à tout ce qui flotte, y compris des ballots de paille. Mais la nuit arrive vite et, à part ceux qui ont réussi à monter dans des chaloupes ou sur des radeaux de fortune, ils sont engloutis dans la mer froide et les ténèbres. Le lendemain après-midi, des chaloupes sont repérées et enfin l'alerte est donnée. Les navires le Châteaurenault, La Normandie, l'Almath et l'Aldebaron participent aux secours, deux canots parviennent même à la rame à regagner Caloforte sur l'île de San Pietro avec 69 personnes à bord. Au total, sur les 2 350 soldats et matelots présents à bord, 1 740 périssent. C'est la plus grande tragédie maritime de la Grande Guerre. Le 5, à 9h25 au large de péninsule italienne, l'U-35 coule le vapeur italien Aurora qui fait route vers Tunis. Trente minutes après, il coule le vapeur suédois Vera qui se dirige vers Naples. Au total, dans une campagne de 16 jours, l'U-35 a coulé 22 navires et causé la plus grande tragédie maritime de la Grande Guerre. Et, en plus, ce n'est pas le seul sous-marin germano-austro-hongrois à écumer la Méditerranée...

Le 12, dans le détroit du Bosphore, le sous-marin russe Le Tieulen attaque au canon le vapeur turc Rodosto commandé par des officiers allemands. Après une heure de combat, il le capture et le ramène à Sébastopol...

Parti le 20 septembre de Wilhelmshaven en Allemagne, l'UB-53 traverse la mer du Nord puis l'Atlantique pour arriver à Newport sur les côtes étasuniennes le 7 octobre. Il a mis 17 jours pour aller d'un continent à l'autre. Profitant de la neutralité des USA, il se ravitaille en carburant comme en vivres et attend son collègue l'U-61 qui fait de même quelques jours après. Là, dans les eaux territoriales étasuniennes les deux submersibles impressionnent les navires US qu'ils arraisonnent seulement, mais ils attaquent sans pitié tous les navires qu'ils considèrent comme ennemis. Les vapeurs britanniques West-Point, Strathdene, Stephano, Alaunia sont coulés à la torpille, mais aussi le vapeur hollandais Bloomerodijk et le norvégien Christian-Knudsen...

Le 21, dans un vacarme qui retentit dans toute la ville de Sébastopol en mer Noire, le cuirassé russe à peine vieux d'un an, Impératrice-Marie explose. Le feu se déclare aussitôt et le navire finit par couler. Deux cent vint-cinq marins sont tués, 85 autres grièvement blessés. L'enquête officielle conclut à une explosion probablement d'origine accidentelle due à l'inflammation de la poudre noire des munitions, mais le sabotage n'est pas exclu. Malgré une tentative de renflouement, les évènements russes de l'année 1917 empêcheront toute réparation...

Le 26, la marine allemande lance à partir du port Zeebrugge en Belgique occupée dix destroyers dans la Manche pour en perturber le trafic. Le cargo britannique The Queen, qui circule à vide, est coulé, mais tout son équipage est sauvé. Le destroyer britannique Flirt est lui aussi coulé, et pour lui aussi les hommes sont sauvés. Le destroyer Nubian, avarié par une torpille est remorqué à son port d'attache. Pris à partie par des navires mieux armés, deux destroyers allemands sont coulés, les autres parviennent sous des nuées d'obus à regagner leur port de départ...

Le 28, le vapeur italien Marina G est coulé au canon, mais sans avertissement, par l'U-21 au large de la Sicile. Il est parti du port de Newport-News en Virginie aux USA et, en plus des Italiens, une autre partie de son équipage est composée d'Étasuniens avec des Britanniques chargés de soigner sa cargaison de chevaux. Plus de 50 hommes périssent, et les USA protestent officiellement contre cette agression sans sommation sur un navire de commerce. Le même jour, l'U-73 qui patrouille dans la mer Égée, torpille lui aussi sans sommation le vapeur grec Angeliki qui transporte des volontaires grecs crétois partis combattre avec les Alliés à Salonique. Ce torpillage tue 56 personnes et provoque à Athènes l’expulsion des chefs de la délégation allemande...

Le 30, le vapeur britannique Galeka, transformé en navire hôpital, heurte une mine au large du Havre dans la Manche. L'explosion tue et blesse de nombreuses personnes à bord, mais les secours arrivent rapidement pour secourir tous les survivants. Abandonné, le navire à moitié éventré finit par s'échouer au nord du poste d'Octeville...

Durant tout le mois, les 50 sous-marins allemands en activité dans les mers européennes et aussi près des côtes US coulent 199 navires, ce qui occasionne la perte de 358 000 tonnes, ils endommagent aussi 5 autres navires. A l'automne 1916, avec la guerre sous-marine qui recommence, les pertes maritimes tant en hommes qu'en matériel sont celles d'un véritable champ de bataille...

Sur les Fronts Italiens. Comme en France dans les Vosges, les Alpes italiennes sont déjà couvertes de neige. Dans ces conditions on ne se combat plus vraiment, les soldats essayent avant tout de construire des abris pour se protéger du mieux qu'ils peuvent du froid et de la neige...

Près de la l'Adriatique il en est autrement. Le général Luigi Cardona veut poursuivre son avantage sur la frontière austro-hongroise après la prise de la ville Gorizia en août. Comme une grande partie de son armée est maintenant positionnée au-delà du fleuve Isonzo, le général avec son état-major pensent conquérir rapidement le port de Monfalcone, la ville clé pour accéder enfin au grand port de Trieste, objectif depuis le début de la guerre en Italie le 23 mai 1915...

La huitième bataille de l'Isonzo débute le 10 octobre. Deux armées italiennes s'élancent pour bousculer la 5ème armée ennemie. La supériorité de l'artillerie austro-hongroise rend cette attaque aussi meurtrière qu'une journée à Verdun. Les soldats italiens sont équipés avec du matériel vétuste et inadaptés, l'assaut italien échoue 3 kilomètres plus loin. Sur leur sol, la défense austro-hongroise se révèle aussi intraitable que les Français à Verdun. Le 12, Cardona arrête les frais, laissant près de 25 000 morts sur le terrain, un coût du sang que les Italiens ne peuvent plus se permettre de faire trop souvent. Les défenseurs paient cette défense épique par un nombre équivalent en pertes humaines...

Le 25, devant les assauts répétés des Italiens, les autorités austro-hongroises se décident à évacuer la ville de Triestre d'une partie des civils de langue germanique. Comme le port est de toute façon inutilisable depuis des mois, il ne sert à rien d'y laisser des gens se faire massacrer...

Nullement impressionné par l'échec du 15 octobre, Cardona prépare une nouvelle offensive, cela ne fait que la neuvième, mais cette fois-ci plus au nord, à l'est de Gorizia. Elle débute le 31 octobre et se déroule exactement dans les mêmes conditions défavorables pour les Italiens. Là encore, tenant les hauteurs, l'artillerie ennemie décime les soldats italiens qui s'aventurent à découvert...

Sur le Front en Russie. La période de la boue vient de commencer, du nord au sud plus rien de bouge. Toutefois, de temps en temps, spécialité russe, un raid des cavaliers cosaques vient semer la panique dans les lignes allemandes...

C'est sur leur frontière roumaine que les Russes sont inquiets, car si la Roumanie capitule, il est probable que les forces des Empires centraux profiteront de cette possibilité pour envahir la Russie. Cela sera d'autant plus tentant qu'à cet endroit-là aucun obstacle géophysique d'importance ne peut freiner une armée conquérante. Odessa et surtout toute l'Ukraine seraient vite conquises. Du coup, les Russes envoient des renforts, avec un nouveau général, pour essayer de contenir la poussée germano-turco-bulgare dans la province roumaine du Dobroudja sur les rives de la mer Noire et dans les Carpates boisés. Malgré ses faibles ressources économiques, la Russie aide du mieux qu'elle peut les Roumains avec du matériel militaire...

Sur les Fronts Roumains. A l'ouest, en Transylvanie, le général allemand Erich von Falkenhayn, après avoir forcé les Roumains à évacuer Sibiu, les poursuit sans ménagement jusqu'aux Carpates où ils se retranchent. Ainsi s’achève, vers le 15 octobre, la campagne de Transylvanie commencée dans l’euphorie sept semaines plus tôt. Sur le front sud, commandées par le général August von Mackensen, des troupes germano-turco-bulgares pénètrent bien en avant dans le Dobroudja sur les rives de la mer Noire. Les Russes, présents en nombre dans cette province sous le commandement du général Zaiontchicovski, ne se défendent que très mollement. Cela ne fait pas les affaires des Roumains qui comptaient expressément sur cette armée russe du Danube pour assurer l'intégrité de leur territoire dans cette province facile à conquérir. Maintenant, les routes menant à Bucarest, la capitale roumaine, et celles menant au grand port de Constantza, sont ouvertes. La contre-offensive du général roumain Alexandre Averescu à Flamânda, au sud du Danube, se solde par un désastre. Les Germano-Turco-Bulgares accentuent leur avantage, en prenant le port de Constantza le 24 octobre. Le grand quartier général russe se décide alors à réagir en envoyant en Dobroudja le général Vladimir Sakharov commander l'armée du Danube. C'est un officier capable, un des adjoints d'Alexeï Broussilov, il s’emploie en priorité à rétablir la discipline puis il réussit à stabiliser le front sud aux alentours du 8 novembre...

Le général Henri Berthelot arrive à Bucarest le 15 octobre. Sagement, il refuse le poste de chef d'état-major général que lui propose le président du conseil roumain Ion I. C. Brătianu. En effet, au-delà de l’honneur de la fonction, les susceptibilités des officiers roumains et russes doivent être ménagées. En outre, en octobre 1916, la situation militaire roumaine est déjà compromise et Berthelot se refuse à assumer les erreurs commises avant son arrivée. Le Forézien (il est né à Feurs dans la Loire) choisit d’en assumer la direction de fait, mais de manière officieuse. Fin négociateur, excellent diplomate, il parvient à s’imposer aux officiers roumains et à installer une bonne entente entre Français, Russes et Roumains. Devant ce refus motivé de Berthelot, c'est le roi Ferdinand Ier qui prend le commandement en chef des armées roumaines en congédient les officiers supérieurs qu'il juge incapables...

A partir du 15, dans les Carpates enneigées, sur un front de près de 800 kilomètres, les combats deviennent alors plus âpres. Falkenhayn envisage d’abord de passer au sud de Brasov, pour atteindre Bucarest par le chemin le plus court. Son initiative est contrecarrée par une tentative totalement infructueuse menée au défilé du Jiu, en Moldavie dans les Alpes transylvaniennes, par l'archiduc Charles entre les 11 et 27 octobre. Falkenhayn subit lui aussi des revers le 24 à Predeal et le 27 à Câmpulung...

Dans cette campagne, l’armée roumaine, qui se nourrissait exclusivement des souvenirs glorieux des guerres de 1877 et de 1913, subit de plein fouet le choc de la guerre moderne, à laquelle elle n’est pas préparée. Les aéroplanes et les zeppelins bombardent presque impunément Bucarest dépourvue de DCA et protégée par moins d’une demi-douzaine d’aviateurs. Les Allemands emploient également les gaz, comme au défilé de Clabucetul Baiutului dans les Carpates le 31 octobre. Falkenhayn tire le meilleur profit de l’expérience acquise sur les champs de bataille du front de l'ouest européen...

Dans les Balkans. Commencée le 12 septembre, la reconquête de la Serbie se poursuit méthodiquement. Depuis la prise de la ville de Florina le 18 septembre, la très cosmopolite armée d'Orient mène son offensive en direction de Monastir. Schématiquement et pour résumer, d'ouest en est de ce front qui fait quand même près de 500 kilomètres, il y a des Italiens, des Serbes, des Russes, des Britanniques et des Français. Britanniques et Français y joignent aussi leurs troupes coloniales. En tout, près de 800 000 soldats et aviateurs sans compter les marins qu'il est presque impossible de compter en détail tellement cette force-là est dispersée. Il y aussi des soldats albanais, monténégrins, portugais et une petite troupe de soldats grecs composée de volontaires. Le seul fait moderne, même très moderne, c'est que le général Maurice Sarrail est le premier Chef de guerre au monde à posséder un état-major combiné qui supervise toutes les nations alliées avec l'ensemble des composantes d'une armée moderne. Son pouvoir va des troupes terrestres (infanterie, génie et artillerie) jusqu'à l'aviation en passant par les forces maritimes y compris la multitude de navires de commerce qui font la navette entre l'Europe de l'ouest et les Balkans. Il a aussi un pouvoir politique sur la très remuante Grèce qui n'arrive toujours pas à choisir franchement son camp. Seul lui échappe le trafic maritime international qui traverse la Méditerranée et qui utilise le canal de Suez. Et ce canal ne cessera pas de fonctionner un seul jour durant toute la Grande Guerre, même au plus fort de la guerre sous-marine...

En face de lui, les forces en présence sont tout aussi cosmopolites. Toujours d'ouest en est, il y des Austro-Hongrois, des Allemands, des Bulgares et des Turcs. En nombre de soldats, les forces sont assez équilibrées avec quand même une très nette supériorité de l'artillerie des Empires centraux sur celle de l'armée d'Orient. A l'inverse, la flotte de haut-bord des Empires centraux est négligeable et ne joue aucun rôle en Méditerrané, à part ses très efficaces sous-marins...

Sur le plan militaire, après le franchissement de la frontière serbe à l'ouest, les grands combats cessent rapidement, faute de ravitaillement adéquat. Il n'y a aucune ligne de chemin de fer à cet endroit-là et les routes dans cette partie très montagneuse de la Serbie n'ont jamais été prévues pour des armées en marche. Il faut tout amener de l'arrière dans des convois hippomobiles forcément très lents. Priorité est donnée à toutes les forces de la coalition d'essayer de se rejoindre pour ne faire plus qu'un front linéaire face aux forces des Empires centraux. Depuis le 30 septembre, les serbes occupent définitivement le massif fortifié du Kaïmackalan. Alors, durant tout le mois, par grignotages successifs, les régiments disparates se soudent petit à petit. A la fin du mois, les Serbes et les Italiens occupent toute la plaine de la Cerna à l'ouest, les Britanniques la vallée de la Strouma au centre. Une fois les positions sécurisées et correctement approvisionnées, les soldats alliés commencent leur lente remontée vers Monastir...

Sur la partie est du front, au nord de Salonique et dans la vallée du Vadar, c'est le calme plat. La seule activité qui est notée ce sont des duels d'artillerie qui, de temps en temps, animent le silence. Sarrail a si peur d'être pris à revers par une manœuvre politique du roi de Grèce, qu'il ne peut s'engager plus tant qu'il n'est pas sûr de ses arrières. Le port de Salonique est son unique lien avec l'Europe de l'ouest. C'est un cordon ombilical extrêmement fragile qui est constamment sous la menace des sous-marins, et en octobre 1916, ce sont eux qui mènent la véritable bataille dans les Balkans...

Les Austro-Hongrois, les Allemands et les Bulgares profitent de cette accalmie relative pour poursuivre leurs fortifications, notamment au sud du lac Doiran, dans la vallée du Vardar et au-dessus de Gevgueli. Ils font de même sur les crêtes de la Moglena autour de Monastir et de la boucle de la Tcherna jusqu'au lac Prespa...

Le 18, à la suite d'une revue passée par le roi Constantin Ier, des émeutes menées contre les Vénizélistes par les Ligues de réservistes loyalistes éclatent à Athènes. Prenant acte de cette rébellion, l'amiral Louis Dartige du Fournet, alors responsable de la totalité de la flotte alliée en Méditerranée, fait débarquer 240 fusiliers-marins français pour occuper la gare et le théâtre d'Athènes. Il exige du premier ministre grec, Spyridon Lambros, que des mesures spécifiques soient prises pour que son gouvernement assure le contrôle effectif de sa police et que la sécurité des voies ferrées soit garantie pour permettre la libre circulation des trains...

Au Moyen-Orient. Depuis juin et la création de l'État du Hedjaz, les remuants Bédouins d'Hussein Ben Ali mènent une guerre de harcèlement sur des troupes turques très statiques. Toutes les voies de communication sont régulièrement attaquées. D'abord, elles sont peu nombreuses dans cet immense désert, et impossible à sécuriser du fait de leur étirement. A noter que depuis août, les Français sous couvert d'organisation de pèlerinages à la Mecque pour les musulmans d'Afrique du Nord, mandatent un franco-algérien pour former les bédouins à la guerre de harcèlement. Entièrement dévoué à la métropole, Si Kaddour Benghabrit(7) mène cette tâche avec conviction sous la direction du lieutenant-colonel Édouard Brémond...

En Afrique Orientale, dans le Sinaï et en Mésopotamie. En octobre 1916 peu de mouvements guerriers dans ces trois zones de guerre. En Afrique Orientale, les forces alliées poursuivent leur progression dans cette colonie allemande sans livrer de grande bataille. Dans le Sinaï, la plus grosse activité reste toujours le prolongement de la ligne de chemin de fer qui, partie du canal de Suez, doit atteindre la Palestine. En Mésopotamie, le nouveau commandant, le général Frederick Maude, est bien décidé à reprendre Kut-El-Amara et à s'emparer de Bagdad. Tirant les leçons des expériences passées, les Britanniques reconstituent leur flotte d'attaque et de transport qui, par le Tibre, doit pouvoir assister les troupes indiennes chargées de la reconquête. Maude a le temps, au moins deux mois pour cela, car ce grand fleuve n'est vraiment utilisable qu'en hiver avec les pluies et au printemps quand il se gonfle des eaux de la fonte des neige du haut plateau arménien où il prend sa source...

 

Il est temps maintenant de revenir à Barbentane. C'est l'Écho de décembre 1916 qui donne les nouvelles d'octobre et début novembre. A Barbentane comme ailleurs, les temps deviennent durs. Comme en novembre, cet Écho n'a que 16 pages. Ce sont les photos des prieures de la Congrégation de Sainte-Philomène pour les années 1914-1915 et 1915-1916 qui ornent la première page. Dans un court article à la page 2, elles sont toutes nommément citées...

Dans l'article qui suit, c'est carrément l'Église, par sa hiérarchie, qui fait la réclame pour le deuxième emprunt de guerre. On peut noter que 153 Barbentanais ont souscrit un premier emprunt pour un capital de 243 599frs50, ce qui va représenter 13 290frs de rentes. Les dépenses faites par l'État depuis le début de la guerre se montent à 61 milliards 645 millions de francs, sans compter les crédits supplémentaires. Suivent trois pages d'explications pour les dépenses de l'État...

La fête de la Toussaint est relatée, on parle d'un champ de repos abondamment fleuri au cimetière. Le Monument commémoratif élevé en octobre 1914 est toujours-là (voir Barbentane en octobre 1914). Il est même mis à jour au fur et à mesure des décès. Le discours prononcé à cette occasion par le curé Hanse, un réfugié de la Meuse, est émouvant...

Au livre d'or, sont rappelées les citations du Dr Buis et du maréchal des logis Désiré Granier. Le 6ème bataillon de chasseurs alpins, où sont de nombreux Barbentanais, reçoit le droit de porter la fourragère. Il en est de même pour le 4ème zouave. Auguste Fontaine, garde-voie près de Marseille, est félicité pour avoir rapporté un portefeuille bien garni à ses chefs. Sont encore cités les abbés Tron et Bard des villages voisins pour leur conduite au front en tant que brancardiers...

Aucun Barbentanais ne sera tué au combat en ce mois d'octobre 1916...

Joseph Chaix, futur maire, est noté comme blessé par une bombe d'avion à Belfort. Six Barbentanais, tous cités, partent pour Salonique en Grèce...

Dans le courrier militaire, Louis Petit arrive à chanter sous la pluie et les bombes d'avion ; Louis Ayme, dans un secteur calme, est désespéré de n'avoir rien à dire ; Charles Gauthier a assisté à la messe dans la basilique du Sacré-Cœur à Paris et il devient l'hôte du comte Terray ; après une blessure, Georges Debès retourne au front ; François Granier est à Cagny (Somme) où des avions allemands viennent lui rendre visite ; C. Bertaud est à Verdun, mais c'est moins terrible qu'en juin ; l'abbé Bucelle est content d'avoir assisté des mourants tuberculeux jusqu'au bout ; Léontin Gilles, blessé, est à Gémenos ; Louis Mouiren écrit de Doiran en Macédoine où il commence à ne plus faire chaud ; Gilbert Vernet considère que Port-Saïd ne vaut pas Barbentane ; à Salonique, l'abbé Mascle se prend à devenir lyrique, à l'instar des aèdes dont le pays l'inspire ; JM Ginoux est à Florina (Macédoine) et marche 20 à 30 kilomètres par jour ; Jean Marceau envoie une note sur la signification de Poilu qu'il fait remonter à Ésaü, c'est hélas trop long pour être publiable [beaucoup de chansons font la rime avec Ésaü et poilu] ; Claude Marteau, GVC [Gardes des Voies de Communication] dans les Vosges est en attente d'affectation à Crépy-en-Valois (Oise) ; Jean-Marie Auzépy est de nouveau sur le front à patauger ; Jean Martin vient de se faire opérer pour la deuxième fois ; le nouveau blessé Joseph Chaix profite de son passage à Lyon pour voir Lucien Berrard, blessé lui aussi ; Jean-Marie Ollier est de nouveau dans le tourbillon ; Marius Fontaine affronte une température de 6° ; le brigadier Barthélémy est depuis le mois de mai à Verdun ; Jean-Marie Vernet est dans un bon secteur près de Reims ; Achille Deurrieu est dans le bled à Aïn-Lenh (village au centre du Maroc) ; Léon Jaoul se prépare à attaquer ; Louis Meyer est aux portes de Reims ; Gaston Narjon, dans un secteur très calme, se plaint du manque d'eau ; Louis Petit travaille à une tranchée avec un concert musical militaire et un survol régulier par des avions, ça le rend heureux et pas bileux ; Joseph Raousset, prisonnier, écrit de Limbourg en Allemagne ; Etienne Bernard croit plus à sa foi pour le sauver qu'à l'emprunt de guerre ; Auguste Issartel monte la garde dans un secteur calme mais avec de l'eau jusqu'aux genoux ; Jean Martin, blessé par une balle explosive à l'épaule droite, espère ne pas être estropié ; Jean-Marie Ayme a toujours l'épaule douloureuse ; Jean Bourges monte la garde sous la pluie mais sur le pont [d'un bateau je suppose] enfin, au moins un heureux, car Claude Marteau est content d'être cavalier...

Dans la vie paroissiale, un baptême et, enfin, le 26 octobre 1916, un mariage !!! Le dernier mariage civil et religieux a eu lieu le 21 décembre 1914, soit 22 mois auparavant...

Guy

 

A Verdun, assaut français vers Douaumont

Clémenceau dans une tranchée à Verdun le 12 octobre

Mortier français de 400 mm, un des démolisseurs du fort de Douaumont et de celui de Vaux (photo autochrome)

Carte de la bataille de Verdun en octobre

Soldats britanniques aux cantines roulantes

En Grande-Bretagne. Les rapports sont de plus en plus tendus entre David Lloyd George, le nouveau Secrétaire d'État à la Guerre et le Chef d'état-major des armées britanniques, William Robertson(3). Pour Lloyd George, vu son coût en pertes humaines, la bataille de la Somme est un échec. Il ne croit pas aux nouvelles armes telles que les chars d'assaut ; pour lui il ne sert à rien d'investir de nouveaux moyens humains et matériels en France. Les troupes en place doivent se borner à une stricte position défensive. Il faut, plaide-t-il, redéployer les armées britanniques sur les autres théâtres d'opérations pour vaincre l'Allemagne. A l'inverse, William Robertson ne pense pas possible de vaincre l'Allemagne ailleurs qu'en France. Pour lui, il faut que la Grande-Bretagne place tout son potentiel militaire présent et à venir dans ce pays. La controverse ne fait que commencer, elle durera une année entière...

Lloyd George voit plus loin encore, il a l'ambition que la Grande-Bretagne devienne maître, ou du moins ait à moyen terme le protectorat, de tout le Moyen-Orient. Il est d'ailleurs prêt à associer les Français à son projet tout en se méfiant des nouvelles visées impérialistes des États-Unis sur cette région. Devant cette proposition le gouvernement français est très partagé. Il voit dans ce projet surtout la mainmise de la population musulmane sur tout ce continent, alors que de nombreuses autres minorités religieuses existent (chrétiens, juifs, orthodoxes et d'autres encore). De plus, le gouvernement français demande la levée, au moins partiellement, du blocus des côtes méditerranéennes (Syrie, Palestine, Liban) pour gagner l'adhésion de la population affamée et s'en faire une alliée. C'est un refus net des Britanniques. Alors, le 10 octobre, la France refuse la proposition britannique...

Dans un long discours le 12 octobre à la Chambre des Communes, le premier Ministre exclut toute paix prématurée avec les Empires centraux...

Le 20, lors de la conférence franco-britannique de Boulogne-sur-Mer, à l'inverse de son Secrétaire d'état à la Guerre, le Premier ministre soutient son chef d'état-major Robertson et s'oppose aux offensives menées dans les Balkans. Toutefois, pour être fidèle à sa parole, la Grande-Bretagne envoie quand même un contingent de soldats à Salonique pour ne pas être le seul allié à rester les bras croisés...

Le 25, l'armée britannique appelle sous les drapeaux tous les hommes de 41 ans. Elle poursuit et emprisonne les insoumis, elle fait remplacer par des femmes la plupart des hommes valides qui travaillent encore dans les usines...

En Allemagne. Dans son compte-rendu au Reichstag, Adolf Max Johannes Tortilowicz von Batocki-Friebe, le ministre allemand de l'Approvisionnement, déclare que la situation alimentaire est mauvaise. Il laisse peu d'espoir au peuple pour une amélioration de la situation, même à moyen terme...

Le 21 à Berlin, au siège grand quartier général de l'armée allemande, une conférence se tient entre les ministres des Affaires étrangères allemand Gottlieb von Jagow et Stephan Burián von Rajecz, en présence de l'empereur Guillaume II. La subordination de l'armée austro-hongroise à l'armée allemande maintenant est actée. Au communiqué final, les deux pays continuent de manifester une foi inébranlable en la victoire finale des Empires centraux sur leurs ennemis qui les ont agressés...

Le 25, suspectant les Alliés de faire transiter par la Norvège et la Suède une partie du ravitaillement en hommes et en matériels pour la Russie, l'amirauté allemande installe ses sous-marins le long de la côte norvégienne et dans le fjord Christiania qui est situé juste devant la capitale Oslo. Dans ce blocus de fait, plusieurs bâtiments norvégiens et suédois sont coulés malgré leur statut de neutralité...

En Autriche-Hongrie. A Vienne, le 21 octobre, le socialiste et antimilitariste militant Friedrich Adler, physicien de formation et ami d'Albert Einstein, assassine le Ministre-président d'Autriche Karl Graf von Stürgkh dans un restaurant de la ville. Aussitôt, le parti social-démocrate autrichien où il est adhérent, condamne cet acte de terrorisme individuel totalement étranger à l'idéologie marxiste dont le mouvement se réclame. La presse le présente comme fou, incapable de mesurer la portée de ses actes. Lors de son procès, il justifie son geste "Quand les dirigeants d'un parti ont perdu leur esprit révolutionnaire, comme c'est le cas en Autriche, un acte individuel peut ranimer l'esprit du parti". C'est le seul procès dans l'histoire où le jugé base sa défense sur les principes de la relativité générale ainsi que sur la logique de la controverse entre les coperniciens et anticoperniciens. Il demande à ses juges "Comment peut-on dire qu'agir dans l'intérêt de la lutte des classes soit moins moral que de faire la guerre au nom de la lutte nationale ?". Il profite aussi de son procès pour prononcer durant 4 heures un plaidoyer contre la guerre. Il se justifie "Je ne crois pas aux actes de terrorisme individuel, je crois au pouvoir des masses. Je ne suis pas un anarchiste, je persiste à insister sur le fait que l'action des peuples est décisive. Je voulais établir les conditions psychologiques favorables à de futures actions collectives." Bien sûr, il est immanquablement condamné à mort par ses juges(4)...

Faisant suite à cet assassinat, les partis présents au Reichsrat, le parlement de l'Autriche-Hongrie, délibèrent sur l'opportunité d'une convocation de cette assemblée pour élire un nouveau Ministre-Président. Finalement le 31, c'est Ernest von Koerber, un vieux politicien autrichien, que l'empereur François-Joseph presque mourant désigne pour succéder à Stürgkh...

En Russie. Le 4 octobre, à l'extrême nord du pays, sur les rives de la mer des Barents, dans la nouvelle ville de Romanov-sur-Mourman sont inaugurés le port avec le chantier d'une église dédiée à Saint-Nicolas le protecteur des navigateurs (la ville sera rebaptisé Mourmansk le 3 avril 1917). Malgré sa position géographique bien au-delà du cercle polaire ce nouveau port est libre de glace toute l'année grâce à un courant chaud, ce qui en fait une rareté. C'est la dernière création tsariste, elle sera appelé à jouer un grand avenir dans la Russie. Pour l'instant, la ligne ferroviaire qui doit la relier à la ville de Saint-Pétersbourg n'est pas encore terminée, mais cela sera fait sous peu...

Le lendemain 5 octobre, presque à l'autre bout de l'immensité russe, avec le franchissement du fleuve Amour par un pont à Khabarovsk, la ligne de chemin de fer du Transsibérien est terminée. C'est la fin d'un projet gigantesque qui avait pour ambition de relier Moscou, capitale européenne de la Russie impériale, au grand port militaire russe de Vladivostok dans la mer du Japon sur la rive asiatique de l'Empire. Les travaux ont débuté en 1891 pour se terminer 25 ans après, en octobre 1916. Sa construction a subi bien des vicissitudes, dans des conditions de froid parfois extrême comme au nord du lac Baïkal, et son tracé a dû être modifié avec la perte de la Mandchourie par les Russes en 1907 au profit du Japon. Avec ses 9 288 kilomètres, c'est encore la plus longue ligne de chemin de fer au monde. Chantée par les aventuriers et les poètes, cette voie mythique fait toujours partie de la vie quotidienne des Russes. Par contre elle est beaucoup moins fabuleuse auprès des millions de personnes dans le monde qui ont souscrit aux emprunts russes pour construire, entre autre, cette ligne et qui n'ont plus jamais revu la couleur de leur argent...

Aux Tchèques en Exil à Paris. Le 16 octobre, le Président de la République, Raymond Poincaré, fait savoir à Tomáš Masaryk et Edvard Beneš que la France reconnaît officiellement le Conseil national des pays tchèques, et le Premier ministre britannique Herbert Henry Asquith, fait de même quelques jours plus tard...

En Belgique et en France Occupée. En octobre 1916, le haut commandement allemand fait le choix de la guerre à outrance, non seulement sur le plan militaire mais également sur le plan économique. Au nom de sa survie industrielle, l'autorité d'occupation commence les opérations de convocations, de sélections arbitraires et de déportations d’ouvriers. Ces actions dureront jusqu’à la fin de la guerre, au mépris des conventions internationales qui stipulent qu'aucun civil ne peut être utilisé au profit de l’effort de guerre de l’ennemi contre sa patrie. Ces travailleurs, intégrés sous la menace dans des "Zivil-Arbeiters-Bataillone", sont encore moins considérés que des prisonniers. Ils sont soumis à des travaux pénibles, dans des conditions épouvantables tant du point de vue de la sécurité que de celui de l’hygiène. La majorité est astreinte à des travaux le long du front, les autres sont envoyés en Allemagne pour travailler dans les usines d'armement. Entre octobre et la fin de l'année 1916, ce ne sont pas moins de 62 000 civils belges et 20 000 Français qui subiront ce sort. Par ailleurs, le gouverneur allemand von Bissing mène en Belgique occupée une politique qui vise à convaincre les Belges que leur avenir à long terme est inévitablement lié à celui de l’Allemagne. La population est traitée comme des esclaves. Toutefois, en France comme en Belgique, les protestations émanant de grandes figures restées dans la partie occupée du pays (le cardinal Mercier, des parlementaires, les Grands Maîtres maçonniques, l’ambassadeur des États-Unis à Bruxelles(5)…), relayées par la presse internationale, donnent mauvaise conscience au Allemand. En mars 1917, les déportations sont suspendues un temps, mais elles reprendront vite. Au total, ce sont près de 140 000 travailleurs franco-belges qui subiront la contrainte du travail obligatoire au service des Allemands...

En Grèce. Depuis la création d'un gouvernement provisoire dissident en septembre, les négociations entre les Alliés et le gouvernement loyaliste d’Athènes s’intensifient. A partir du 5 octobre, les Alliés, par la voix du député français Paul Bénazet, demande à Constantin Ier une démobilisation totale de son armée avec l’évacuation de la Thessalie afin de garantir la sécurité de l’armée d’Orient à Salonique. Pour éviter d'envenimer ces pourparlers, le gouvernement loyaliste grec interdit à la presse toute attaque, toute injure contre les Alliés. Durant 15 jours, ultimatums et négociations se succèdent pour obtenir du gouvernement royal le renvoi des officiers de police et de l'armée jugés trop pro-allemands. Les Alliés veulent aussi le contrôle du chemin de fer d'Athènes à Larissa, le désarmement puis la mise sous séquestre de la flotte grecque, le contrôle de la baie de Salamine et du port du Pirée. De son côté, Constantin exige des Alliés qu’ils ne reconnaissent pas le gouvernement provisoire, qu’ils respectent l’intégrité territoriale et la neutralité de la Grèce...

Le 3 octobre à la Canée en Crète, le triumvirat composé de l'ancien Premier ministre grec Elefthérios Venizélos, du général Panagiotis Danglis et de l’amiral Pavlos Koundouriotis, décide de convoquer l'avant-dernière chambre grecque. Cette assemblée dissidente devra désigner un véritable gouvernement avec la distribution des portefeuilles ministériels. Cela sera fait le 6 avec la désignation de 9 personnalités aux postes clés (Justice, Finances, Intérieur, Éducation, etc...). Le 9, le gouvernement provisoire de Venizélos s'installe à Salonique. C'est le début du Schisme National Grec. Mais les Empires royaux russes et britanniques ne voient pas d'un bon œil cette manœuvre, ils suspectent même les Français de vouloir supprimer la royauté grecque pour la remplacer par une république laïque, et les Italiens sont franchement contre. D'ailleurs, sous prétexte de contrôler la route stratégique qui alimente son corps expéditionnaire en Épire, l'Italie entame l'albanisation de cette partie de la Grèce. Elle déporte sur son sol des notables Grecs, les écoles ont l'obligation d'enseigner l'Albanais(6) au lieu du Grec, et le Vatican expédie un contingent de curés afin de catholiciser les orthodoxes...

Encore plus compliqué, si le général Maurice Sarrail appuie sans réserve le gouvernement vénizéliste, il n'en va pas de même à Paris. Aristide Briand, le président du Conseil, est même dans un embarras certain. Il faut savoir que depuis 1913 il est l'amant de Marie de Bonaparte, et le mari d'icelle n'est autre que Georges de Grèce, le frère du roi Constantin Ier. Il faut bien connaître la gaudriole pour espérer comprendre la politique française. Le plus grave c'est que Briand néglige les mises en garde, pourtant répétées par les Français en place, révélant que les loyalistes grecs des Ligues de réservistes envisagent d'attaquer certains éléments de l'armée d'Orient. Dans ces hésitations, on ménage la chèvre et le chou. Une aide matérielle est apportée aux vénizélistes pour les aider à administrer et ravitailler les territoires sous leur autorité mais officiellement, à la conférence interalliée du 20 octobre à Boulogne-sur-Mer, le gouvernement vénizéliste n'est pas reconnu par les Britanniques, ni même par les Français...

Après plusieurs semaines de négociations infructueuses, le 23 octobre Bénazet a la surprise de voir le souverain accepter une bonne partie des conditions que les Alliés réclament. Prenant bonne note de la non-reconnaissance officielle du gouvernement vénizéliste, Constantin Ier admet l'évacuation par les militaires grecs de la Thessalie. Il propose de remettre aux Alliés la majeure partie de son arsenal militaire ainsi que l’intégralité de sa flotte avec toutes ses munitions sous réserve que le tout ne soit pas livré aux vénizélistes. Il réclame aussi que l’accord soit gardé secret afin de ne pas exposer la Grèce au risque d’une attaque des puissances centrales. Par contre, il refuse de dissoudre les Ligues de réservistes qui, sous le contrôle du général Ioánnis Metaxás, entretiennent désormais un climat de guerre civile larvée en se livrant à toutes sortes d'exactions et de violences sur les vénizélistes dispersés dans le pays. En agissant ainsi, Constantin Ier espère que la France n'aura plus de raison valable pour soutenir le gouvernement provisoire de Venizélos...

En Albanie. Au mois d'octobre, la petite Albanie avec ses moins de 3 millions d'habitants est divisée en trois. Au nord, elle est sous la domination des austro-hongrois qui occupent les 3/4 du pays depuis 1915 avec dans Tirana, la capitale, un gouvernement à ses ordres. La partie sud-ouest, est devenue un protectorat italien avec le port de Vlora qui arbore fièrement les couleurs de la maison de Savoie. Et enfin une petite partie du pays autour de la ville de Korcé est sous la protection des Français qui l'occupent depuis juin...

En Norvège. Suite à la mise en place du blocus le long de ses côtes, les autorités s'irritent du comportement de l'Allemagne à son égard. Pour les Norvégiens les motifs de ce blocus sont totalement infondés, ils se justifient en disant qu'ils ne font que du commerce maritime comme cela est pratiqué depuis des siècles. En fait, comme pour la Hollande, le Luxembourg, la Suède, la Finlande ou la Suisse, le statut de neutralité en Europe soustrait pas ces pays de subir tous les effets néfastes de la guerre y compris de pleurer leurs morts...

En Argentine. Le 12 octobre c'est le dirigeant de l’Union civique radicale, Hipólito Yrigoyen, qui devient président de la République. Par ce vote, les classes moyennes du pays mettent un terme à l’oligarchie qui gouvernait le pays jusqu'alors...

En Australie. Le 27 octobre, par référendum, le service militaire obligatoire est refusée par une majorité d'électeurs (48% pour, 52% contre). C'est donc par volontariat que l'armée est obligée de recruter, ce qui devient de plus en plus difficile dans un conflit qui s'éternise. Autre particularité australienne, son armée a également le taux de désertion le plus élevé des contingents engagés dans le conflit. Une des causes est que la peine de mort n'est pas en vigueur pour les déserteurs. Mais il faut aussi signaler que la grande majorité de ces déserteurs retournent volontairement dans leur unité, à la différence de ceux des autres armées...

Au Moyen-Orient. Le 29 octobre le chérif Hussein de La Mecque se proclame roi du Hedjaz. Les Français et Britanniques sont mis devant le fait accompli...

Dans le Monde des Sciences, des Arts, des Lettres et du Sport. Le 15 octobre, s'ouvre à Paris une exposition du peintre français fauviste André Derain pourtant mobilisé. Le 23, le Roumain Constantin Brâncuși expose une partie de ses œuvres à New York, c'est certainement le sculpteur le plus influent en ce début du XXème siècle. Le 26, à Jarnac dans la Charente, François Mitterrand voit le jour. Homme politique français, il deviendra le chef d'état de la Vème République dont la présidence aura été la plus longue, de 1981 à 1995 († 8 janvier 1996)...

 

Sur le Front des Combats :

En France, dans la Somme. Les grandes batailles sont finies. Français, Britanniques et Allemands sont épuisés. La météo est toujours exécrable, d'ailleurs la pluie restera un des éléments attachés à cette bataille au même titre que les premiers engins blindés. Durant tout le mois, les coups de main franco-britanniques-allemands sont nombreux, mais les gains territoriaux, quand ils sont présents, sont minimes...

Le 16, Joffre est mécontent, il veut la fin des "petites attaques". Il fait parvenir une note au général Foch pour qu'il mette fin aux opérations "de détail" sur des fronts étroits. Dès le lendemain, il envoie la même note au général Haig. Mais les Français n'arrivent plus à avancer. Ils piétinent dans la boucle de la rivière devant Péronne, autour de Chaulnes et de Villers-Carbonnel. Les Britanniques font de même de la forteresse de Thiepval qu'ils ont prise en septembre jusqu'à la boucle de la Somme où les armées françaises sont bloquées...

Le 29, les Allemands mènent une contre-offensive entre Biaches et La Maisonnette. Elle est précédée par des centaines de lance-flammes, elle n'a pas plus de succès que les offensives menées par les Franco-Britanniques...

En France, à Verdun. Sur tous les fronts de Verdun, rive droite comme rive gauche, mis à part quelques engagements locaux dans le secteur de Thiaumont, la bataille qui dure depuis 7 mois s'atténue. Cette accalmie relative permet aux Français de réaliser plus facilement leurs grands préparatifs pour la reconquête des forts de Douaumont et de Vaux. Cependant, les pluies abondantes sapent le moral des combattants, certaines tranchées sont carrément des rivières, et la lassitude des soldats est très grande de part et d'autre. En dépit de cela, les généraux Philippe Pétain et Robert Nivelle planifient depuis près d'un mois une future offensive dans ses moindres détails. Le général Charles Mangin est chargé de la mener avec efficacité. Sur le terrain, la construction des chemins d'accès pour accéder au contact des Allemands se poursuit toujours dans l'horreur. Les sapeurs chargés des travaux rapportent "On travaille dans un immense cimetière ou les cadavres sont loin d'être décomposés". Mais il faut le faire, alors on le fait, car on sait que la victoire est à ce prix...

Le 9 octobre, Nivelle reçoit le général Joseph Joffre à son PC à la mairie de Souilly. Ce dernier est venu voir où en est la situation. Le 12, c'est à Georges Clémenceau, alors président de la commission de l'Armée au Sénat, de venir au PC de Nivelle. Lorsqu'il descend de sa voiture et s'apprête à monter les marches de la mairie, tous les soldats présents l'applaudissent et l'acclament. Après un court exposé fait par Nivelle, conférencier de talent, Clémenceau veut monter au front voir les premières lignes. Tous les officiers présents lui déconseillent ce déplacement en mettant en avant la dangerosité des lieux, mais le Président l'exige et le cortège de voitures part pour une visite du front dans le secteur du fort de Souville. Devant le fort où il visite une tranchée gluante et puante, un des officiers lui dit "Monsieur le Président, là, il faut être très prudent et faire vite ; c'est très dangereux" sa réponse fuse "Quelle serait plus belle mort pour moi que de la faire ici ?"...

Le 15, Nivelle rend compte à Pétain que tous les préparatifs sont prêts. Il ne reste plus qu'à définir le jour et l'heure de l'offensive. Une grande préparation d'artillerie est programmée pour débuter le 20, elle devra s'étaler sur au moins 3 jours. Le jour de l'assaut sera déterminé au dernier moment compte tenu des éléments que la météorologie, maintenant une composante de la tactique militaire, donnera. C'est d'ailleurs la première fois que l'on va tenir compte à l'avance de la météo pour programmer une attaque, le reste du temps on ne s'en préoccupait que le jour même où l'assaut était fixé. Si les conditions étaient trop défavorables, on remettait tout simplement l'attaque...

Dès l'aube du 20, comme programmé, l'artillerie débute sa préparation. Les Français alignent 654 pièces. Les 20 obusiers du 270 au 400 visent particulièrement les forts ; les 300 canons du 120 au 220 s'occupent des positions d'artillerie ennemies repérées et, pour finir, les 334 canons de tranchées du 65 au 105 bombardent les points fortifiés et les emplacements de mitrailleuses. Bien sûr, les Allemands réagissent. Alors, durant deux jours c'est un formidable duel d'artillerie ininterrompue. Dans la matinée du 22, par beau temps et sur ordre, toutes les pièces de petits calibres françaises allongent le tir et de grands mouvements agitent les tranchées, faisant penser à une grande attaque imminente. Mais c'est une ruse, et les Allemands se font prendre. Croyant à une attaque immédiate, 158 pièces d'artillerie bien camouflées se dévoilent et commencent à tirer. Grâce au beau temps, tous les avions d'observation français sont en l'air et repèrent très facilement l'emplacement de chaque nouvelle pièce qui tire. Quelques heures après, toutes les batteries ainsi repérées sont systématiquement pilonnées et seulement quelques unes seront encore signalées actives le jour de l'attaque...

Le 23, dès 8h00, toutes les pièces françaises de gros calibre pilonnent le fort de Douaumont, première priorité du jour J. A 12h30, un obus de 400 transperce la superstructure du fort pour venir exploser au milieu de l'infirmerie instantanément ravagée. La déflagration est dantesque, tous les soldats, dans et hors du fort, savent que ce dernier est "gravement blessé". Un incendie se déclare immédiatement et quelques minutes plus tard un autre obus traverse la voûte en tuant plus de 50 soldats dans une casemate. A 13h30, 5 obus ont traversé la voûte en ébranlant l'édifice. D'ailleurs, le commandant allemand du fort, le chef de bataillon Rosendahl, demande aux soldats de s'abriter dans les étages inférieurs. Mais un 6ème obus traverse la voûte supérieure puis pénètre dans les étages inférieurs où il finit par éclater dans une réserve de munitions. Aussitôt c'est une formidable explosion suivie par un incendie dont la fumée opaque et asphyxiante se propage immédiatement dans tous les couloirs de l'édifice. Les soldats présents mettent immédiatement leur masque à gaz et se précipitent pour fuir le bâtiment. Dehors, voyant les colonnes de fumée qui s'échappent de l'édifice et conscients de la manœuvre, les Français bombardent toutes les issues possibles avec des obus au gaz. A 14h, progressivement la lumière s'éteint et à 17h Rosendahl ordonne l'évacuation du fort pour les hommes non indispensables. Seul un petit groupe du génie, une centaine d'hommes commandée par le capitaine Soltan reste, avec pour mission d'essayer d'éteindre l'incendie...

A 18h, les énormes obusiers français cessent de tirer, mais tous les autres calibres jusqu'au 220 se déchaînent encore aux alentours du fort. A l'intérieur, les sapeurs de Soltan entament une lutte à mort contre la fournaise. Rapidement, il n'y a plus d'eau pour éteindre les flammes et beaucoup d'hommes sont intoxiqués par la fumée. A 23h, Soltan ordonne de mettre une mitrailleuse en position à la sortie nord-ouest. Mais plusieurs équipes de mitrailleurs succombent successivement à cette place en raison du bombardement par les obus toxiques français. Dans la nuit, entre 4 et 5h, dans un dernier élan, les sapeurs de Soltan évacuent enfin le fort, titubants, vomissant, portant les blessés et les intoxiqués sur des civières, pas un seul homme du génie n'est abandonné...

Durant la journée, les généraux Pétain, Nivelle et Mangin se réunissent. Au vu des résultats positifs qu'a donnés la simulation d'attaque de la veille, des bonnes prévisions météo pour le lendemain et des derniers rapports concernant les préparatifs des régiments d'infanterie qui attendent à l'ouest de la ville de Verdun - la décision est enfin prise. Le jour J sera le lendemain, 24 octobre à 11h40...

Dès l'heure de l'attaque donnée, tous les éléments frais qui se préparent depuis un mois pour l'attaque se mettent en marche. Chaque soldat a reçu un équipement spécial, surtout des munitions, de l'eau et des rations supplémentaires, le fardeau atteint près de 40 kilos pour chaque poilu !!! Grâce au tourniquet, près de 100 000 soldats reposés et entraînés s'élancent. La marche est rapide et les hommes prévus pour les premiers assauts parviennent même à se reposer un peu dans les tranchées de première ligne avant l'heure H...

Le 24 octobre, à 7h00 une petite escouade de 20 Allemands regagne le fort de Douaumont. L'incendie brûle encore, mais de nombreux couloirs sont redevenus praticables, sans fumée. Du coup, le capitaine Prollius qui commande cette reconnaissance envoie une estafette pour avoir des renforts afin de réoccuper rapidement le fort...

Dans la matinée, un épais brouillard envahit tout le champ de bataille, on n'y voit pas à 10 mètres. C'est une protection, mais un aussi un piège car on peut se perdre. D'ailleurs quelle n'est pas la surprise d'un petit groupe de Français prêt à s'élancer pour l'assaut, de voir surgir du brouillard une patrouille allemande. Comme le rapporte un témoin "Ils allaient paisiblement, les mains dans les poches, l'arme à la bretelle. Stupéfaits, nous eûmes un instant d'indécision. C'est alors que le gradé du groupe proféra d'un ton lamentable 'triste guerre messieurs, triste guerre...' puis le brouillard les enveloppa et ces soldats allemands disparurent comme ils étaient apparus"...

A 11h40, heure de l'assaut, une formidable clameur lancée par 100 000 hommes monte des 7 kilomètres de tranchées françaises. Dans un même élan, ces milliers d'hommes s'élancent à la boussole en direction du nord-est à la vitesse de 100 mètres toutes les 4 minutes pour rester sous le couvert du redoutable barrage d'artillerie qui les protège. Le plan d'attaque est relativement simple. A la droite du dispositif, les hommes doivent s'avancer et conquérir le village de Douaumont, s'organiser dans le village, puis s'avancer ensuite vers le fort. A la gauche du dispositif, les soldats doivent conquérir la carrière d'Haudraumont, dont on sait qu'elle est fortement défendue, puis de s'y retrancher pour arrêter les contre-attaques qui y sont attendues. Après cette consolidation, les soldats doivent s'avancer en direction du fort de Vaux...

A 14h45, le village de Douaumont est repris aux Allemands. Dans les conditions de Verdun, c'est presque une victoire facile. Des tirailleurs s'installent et se mettent en position pour défendre cette conquête afin d'assurer une position de repli. La grande majorité des hommes poursuivent leur progression en direction du fort. A 15h00, presque d'un seul coup, le brouillard se déchire. Les soldats les plus en pointe se rendent vite compte que ceux prévus pour les soutenir à droite et à gauche ne sont pas là. Mais rester sur place est encore plus dangereux que d'avancer. Alors les hommes se précipitent dans les fossés du fort abandonné et commencent à escalader ses superstructures...

Un peu plus tard, toutes les autres compagnies, plus ou moins égarées dans le brouillard, commencent à arriver. Celles prévues pour investir le fort y pénètrent. Les autres le contournent et vont se positionner sur sa façade est, objectif final de la journée...

Plus au sud, les Français partis du village de Fleury, du fort Souville et de la chapelle Sainte-Fine progressent plus difficilement. Ils dépassent l'ouvrage de Thiaumont et le soir ils s'établissent au bois de la caillette, de l'étang de Vaux, au nord du bois Fumin, et au bois de Laufée. Toutefois, le fort de Vaux, autre objectif de la journée, n'est pas atteint. Il faut dire que la bataille a été rude dans le secteur sud. Certaines compagnies ont perdu près de 75% de leurs effectifs...

Malgré quelques échecs, c'est une journée glorieuse pour l'armée française et pour tous les combattants de Verdun. Au soir du 24 octobre, à part dans les Empires centraux, tous les journaux du monde qui sont sur les rotatives n'ont qu'un seul titre "Les Français ont repris le village et le fort de Douaumont"...

Au matin du 25, Mangin veut absolument prendre le fort de Vaux. Il fait monter des troupes fraîches qui étaient en réserve et fait relever celles décimées. Mais les Allemands se ressaisissent et aucune progression d'importance n'est possible dans la journée, tellement les combats sont durs. De plus, la pluie se remet à tomber. Alors, en désespoir de cause, Pétain, Nivelle et Mangin se remettent sur leurs cartes pour préparer une nouvelle offensive vers le fort à conquérir. Pendant ce temps, ordre est donné à toute l'artillerie française de s'acharner sur le fort et ses alentours. Pendant les 4 jours suivants, les canons ne cesseront de tonner...

Soldats allemands prisonniers à Douaumont

Hindenburg et Ludendorff, les nouveaux hommes forts de l'Allemagne

Affiche de Oncle Hansi pour le 2ème emprunt de la Défense Nationale

Par décalage pour son édition, c’est l’Écho de décembre 1916 qui relate les événements d'octobre et début novembre...

Cavaliers russes franchissant le Danube pour défendre Constantza

Girl-scouts britanniques préparant un jardin collectif à Londres

Patrouille germano-turco-bulgare à Constantza

Carte de la bataille de la Somme

Le Gallia torpillé par le U-35 où 1 740 soldats et marins périssent

En Italie, sur le front de l'Isonzo, route camouflée

Convoi britannique de munitions dans la Somme

Caserne française du Champs de Mars à Salonique

Blessé britannique dans la Somme

Le triumvirat grec : Koundouriotis, Venizélos et Danglis

Obusier français dans la Somme

Transport de munitions britanniques dans la Somme

Soldats russes au camp de Mailly dans l'Aube

Soldats allemands dans une tranchée à Verdun

Prisonniers roumains à Brasov en Hongrie

Octobre 1916 - Dans le Monde en Guerre

En France, le 24 octobre à 15h00, le fort de Douaumont est repris aux Allemands dans une attaque minutieusement préparée et tous les soldats Français manifestent une fierté amplement mérité. Non seulement les Allemands ne sont pas passés mais, en plus, ils sont vaincus à l'endroit même où ils voulaient conquérir la France. Cette victoire a un coût, il est énorme, mais l'esprit de résistance des soldats français de la Grande Guerre n'est pas surfait. A Verdun, comme ailleurs sur le sol national, "on ne passe pas"...

 

Dans le Monde Politique.

En France. Le 1er octobre, c'est la fin de l'heure d'été et c'est aussi le lancement du deuxième emprunt pour la Défense Nationale. Cet appel à l'argent du peuple permet au peintre Jean-Jacques Waltz, dit Oncle Hansi(1), de faire une affiche remarquée…

Devant les reculs de son armée et l'envahissement de son pays, Ferdinand Ier le roi de Roumanie, demande l'aide d'une mission militaire française. L'ambassadeur français en poste à Bucarest, Charles de Saint-Aulaire, précise qu'il faut un "grand chef" à la tête de cette mission. Alors, début septembre, la France détache 430 officiers et 1 500 sous-officiers avec à leur tête le général Henri-Mathias Berthelot(2), un Saint-Cyrien, ancien chef d'état-major de Joseph Joffre. On lui donne comme objectif la réorganisation complète de l'armée roumaine. Cette mission sera la plus importante de toutes celles envoyées par la France à l’étranger pendant la Grande Guerre. Après une longue traversée maritime qui les amène à Arkhangelsk dans la mer Blanche, puis une traversée ferroviaire qui les conduit jusqu'à Mohilev (Bielorussie), au quartier général de l'armée russe, le contingent français arrive enfin en Roumanie le 16 octobre...

Le 20, à Boulogne-sur-Mer, se tient une conférence franco-britannique. Trois sujets sont à l'ordre du jour : la guerre dans les Balkans, la situation politique de la Grèce et où positionner le contingent de soldats portugais en France. Y participent Aristide Briand, le président du Conseil Français et Herbert Henry Asquith le Premier ministre britannique. Ils sont bien sûr accompagnés d'une flopée de ministres et de conseillers…

Depuis le mois de mars 1916, le roi du Monténégro Nicolas Ier est mécontent que son gouvernement soit installé à Bordeaux après avoir été un moment établi à Lyon. En octobre, la capitale d'exil de ce petit pays très revendicatif change une nouvelle fois de place et s'installe définitivement à Neuilly-sur-Seine à l'ouest de Paris...

Soldats austro-hongrois dans les Dolomites

Quelle folie la guerre !

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Barbentane, le plus beau village de l'Univers

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Tous mes remerciements à toutes celles et ceux qui m’ont aidé dans ces tâches de reconstitution de notre patrimoine barbentanais : prêt de brochures, de photos, des Écho de Barbentane, aide, corrections, traducteurs et autres…

Guy

Intérieur du fort de Douaumont avec sa voûte percée

Hipólito Yrigoyen le nouveau président de la république en Argentine

Sous-officier français dans l'immense charnier qu'est devenu Verdun

(1) Le peintre Jean-Jacques Waltz, dit Oncle Hansi, est un artiste Alsacien farouchement anti-Allemand. En 1940 il viendra se réfugier à Barbentane et fera de très beaux tableaux du village.

(2) Le général Henri Mathias Berthelot va devenir un homme très célèbre en Roumanie. En 1923, pour ses services rendus à la Roumanie, il reçoit en cadeau du roi Ferdinand Ier une propriété confisquée à un aristocrate austro-hongrois située près du village de Fărcădin en Transylvanie. C'est un beau domaine de 70 hectares de terres agricoles, avec un manoir, un verger et aussi une forêt. Berthelot décide que les revenus annuels de cette propriété seront destinés à l'Académie militaire roumaine pour financer des bourses d'études attribuées aux jeunes militaires roumains qui viendront se perfectionner à l'Académie militaire de Nancy. Du coup, le conseil municipal du village décide de changer de nom et de se rebaptiser le village "General Berthelot". En 1965, les communistes changent une nouvelle fois le patronyme du village, mais en 2001, après un référendum local, il reprend son nom de "General Berthelot". D'autre part, de nombreux établissements scolaires ou voies publiques (rues, boulevards...) portent le nom de Berthelot en Roumanie. A l'occasion de la Fête nationale roumaine, chaque 1er décembre, le Consulat général de Roumanie à Strasbourg dépose une couronne de fleurs devant le buste du général situé rue de Boston, en face du parc de la Citadelle. Henri Berthelot était aussi membre de l'Académie roumaine.

(3) William Robertson est le seul militaire britannique qui commence sa carrière comme simple soldat et qui la termine au grade de Field-marshal, le plus haut grade de l'armée britannique. Ce grade n'est attribué qu'en cas de guerre, ce qui en fait une rareté.

(4) A la mort de François-Joseph le 22 novembre 1916, Ernest von Koerber voit sa peine capitale commuée en emprisonnement à perpétuité par le nouvel empereur Charles Ier. Comme tous les prisonniers politiques, il sera amnistié le 12 novembre 1918 et deviendra une grande figure du socialisme autrichien, mais aussi du socialisme international au sein de l'Internationale ouvrière socialiste (deuxième Internationale).

(5) Brand Whitlock, l'ambassadeur des États-Unis en Belgique, écrira dans ses mémoires que la déportation de tous ces hommes pour aller travailler au service des Allemands est l'équivalent de ce qu'ont subi les Noirs en Afrique lors de la traite des esclaves au cours des siècles passés. Les cruautés et brutalités y sont nombreuses, le plus souvent injustifiées.

(6) L'Albanais est une langue indo-européenne, au début du XXème siècle elle est encore parlée, mais de façon minoritaire, dans presque toutes les provinces de l'extrême sud en Italie.

(7) Si Kaddour Benghabrit est un musulman Franco-Algérien, d'un bilinguisme parfait, tout dévoué à la France. Fonctionnaire du quai d'Orsay, il est le fondateur de l’Institut Musulman de la Grande Mosquée de Paris.

L’Écho de Barbentane de décembre 1916

Bus londonien à impériale dans la Somme

Mise en place d'un canon français de 105 dans la boue de Verdun

Prisonniers germano-austro-hongrois à Saint-Michel-de-Frigolet

La bataille de Roumanie en octobre-novembre-décembre 1916

La flotte française à Salonique

La période de la boue en Russie

Brancardiers allemands évacuant un de leurs blessés

Viaduc du Transsibérien à Khabarovsk sur le fleuve Amour

Évacuation de blessés britanniques dans la Somme

Cavalerie roumaine

Soldats français très heureux d'avoir retrouvé intacte la borne

d'entrée du village de Feuillères dans la Somme

Tirailleurs indochinois à Salonique

Florina bombardée par les Bulgares

Le général Henri Berthelot en compagnie de la reine Marie de Roumanie

Canons pris aux Roumains par les Austro-Hongrois à Brasov en Transylvanie

Avion allemand Albatros D III

Soldats français à Verdun après la prise du fort de Douaumont