BARBENTANE

en Février 1918

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En Espagne. Le 6 février, le gouvernement adresse au gouvernement allemand une protestation officielle contre le torpillage du vapeur Giralda par l'U-152 au large de Porto le 25 janvier 1918...

Dans le Monde des Sciences, des Arts, des Lettres et du Sport. Le 6 février à Vienne (Autriche) c'est le décès de Gustav Klimt, à l'âge de 56 ans. Peintre, dessinateur, décorateur, céramiste et lithographe, son art est multiforme, parfois monumental, il est l'un des membres le plus actif de l'art nouveau. Très décrié, ses œuvres choquent la bienséance artistique de son époque. Elles sont maintenant admirées dans le monde entier. Le 6 encore, c'est la naissance à Weimar de Lothar-Günther Buchheim. C'est un romancier, peintre, photographe, éditeur et auteur d’ouvrages d’art allemand. Il est principalement connu pour son best-seller "Das Boot", dont la version cinématographique est aussi un succès. Il décède le 22 février 2007 à Starnberg (Bavière, Allemagne). Le 10, c'est le décès à Constantinople d'Abdülhamid II à l'âge de 75 ans. Ancien sultan de l'Empire ottoman, il remplace un de ses frères sur le trône de l'Empire le 31 août 1876. Il règne jusqu'au 27 avril 1909, date à laquelle il est destitué par les Jeunes-Turcs et remplacé par un autre de ses frères, Mehmed V, qui lui règnera jusqu'au 3 juillet 1918. Le 14 aux USA, George Gershwin qui n'a pas encore fêté ses 20 ans présente sa première mélodie : Swanee. Il reçoit un accueil poli dans les studios où il la présente. Elle finira par être éditée avec des paroles d'Irving Caesar puis chanté par le célèbre Al Jolson qu'en octobre 1919(1). Le 26, c'est la naissance de Piotr Macherov dans le voblast de Vitebsk (Biélorussie). Professeur de physique, il devient partisan en 1942, puis militant politique et finit sa carrière comme premier secrétaire du comité central du Parti Communiste de Biélorussie. De tendance autonomiste, il meurt dans un mystérieux accident de voiture près de Minsk le 4 octobre 1980, il avait 62 ans…

 

Sur les Fronts des Combats.

Conseil Supérieur de la Guerre. Le 3 février, ce Conseil se réunit à Versailles. De nombreux généraux français, dont Maxime Weygand, sont inquiets. Pour eux, un Conseil ce n'est pas un chef. Tous s'alarment de la massification des troupes allemandes près de zones du front, même s'il est difficile de localiser avec précision là où elles vont se lancer. Alors, ils demandent à Georges Clemenceau de faire le forcing auprès des Britanniques pour qu'enfin un chef suprême soit désigné et qu'on en finisse au plus tôt avec le flottement du commandement de la guerre sur le front français...

Le 22, Les deux commandants en chef des armées de l'Entente franco-britannique, Douglas Haig et Philippe Pétain, conviennent du principe d'un appui mutuel en cas d'attaque allemande majeure...

Sur le Front en France et en Belgique. Jamais depuis le début de la guerre le front en France et en Belgique libre n'a été aussi calme. Certes, les coups de mains sont nombreux, ici et là, mais rien de comparable aux 42 mois de guerre qui viennent de passer. Même l'artillerie se met en sourdine, on n'arrête pas vraiment de tirer, mais on le fait à l'économie car il ne faut plus gaspiller les obus. En fait, c'est le calme qui précède la tempête...

Il est à noter que les mois de décembre 1917 avec 3 900 tués, janvier 1918 avec 3 400 tués et février 1918 avec 4 100 tués, sont les mois où il ya le moins de tués français de toute la Grande Guerre. Même en novembre 1918, qui n'a pourtant que 10 jours effectifs de combat, il y aura 7 900 morts...

Du côté allemand, on se réorganise pour la future bataille de printemps. La presque totalité des soldats entre Lunéville et la mer du Nord, sont rééquipés en matériel de guerre récent, on change les uniformes, on réapprovisionne tous les caissons d'artilleries. Les soldats en manque d'instruction sont repris en main, les officiers eux aussi sont mis au "goût" du jour pour être formés aux nouvelles techniques de combat. Tous les soldats qui arrivent de Russie, après un repos récupérateur, sont formés aux durs combats de l'ouest où les gaz sont omni présents à chaque bataille, les tranchées profondes et protégées par de multiples barrages de barbelés. Un front où les attaques venues du ciel sont maintenant quotidiennes et où les barrages d'artilleries durent des jours entiers avec une violence inégalée. En cela, les armées allemandes qui vont lancer l'offensive de printemps, ne sont plus tout à fait les mêmes que celles qui ont bataillé sur le font de l'ouest pendant toute l'année 1917...

Chez les Alliés, ce n'est pas tout à fait la même chose. Tous les soldats savent ou devinent que l'offensive de printemps va être violente, mais où ? En effet, malgré de nombreux indices, en ce mois de février 1918 les états-majors sont plus inquiets de savoir où va avoir lieu la grande bataille que d'en connaître son ampleur. Car, de ce côté-là, avec les renforts venus de l'est, près d'un million cinq cent mille hommes, il n'y aucun doute ça va être violent et terrible. Pour le général Ferdinand Foch il faut mettre le maximum de monde à l'abri des premières attaques, et les faire converger ensuite vers la grande percée que les Allemands ne vont pas manquer de créer. Pour le général Philippe Pétain, il faut au contraire renforcer toutes les parties du front avec le maximum de monde pour que, justement, il n'y ait pas de percée. En fait, pour lui, il faut faire des Verdun partout. Mais les grands stratèges qui entourent Foch sont très sceptiques sur cette tactique. Le front est long, les points faibles sont nombreux, les troupes disparates, pas toujours bien équipées, ni même avec assez de moral pour supporter les bombardements préliminaires qui vont être terrible. Certains généraux français, s'ils restent confiants dans le moral des Poilus après les victoires de l'automne, s'inquiètent du moral chez les Britanniques qui viennent de subir de nombreux revers. Alors, petit à petit, convaincus que la stratégie de Foch est la meilleure possible pour le printemps à venir, ils vont se détourner des idées stratégiques de Pétain. Même Georges Clemenceau en est convaincu et il fait tout ce qu'il faut auprès des Britanniques pour que la tactique employée jusqu'ici par le général Douglas Haig soit abandonnée. Là au moins il à l'oreille très complaisante du Premier ministre britannique David Lloyd George qui ne supporte plus l'arrogance du général en chef de BEF, et encore moins ses victoires qui sont autant de défaites coûteuses en hommes...

Le 13, dans une attaque combinée, les Français prennent la tranchée Galoche située au nord de la butte du Mesnil, toutes les contre-attaques allemandes pour reprendre cette conquête échouent. En Lorraine, dans plusieurs de ces coups de mains, des soldats US se joignent aux Français. Le 20, le colonel Douglas MacArthur de la 42 division US, dite Rainbow (Arc-en-ciel) avec des soldats français, mène lui même un raid à Moncel-sur-Seille à l'est de Nancy. Ils pénètrent de plus d'un kilomètre dans les tranchées allemandes du bois des Ervantes d'où ils ramènent 357 prisonniers...

Dans la Guerre Aérienne. L'aviation française de chasse est profondément remaniée pour pouvoir, lorsque le moment sera venu, converger avec puissance sur les armées allemandes. Le colonel Charles Duval, grand responsable de l'aviation de guerre opérationnelle française, met en place deux groupements d'avions de combat directement placés sous l'autorité du Grand Quartier Général. Ces groupements reprennent la quasi-totalité des avions de chasse, soit près de 600 appareils avec une cinquantaine de bombardiers de jour. Dans le même temps, deux escadres de bombardement de nuit sont constituées avec une centaine d’appareils chacune. En attendant, les chasseurs sont utilement employés pour protéger les missions des bombardiers ou des avions de reconnaissance. En ces grands moments d'incertitudes, les vols de reconnaissances sont d'une importance primordiale. Malgré leurs dangerosités, ils sont nombreux, chaque fois que le ciel le permet tout ce qui peut voler prend l'air pour ramener les meilleures photos possibles...

Depuis fin 1917, l'aviateur prisonnier Roland Garros qui n'arrête pas d'être transféré de camp en camp pour justement ne pas pouvoir s'évader, arrive au camp de Magdeburg, une ville pas si loin que ça de la Hollande. Là, il fait la connaissance d'un autre aviateur français tout autant légendaire que lui, le lieutenant Anselme Marchal. Marchal, qui est né en Suisse alémanique, parle un très bon allemand. Avec l'aide de compagnons, les deux hommes se confectionnent alors des uniformes d'officier allemand. Puis, le 14, vêtus de la sorte, sous le couvert de la pénombre et du ton irascible de Marchal, ils passent les quatre sentinelles. Enfin sortis du camp, ils prennent des habits civils et commence pour eux un long périple à travers l'Allemagne avant d'arriver en Hollande, puis en Angleterre et enfin en France où ils sont accueillis en héros(2)...

En février les Allemands mettent en service deux nouveaux avions. L'Albatros Dr-II, est un prototype de chasse triplan monoplace, un seul exemplaire vole au printemps de 1918. Il est grandement semblable à l'D-X biplan, et emploie d'ailleurs le même moteur Benz de 195ch, le Bz-II. Il ne sera jamais construit en série. La firme de Berlin sort aussi l'Albatros C-XII. C'est un avion biplan biplace de reconnaissance directement opérationnel, il ne fera pas date dans l'histoire aéronautique mais il restera en service jusqu'à l’Armistice. Le pilote canadien Albert Desbrisay Carter, après sa 15ème victoire, reçoit sa première citation pour "son courage, sa bravoure et son attachement au devoir".

Le 4 février, les hydravions de la marine britannique bombardent l'aérodrome de Varssenaere, en Belgique. Un projectile allume un incendie. Le 7, une escadrille bombarde Sarrebruck, 610 kilos de bombes tombent sur cet important centre ferroviaire. Le 16, lors d'un raid de Gothas sur Londres, une bombe tombe sur le Royal Chelsea Hospital, elle tue 5 personnes dont 4 d'une même famille. Le 19, les Français bombardent une nouvelle fois Mannheim. Le 23, l'as belge Edmond Thieffry aux 10 victoires homologuées est abattu et tombe derrière les lignes ennemies. Malgré ses 6 tentatives d'évasion, il finira la guerre comme prisonnier. Le 21, l'aviation austro-hongroise bombarde Venise et sa région. Le lendemain, une escadrille italienne bombarde Innsbruck à titre de représailles...

Dans la Guerre Maritime. En février, 143 navires alliés sont coulés par les U-Boote, 23 autres sont avariés. C'est le début de la faillite sous-marine, même en septembre 1916, les submersibles allemands avaient fait mieux avec 201 navires touchés. Dans le détail, sur les 166 navires touchés 103 sont britanniques, 14 italiens, 11 français, 10 norvégiens, 9 grecs, 5 espagnols, 3 néerlandais, 3 suédois, 3 étasuniens, 2 portugais et 2 danois. Encore plus que le nombre de navires, le tonnage détruit est lui aussi en forte baisse et il ne cessera de régresser jusqu'à la fin des hostilités...

Dans la nuit du 31 janvier au 1er février, l'ex-yacht britannique Vola, reconverti en patrouilleur auxiliaire français Merle rentre en collision avec le torpilleur français 152 au large de Cherbourg, il coule en moins de 10 minutes et 11 marins périssent. Le même jour à 12h50, l'ex-paquebot allemand Prins Willem V saisi et rebaptisé par les Français La Dives, part de Marseille pour rejoindre Bougie en Algérie. Il est torpillé près des côtes algériennes par l'UB-52 et il coule en 7 minutes, sur 401 personnes à bord, 125 périssent dont son commandant, les rescapés sont secourus par le chalutier Vega. Le 1er encore, le sous-marin britannique E-50 disparaît probablement victime d'une mine près des côtes danoises, ses 31 membres d'équipage sont tous portés disparus(3). Le 2, le cargo britannique Avanti est torpillé dans la Manche par l'UB-59, 22 marins sont portés disparus. Le 3 à 0h30, le cargo charbonnier français Lutèce est torpillé à l'extrême ouest de la Manche par l'U-46, il coule sans faire de victime, les 30 hommes d'équipage sont secourus par le vapeur russe Agnes et le vapeur français Ustarizt. Le 4, le cargo britannique Treveal est coulé à la torpille par l'U-53 entre l'Irlande et le Pays de Galles, 33 marins sont tués. Le 5, le vapeur US Almanace est torpillé près des côtes d'Irlande par l'UB-57, six marins sont tués. Le 5, le transport de troupe britannique Tuscania qui transporte 2 179 soldats US est torpillé à 0h05 par l'UB-77 au nord de l'Irlande. Il reste à flot près de 5 heures avant de couler ce qui permet de sauver 1 923 des hommes embarqués, mais 166 soldats et marins périssent. Le 6, le cargo français Ville de Verdun qui effectue son premier voyage, longe les côtes espagnoles en provenance de Dakar pour rejoindre Marseille. A 1h30, il est torpillé par l'U-34 qui se dissimulait au sein d'une flottille de pêche près d'Alicante, 10 marins sont tués(4). Le 7, le quatre-mâts goélette armé Monténégro part d'Alger pour rejoindre Marseille. Il est attaqué au canon vers 6h30 par l'U-64, dans la bataille 5 obus touchent le voilier, deux mats sont cassés, un marin est tué et plusieurs autres blessés. Malgré ces avaries, le commandant décide de poursuivre sa route. Mais le 15 une tempête se lève et le navire commence à couler. Finalement les marins abandonnent le navire et rejoignent le patrouilleur français Pétunia (ex-japonais) pour rejoindre Marseille. Le 8, par mauvais temps, le destroyer britannique Boxer rentre en collision dans la Manche avec le cargo britannique Saint-Patrick, il coule avec un de ses marins. Le 8 encore, l'UB-38 est victime d'une mine à l'entrée est de la Manche, ses 27 membres d'équipage sont tous portés disparus. Le 11, le patrouilleur Sardine (ex-baleinier norvégien) chavire dans l'estuaire de la Gironde, 14 marins sont portés disparus. Le 11, le sous-marin garde-côte français Diane est victime d'une explosion près des Açores dans l'océan Atlantique lors du convoyage du 4 mâts barque Quevilly, ses 44 hommes d'équipage sont tous portés disparus. Le 12, l'U-89 est éperonné par le croiseur britannique Roxburgh au nord-est de l'Irlande, ses 43 servants sont tous portés disparus. Dans la nuit du 14 au 15 février, 3 destroyers allemands viennent détruire 8 des chalutiers armés qui surveillent les nouveaux champs de mines que les Britanniques viennent de poser en complément des filets anti-sous-marins dans l'est de la Manche. Le 17, des contre-torpilleurs allemands exécutent un nouveau raid dans la Manche, là encore ils coulent plusieurs chalutiers armés qui protègent le champ de mines...

Entre le 13 et 15, le sous-marin français Bernoulli disparaît, probablement victime d'une mine au large des Bouches-du-Cattaro dans la mer Adriatique, ses 29 servants sont tous portés disparus. Le 18 vers 23h30, le vapeur français Basque est attaqué à la torpille par l'UB-52 près de Malte, 10 marins sont tués, 3 autres sont blessés. Gravement atteint mais restant à flot, son équipage évacue le navire pour se réfugier sur les chalutiers britanniques James Connor et Alexander Hills. Vers 2h15 un incendie se déclare à bord près du château, toutefois comme le navire est toujours à flot, les survivants décident de remonter à bord. Ils parviennent à éteindre l'incendie et à passer une remorque avec les chalutiers pour finalement s'échouer sur les côtes de l'île. Le 1er mars le navire est déséchoué, puis conduit au port de La Valette où il est réparé provisoirement. Pour ces actes de courage, son commandant Charles Collignon, et son second Achille Vidal, sont cités à l’ordre de l’Armée et fait chevaliers de la Légion d’Honneur le 16 avril 1918, un témoignage officiel de satisfaction est adressé au navire pour "l'attitude disciplinaire et dévoué de son équipage lors du torpillage"...

Le 24, le navire pirate allemand Wolf qui depuis le 30 novembre 1916 écume les mers du monde, parvient à percer le blocus britannique et à gagner Kiel. Il ramène 467 prisonniers et un chargement de cuivre, de caoutchouc, de zinc, d'étain, de soie, de coprah, etc... en tant que butin de guerre. Le Wolf a effectué le voyage le plus long pour un navire en temps de guerre. Son commandant, le capitaine Karl August Nerger, reçoit la plus haute décoration allemande "Pour le Mérite" pour cet exploit...

Le 25, le trois mats danois Appolo est coulé au canon entre l'Irlande et l'Écosse, 7 marins sont portés disparus. Le 26, le navire hôpital britannique Glenart Castle quitte Newport au sud du Pays de Galles pour se diriger vers Brest. Comme toujours pour les navires hôpitaux, il est paré de toute une signalétique pour bien le différencier des navires ordinaires : totalement ceint de lumière verte avec des feux rouges, symbole de la Croix-Rouge, à l'avant, à l'arrière et en haut du mat. A 4h00, il est atteint d'une torpille lancé par l'UC-56 qui détruit la plupart des canots de sauvetage. Dans les 8 minutes qui suivent avant son naufrage, à peine 7 embarcations peuvent être mises à flot et elles sont servies par des hommes inexpérimentés. L'explosion et le naufrage tuent 162 personnes, dont presque toutes les infirmières, les médecins et les patients embarqués. Seuls, 32 survivants pourront être secourus. Pour tenter d'effacer les traces de cet acte contraire aux lois de la guerre, le capitaine du sous-marin, Wilhelm Kiesewetter, fait tirer au fusil sur des naufragés qui tentent de survivre(5)...

Sur le Front Italien. Comme en janvier, c'est dans les Alpes enneigées que le front est le plus actif. Ni les Italiens, ni les forces austro-hongroises ne remportent de succès majeurs. Trévise, Padoue et Mestre, ainsi que Venise sont régulièrement visés par des avions qui font des victimes civiles...

Le 10 février, le poète Gabriele D'Annunzio, fervent partisan de la guerre, participe à un raid contre le port militaire austro-hongrois de Bakar (Buccari en italien). A bord d'une vedette lance-torpille ultra rapide, le commando pénètre de nuit dans la rade et lance ses torpilles à l'aveugle. Mal réglées elles percutent les quais sans causer beaucoup de dégâts. Mais le génie propagandiste de D'Annunzio saura exploiter médiatiquement cette incursion audacieuse, qu'il baptisera "La beffa di Buccari" (Le camouflet de Bakar). Le 11, à Redevoli (embouchure de la Piave), des hydravions italiens bombardent les baraquements autrichiens. Le 22, en réplique aux bombardements des villes italiennes, les aviateurs transalpins mène un raid meurtrier sur Innsbruck...

Sur le Front du Caucase. Si la Russie ne mène plus officiellement la guerre contre les Turcs depuis octobre 1917, le front du Caucase lui est toujours actif. Les Turcs sont maintenant opposés aux troupes géorgiennes, azerbaïdjanaises, arméniennes, volontaires russes ainsi que d'autres soldats d'Asie centrale. En fait, tous ces soldats sont des vétérans de l'armée du tsar qui ont repris leurs identités "naturelles" et qui s'opposent d'autant plus aux soldats turcs que ces derniers sont des ennemis millénaires. Au début février, les troupes de l'ancien général russe mais aussi arménien Tovmas Nazarbekian, occupent les avant-postes majeurs entre Erevan, Van et à Erzincan dans le sud du front à la frontière perse. Dans son offensive de février, les troupes du général turc, Vehib Pacha, sans réelle opposition ne cessent de progresser dans le centre de l'Anatolie et sur les rives de la mer Noire. Le 4 février, elles réoccupent Sarikamish et Ardahan, ainsi que Van et progressent vers Bakoum. Le 5, elles sont  sur une ligne qui va de Tirebolu à Bitlis. Le 7, elles prennent Erzincan, le 13 Bayburt, le 19 Tercan et le 25 Trabzon, le grand port de la mer noire malgré de maigres renforts arméniens qui arrivent par la mer. Après l'occupation de la ville, les autorités turques reçoivent une délégation transcaucasienne présidée par le Géorgien Akaki Tchenkéli. Les Transcaucasiens refusent de reconnaître le traité de Brest-Litovsk et se déclarent prêts à poursuivre la guerre...

Sur le Front des Balkans. Comme en France, c'est une guerre de coups des mains. Monastir est encore pilonnée par les Bulgares et les aviateurs britanniques bombardent les camps ennemis...

Au Moyen-Orient.

En Palestine. La remontée des Britanniques vers le nord du pays est relativement lente, plus à cause des problèmes de ravitaillement que par les défenseurs turcs. C'est une campagne où il faut tout amener aux premières lignes, y compris de l'eau et en grand quantité car les troupes hippomobiles sont nombreuses. Le général Edmund Allenby à une grande crainte, être attaqué sur son flanc droit par les troupes turques qui sont stationnées au-delà du Jourdain. Alors, depuis la prise de Jérusalem la plupart des troupes combattantes s'activent pour éliminer toute présence ennemie sur la rive occidentale de la mer Morte avec comme objectif la ville de Jéricho. C'est une drôle de bataille, où des poignées d'hommes, guère plus de 10 000 combattants de chaque côté, se battent dans le lieu le plus bas de la surface du globe, à moins de 420m au-dessous du niveau de la mer. En cette saison, où quelques pluies arrosent un paysage quasi désertique, la terre caillouteuse se couvre en quelques heures de fleurs sauvages, des cyclamens, des anémones, des coquelicots et des tulipes. Avantagés par une aviation de reconnaissance très efficace, les Britanniques savent où trouver leurs ennemis, mais surtout combien ils sont à une centaine près en comptant tout simplement le nombre de latrines. Le 10 février les troupes germano-turques attaquent sans résultat les Britanniques dans la région d'El-Ghorianiya et sur la route Jéricho à Sechem. Parti de Jérusalem le 14, l'infanterie britannique progresse en utilisant la route qui mène à Jéricho et occupe rapidement la ville de Mukhmas alors que les cavaliers australiens nettoient les derniers kilomètres de la rive occidentale de la mer Morte. Aidés par quelques canons lourds, ils prennent la ville de Talat ed Dumm le 18 en moins d'une heure. Alors Allenby ordonne aux cavaliers australiens de contourner Jéricho par l'est et de se rabattre sur la ville par le nord en passant sous le Mont de la Tentation. Après avoir occupé tous les passages possible du Jourdain, les cavaliers du pacifique remplissent plus que correctement leur mission et Jéricho est rapidement encerclé. Le 20, par le dernier passage encore possible vers l'est, les soldats turcs de Jéricho voués à une captivité certaine, s'échappent rapidement de la ville. Le 21, les troupes britanniques entrent dans Jéricho au petit matin sans même avoir bombardé une des plus vieilles cités du monde qui prospère en ce lieu depuis au moins 11 000 ans. A Partir de là, la ville d'Amman, maintenant la capitale de la Jordanie, par où passe le chemin de fer du Hedjaz est sous la menace directe des canons Britanniques. Les possessions turques du désert, isolées, sans aucun ravitaillement terrestre possible, sont maintenant condamnées...

En Mésopotamie. Après les pluies de janvier qui ont paralysé dans la boue sablonneuse le corps expéditionnaire britannique, le beau temps est revenu et les troupes indiennes reprennent leur marche vers Mossoul. Le 20 février, elles occupent Khan-Abi-Rayat, Mossoul n'est plus très loin...

 

Il est temps maintenant de revenir à Barbentane. C'est l'Écho de janvier et février qui donne des nouvelles du village. Toutefois dans cet Écho groupé, malgré le délai de parution, il y a des informations jusqu'au 10 février, à croire qu'il n'a été distribué qu'en mars...

C'est la photographie des 6 prieures de la Congrégation du Saint-Sacrement pour l'exercice 1916-1917 qui fait la couverture du bulletin. Elles sont toutes nommément citées à la page 2. En tant qu'anciennes prieures de la Vierge, elles sont maintenant chargées de la décoration du Maître-Autel. Cinq d'entre-elles sont encore habillées en provençale, la dernière est en tenue du "dimanche". L'Écho entre dans sa quatorzième année de parution et il coûte 1fr50 à l'année aux abonnés "fidèles" et seulement 1fr20 aux Barbentanais. Il est toujours donné gratuitement aux soldats, charge à leur famille de leur faire parvenir...

Le curé Aimé Guigues a été obligé de se faire opérer une nouvelle fois de la prostate. Après une convalescence dans une famille à Marseille, il est revenu au village le 15 janvier. Pendant son absence, le père Hilaire a assuré l'intérim pour la fête de l'Immaculée Conception et le vicaire Courbier a assuré les fêtes de Noël. A 74 ans, l'abbé Jean-Baptiste Lunain décède le 19 décembre. Originaire de Barbentane, il avait cessé son apostolat depuis juillet 1914 pour des raisons de santé, mais il dépannait parfois la paroisse en l'absence du curé...

Le livre d'or s'étoffe de 3 nouvelles citations. Jean-Marie Sérignan reçoit la médaille militaire et la Croix de guerre avec palme pour fait de bravoure le 20 mai 1917, jour où il a été gravement blessé. Louis Laget est cité à l'ordre de son régiment pour fait de grand courage le 15 novembre 1917. Henri Combet est cité à l'ordre de sa brigade pour fait de courage le 22 novembre 1917. Hélas, le martyrologe ne cesse de progresser lui aussi avec 5 nouveaux tués pour la France. Claude Bertaud est tué le 18 octobre à la bataille d'Aizy dans l'Aisne ; Eugène-Marius Raousset décède à Barbentane le 15 novembre des suites d'une maladie contractée après 40 jours de tranchées à Verdun, un service funèbre en sa mémoire est célébré en l'église de Barbentane le 27 novembre ; Louis Courdon est tué le 18 novembre près de Sillery dans la Marne et Jean-Marie Ollier décède le 25 novembre à Jonchery dans la Marne à la suite d'un accident routier. Un service funèbre en sa mémoire est célébré en l'église de Barbentane le 17 décembre...

Il n'y a pas de tué Barbentanais en février 1918.

La mutuelle de Saint-Joseph perd son président, Jean Bruyère. Il décède le 13 décembre à l'âge de 76 ans et il est enterré le lendemain. C'était une figure locale, mais après la disparition de son fils mort pour la France en novembre 1915, puis de son épouse peu après, sa santé et son moral s'étaient dégradés. D'autres personnes sont rajoutées comme souscripteurs à l'Union des Femmes de France. Comme toujours quand une liste de noms est publiée dans l'Écho, est associé soit le métier, soit la résidence de la personne citée. C'est aussi un avis pour la date de la communion solennelle qui sera célébrée le 5 mai et celle de la confirmation qui aura lieu le 8 mai...

Dans le courrier militaire, Claudius Raoulx est en première ligne dans le secteur le plus dangereux, mais il croit en la victoire du droit ; nouveau dans l'armée d'Orient, Jean Bruyère est évacué à cause de son ancienne blessure au genou ; Paul Crouzet est très bien soigné dans un hôpital de sœurs à Nice ; Henri Sérignan est à Paris, même si la ville "est bien belle" écrit-il, il préfère encore le beau soleil de Provence ; le caporal Louis Petit envoie un bonjour de Lorraine ; Jean-Marie Auzépy est sur le grand plateau d'Amance [près de Nancy] ; Louis Laget est bombardé par les boches depuis quelques jours et il a été décoré de la Croix de guerre ; Louis Ayme a quitté les hautes cimes [près de Monastir ?] pour venir passer l'hiver dans la plaine plus abritée ; Léopold Michel, qui a eu sa permission supprimée, est très affecté par la mort de son très cher camarade Louis Courdon ; Jean-Marie Pitras est en Alsace et si le front est calme, l'hiver commence à se faire sentir ; François Veray est toujours en correspondance avec l'abbé Bard ; Jean Vernet a rencontré Louis Ayme et ils ont causé de leur cher Barbentane ; Gaston Nazon pense que le repos hivernal va être court ; Etienne Maurin a trouvé "joli" le rapport de M. Cabassol sur la renaissance provençale ; Raoul Saint-Michel a quitté la direction pour être "redescendu" à l'escadrille où il se sent bien ; l'adjudant Jean Brémond pense que pour jouir d'une paix durable il faut la victoire ; Louis Fontaine est en Italie, de partout où ils sont passés, ils ont été bien accueillis avec des cris de "Vive la France" ; Paul Bonnet se considère comme un miraculé car son appareil [avion ? ballon ?] a pris feu juste au moment de partir ; Achille Deurrieu [au Maroc] considère qu'il aura un grand plaisir à revoir la Provence ; Jean-Marie Joubert se guérit d'une blessure au bras droit ; durement bombardé Fernand Barral se croit à Verdun ; Henri Combet, dans une première ligne malmenée par les boches, joint sa dernière citation à son courrier ; Jean Fontaine est dans un trou d'obus en guise de tranchée ; l'abbé Mascle croit que 1918 sera l'année de la paix victorieuse à laquelle tous aspirent ardemment ; Lucien Chancel se plaint de la pluie après avoir subi une vague de froid ; Etienne Bernard, en repos dans les Vosges, constate que l'année 1918 se commence en guerre mais il espère qu'elle se finira en paix et en gloire pour notre chère patrie ; le caporal Jean Fontaine constate que la guerre ne paraît pas devoir finir encore ce qui le fait passer par toutes les alternatives d'espérance et d'inquiétude et c'est le commandant Jean-Marie Barthélémy qui termine son petit mot par "Qui connaîtra jamais les souffrances de nos populations envahies, témoins impuissants depuis de long mois, de cette haine contre tout ce qui vit"...

Dans l'état religieux : 5 naissances, 2 mariages, mais aussi 8 enterrements dont celui de Joseph Michel, mobilisé, décédé le 26 janvier d'une méningite tuberculeuse à l'hôpital de Saint-Didier dans le Vaucluse...

Cet Écho se termine par un article sur le respect, puis "Faites vos Pâques" et "Les Béatitudes", un court poème de Jules Imbert...

Guy

Mortier britannique dans la Somme

Soldats français sur le Piave dans l'Italie du nord (photo recolorisée)

Camp de regroupement pour des Chinois volontaires pour venir travailler en Europe

Officiers français devant un char Schneider

C'est l'Écho de mars et avril qui relate les évènements de janvier et février 1918...

Tranchée dans la Marne

Troupe austro-hongroise qui occupe une partie de la Roumanie

Britanniques aidant un curé d'Armentières (Nord) pour mettre à l'abri des œuvres d'art

Cimetière austro-hongrois en Italie du nord

Visite de Clemenceau au front d'Alsace

Soldats de la 42ème division US en route pour le front de Champagne

Visite du roi Grec à une escadrille française dans les Balkans

1916 - Cuisine roulante en Champagne

Équipe d'encadrement du camp de formation pour les soldats indochinois à Angoulême

Dans le Monde en Guerre en février 1918

La Paix à l'Est en février 1918. Les négociations de Brest-Litovsk sont pour les dirigeants bolcheviques une rude prise de contact avec les rapports de force internationaux. Elles vont marquer durablement l’avenir et l’orientation de la politique soviétique, tant sur le plan intérieur que sur le plan extérieur. Devant l'intransigeance allemande, comme le réclame Léon Trotsky, la délégation bolchevique se retire des négociations...

A l'inverse, le 9 février, c'est la signature officielle d'un traité de paix entre les Empires centraux et l'Ukraine du gouvernement de Mykhaïlo Hrouchevsky. Cette paix est accompagnée d'un accord sur l'autonomie de la Galicie orientale avec l'Autriche-Hongrie. Ce qui déplaît profondément à la Pologne, car elle est de ce fait amputée d'un partie non négligeable de son territoire de langue polonaise...

Malgré l'absence d'accord officiel, Trotsky proclame le 10, un cessez-le-feu unilatéral en scandant "Ni paix, ni guerre". Il annonce la démobilisation officielle de l'armée russe et la recherche d'une paix honorable avec les puissances centrales. Le 13, les dirigeants germano-austro-hongrois prennent les déclarations de Trotsky comme un camouflet et décident la reprise des hostilités en lançant un ultimatum pour le 17. La Russie soviétique est sommée d'évacuer l'Ukraine, la Finlande, la Lettonie et l'Estonie. Dès le 18, les puissances centrales lancent une offensive avec près de 800 000 soldats. Dénommée Faustschlag (coup de poing) elle se déroule sur trois axes. Au nord vers Pskov et Narva, au centre vers Minsk, au sud vers Kiev. C'est pour l'essentiel une promenade militaire réalisée en train, "la guerre la plus comique que j'ai jamais vécue", dira le général allemand Max Hoffmann. En effet, les feldgraus montent dans un train, filent à la gare d'après, mettent cette dernière en état de siège et laissent passer le train suivant qui en fait de même à la gare d'après et ainsi de suite. A ce rythme, les 500 kilomètres sont franchis en quelques jours sans rencontrer de réelle résistance. La seule contre-attaque notable est menée le 23 février par Evgueni Iskritski, un ancien général de l'armée impériale rallié à la cause bolchevique. Cette bataille, considérée comme la première opération de l'Armée rouge, sera à l'origine de la fête soviétique du Jour du défenseur. Malgré les divergences politiques, les Alliés proposent leur aide. Mais inquiets devant l'avance des unités des puissances centrales et sous la pression de Lénine, les responsables bolcheviks désavouent Trotsky. Devant la réalité du rapport de force, ils se bornent à accepter, sans les discuter, les clauses durcies que leur imposent les négociateurs dont les troupes sont à 150 km de Petrograd. Le 28, Trotsky retourne à Brest-Litovsk avec le mandat de signer le traité de paix...

Canon de 75 monté sur un châssis de camion

Dernier adieu à un marin sur un navire de guerre australien (photo recolorisée)

Soldats indiens au ravitaillement en eau en Mésopotamie

Troupe US à l'entraînement en France

Canon de 75mm monté sur un châssis de camion (photo recolorisée)

Préparation d'une séance de cinéma pour des Français à Gouéra au Moyen-Orient

Poste d'observation austro-hongrois en Italie du nord

Soldats amérindiens incorporés dans les troupes canadiennes

Australiens à la pause repas dans un endroit abrité

La Paix à l'Ouest en février 1918. Les rencontres très épisodiques entre le commandant français Abel Armand, membre du 2ème bureau, et l'Austro-Hongrois Nikolaus Revertera, un proche du Chancelier Ottokar Czernin, se poursuivent. A partir du 1er février, et par deux fois dans le mois, le Français s'entretient avec l'Austro-Hongrois à Fribourg, en Suisse, chez le mystérieux docteur Raimon. Armand a pour mission de ne rien dire, seulement d'écouter son interlocuteur, qui ne lui raconte rien d'autre que ce que tout le monde sait par les journaux. Sur l'essentiel, ces discussions achoppent toujours sur la question des provinces d'Alsace et de Lorraine que l'Austro-Hongrois refuse de reconnaître comme françaises. Le 28 février, le commandant Armand adresse au docteur Raimon une lettre qui clôt ces entrevues…

La Croix-Rouge condamne la Guerre Chimique. Devant la progression féroce de la guerre, le CICR (Comité International de la Croix Rouge) qui siège à Genève craint un emploi généralisé des armes chimiques entre les belligérants et contre les populations civiles. Pour s'opposer à cette escalade tragique des moyens de combat, il ne peut que s'appuyer sur les Règlements annexés aux Conventions de La Haye de 1899 et de 1907 qui interdisent l'usage de projectiles répandant des gaz asphyxiants. Le 6 février, il lance un appel mondial et solennel contre l'emploi des gaz vénéneux pour convaincre les belligérants d'y renoncer par un accord tacite conclu sous son égide. En décidant de s'opposer activement aux armes toxiques, le CICR s'engage dans une voie nouvelle qui dépasse l'assistance aux victimes pour lequel jusqu'à maintenant il s'était cantonné. Par cela, il fait un immense bond diplomatique et surtout politique en interne afin de commencer à s'intéresser aux méthodes, mais aussi aux techniques de combat. Dans ce domaine, il traite d'un sujet très controversé, qui fait l'objet d'accusations réciproques de la part des États en guerre. Dès le 8, il envoie le texte de son appel aux souverains et chefs d'État de tous les pays européens, en guerre ou pas. Il le transmet aussi aux Sociétés nationales, à diverses personnalités religieuses et à la presse. Des réponses encourageantes parviennent à Genève, notamment de la part des Croix-Rouge danoise, norvégienne et suédoise qui font part de leur approbation. Le Vatican, également, soutient l'initiative du CICR…

Foyer Juif en Palestine. Le 14 février, le gouvernement français envoie une lettre officielle à Nahum Sokolow, le leader de l'Organisation sioniste mondiale, dans laquelle il affirme que "l'entente est complète entre les gouvernements français et britannique en ce qui concerne la question d'un établissement juif en Palestine". Le 9 mai, c'est au tour du gouvernement italien d'envoyer une lettre à Sokolow, qui parle de la formation "d'un centre national israélite" et mentionne le respect des "droits politiques" des communautés non juives. Le président Wilson ne prend pas position officiellement...

 

Dans le Monde Politique.

En France. Pendant ce mois d'hiver, la température est relativement clémente, et les pluies peu abondantes. Dans la nuit du 2 au 3 février, une série d’explosions d’origine accidentelle se produisent à l’atelier de chargement d’obus d’Yzeure dans l'Allier. L’accident occasionne des dégâts matériels importants, et entraîne la mort de trente-deux personnes. Le 4, l'armée crée des "Groupements de chasse" pour donner plus de puissance offensive à son aviation de guerre. Cette réorganisation sera poursuivie par l'adoption de "Groupements de bombardement". Les communications dans l'armée sont aussi réformées par une Instruction générale qui précise les règles d'emploi et les normes de sécurité de la télégraphie pour usage militaire. Le 5, la Chambre adopte à l'unanimité l'ensemble du projet sur les pensions alimentaires qui devront être versées aux veuves et aux orphelins. Le 6 février, l'aventurier Paul Marie Bolo, dit Bolo Pacha, est déféré devant le Conseil de guerre de Paris. Le procès est instruit par le capitaine et magistrat Pierre Bouchardon, qui s'occupa de l'affaire Mata Hari, l'avocat général est toujours le lieutenant André Mornet de sinistre mémoire. Durant le procès, Bolo nie les faits. Malgré les efforts de son avocat, Albert Salle, peu de ses anciens amis témoignent. On note la présence à la barre de Pierre Ajam, député de la Sarthe, qui le soutient ainsi que son frère, monseigneur Henry Bolo, évêque mondain parisien. Le 7, à la suite du raid meurtrier effectué par 28 bombardiers allemands à la fin janvier, des compagnies d'assurance lancent un contrat anti-Gotha. Pour une prime de 20frs par an, l'assurance promet de remettre 10 000frs à la famille en cas décès par raid aérien. Le 10, le parlement adopte la loi qui permet au gouvernement de légiférer par ordonnance en matière économique. Pour Clemenceau, cette loi est le seul moyen de donner la priorité au réarmement. Il démontre à la Cambre que les Allemands sont supérieurs en nombre et en matériel. Afin de pallier ce déficit, Clemenceau va pouvoir réglementer ou suspendre par décret "la circulation, la production et la vente" des produits qui servent à la consommation des hommes ou des animaux. Autrement dit, priorité au réarmement, et cette décision va rapidement porter ses fruits puisque canons, chars et avions seront alors produits en plus grande quantité. Il décide aussi pour remonter le moral des Poilus, de faire de multiples visites au front, même d'aller marcher au plus près des lignes allemandes, sans casque et parfois dans la boue, ce que les généraux ne font pas. D'ailleurs, Le Président Raymond Poincaré s'en inquiète. Il considère que la place d'un chef du gouvernement n'est pas d'aller serrer les mains aux soldats des premières lignes, pour lui, il a des responsabilités plus urgentes. Mais les Poilus vont l'adorer. Alors, dès le soir du 10 et le 11 février, le président du Conseil Georges Clemenceau effectue une visite dans les territoires de l’Est de la France en compagnie des généraux Antoine Baucheron de Boissoudy et Henri Mordacq. Il se rend dans les villes de Croix, Masevaux, Thann et Dannemarie où une foule chaleureuse l’accueille...

Le 14, le maréchal Joseph Joffre est élu à l'Académie française en remplacement du romancier Jules Claretie (1840-1913). Le 14 encore, Bolo Pacha est condamné à mort, le Président Raymond Poincaré refuse de signer sa grâce. Le 18, l'écrivain-journaliste Charles Humbert est arrêté dans son château de Mesnil-Guillaume, près de Lisieux pour intelligence avec l'ennemi. Il est accusé d'avoir racheté Le Journal avec de l'argent allemand donné par Bolo Pacha. Au final, il sera lavé de tout soupçon. Le 18, le sous-secrétaire d'État au Ravitaillement, Ernest Vilgrain, instaure les cartes d'alimentation à Paris avec les tickets de rationnement. Elles seront étendues dans toute la France le 1er juin 1918...

En Afrique Occidentale Française. Le gouverneur général, le capitaine Joost van Vollenhoven, Français d'origine néerlandaise, est en désaccord avec le député de Dakar, Blaise Diagne, envoyé par Georges Clemenceau. Ce dernier, fervent assimilationniste, préconise une levée massive de soldats parmi les populations africaines. Pour le gouverneur, le pays est encore fragile à cause des recrutements faits par la force en 1915, il faut lui laisser le temps de se remettre. Pour éviter d'être démis, van Vollenhoven démissionne de son poste et demande son affectation dans une unité combattante du front en France, où il sera tué le 20 juillet 1918. Diagne, promu commissaire de la République pour le recrutement des troupes en Afrique Noire, parvient à mobiliser 63 000 nouvelles recrues. En 1918, 95 bataillons de tirailleurs africains sont engagés en Europe, en Afrique et en Orient. Au total, 180 000 soldats africains ont été recrutés par la France pour le front européen entre 1914 et 1918. A leur retour en Afrique, ayant appris à lire, à écrire ainsi qu'acquis des connaissances techniques et militaires, ils aspirent à de nouveaux emplois, ce qui va provoquer l'émergence d'une nouvelle classe sociale parmi les populations indigènes...

Soldats US en France. Le 8 février sort un nouveau premier numéro de The Stars and Stripes (Des étoiles et des bandes, en fait le symbole du drapeau US). C'est un quotidien fait par des militaires pour les militaires. Sa première édition date de la guerre de sécession (1861). Le général John Pershing, le chef du corps expéditionnaire US, le remet au goût du jour et lui donne comme objectif "…d'exprimer les idées de la nouvelle Armée des États-Unis et du peuple étasunien qui la compose". Ce journal existe encore…

Le 3 février, les premiers soldats US de la 23ème division d'infanterie et une brigade de Marines arrivent en gare de Soissons. Une compagnie d'artilleurs US en gare de Mercin. Ils vont se positionner en soutien près du Chemin des Dames...

Le Contingent portugais en France. Par manque d'officiers qui ne reviennent pas de permission, de sérieux troubles s'installent parmi la troupe. Les cas d’insubordination se multiplient ce qui affaiblit considérablement la valeur militaire de ces soldats...

Légions tchécoslovaques. Pour éviter tant que faire se peut que les soldats constitués en légions tchécoslovaques en Russie ne soient considérés comme déserteurs et fusillés, le 8 février la France déclare que les légions tchécoslovaques de Russie sont parties autonomes des légions tchécoslovaques de France. Sur place, elle demande aux soldats de fuir vers l'est ou le nord pour tenter de rejoindre les ports qui sont contrôlés par les Alliés...

Légion Monténégrine : Le 4 février, imitant tous ses prédécesseurs, Clemenceau s’apprête à recevoir en audience le roi monténégrin Nicolas Ier. Le diplomate Horace Delaroche-Vernet, prévient le Tigre que le roi va encore évoquer la question de la légion monténégrine. Clemenceau n'est pas opposé à cette création, et le 10 il reçoit une lettre du ministre monténégrin des Affaires étrangères demandant que cette légion soit placée sous commandement français, organisée à Laval avec des soldats monténégrins mais aussi bosniaques, herzégoviniens et dalmates. Mais, dans le même temps, le gouvernement serbe lui demande de verser tous les ressortissants de la future Yougoslavie dans l'armée serbe qui combat en Macédoine. Alors, Clemenceau devient très prudent et il n'est plus question pour lui de s'immiscer dans les querelles serbo-monténégrines. Du coup, les soldats monténégrins restent oisifs en Corse...

En Grande-Bretagne. Le rationnement alimentaire est étendu à la viande, au beurre et à la margarine. Les portions sont assez réduites, il est accordé à peine 112 gr de confiture et 56 gr de thé par semaine et par adulte. Le 6, la Chambre des communes accorde le droit de vote aux femmes à partir de l'âge de 30 ans, alors que le droit de vote s'exerce à partir de 21 ans pour les sujets masculins, les combattants peuvent donc voter dès l'âge de 19 ans. Le 6, le parlement vote un nouveau 'Military service Act', il permet la révision des exemptés du service national. Le 6, le 'Fourth Reform Act' instaure le suffrage universel pour les hommes de plus de 21 ans et censitaire pour les femmes de plus de 30 ans (propriétaires terriennes ou locataires). Le 8, s'ouvre à Londres la session du Congrès économique interallié qui doit se partager le ravitaillement US pour les trois mois à venir...

Depuis plusieurs mois le feu couve entre William Robertson, le Chef d'état-major britannique, et le Premier ministre David Lloyd George. Depuis le début de l'année, il s'étend aussi avec son adjoint le général Henry Hughes Wilson et même avec le Président français George Clemenceau. En fait, Robertson veut gagner la guerre uniquement sur le sol de France, alors que Lloyd George voudrait la gagner ailleurs, au Moyen-Orient où les promesses d'un avenir économique sont bien meilleures qu'en Europe. C'est d'ailleurs pour cela que Lloyd George soutient l'installation d'un foyer juif en Palestine afin de blanchir un peu la péninsule arabique. Du coup, Lloyd George envoie le général sud-africain Jan Smuts pour discuter avec le général Edmund Allenby en Palestine et le lieutenant-général William Marshall Raine en Mésopotamie afin d'étudier leurs besoins pour chasser définitivement les Turcs du Moyen-Orient. Pour la France, Robertson s'oppose aussi à toutes les manœuvres qui pourraient affaiblir l'autorité du général en chef du corps expéditionnaire britannique, Douglas Haig, et faire passer une partie du BEF sous un commandement étranger. Et là, il s'oppose directement à son adjoint Wilson et à Clemenceau qui ne peuvent plus supporter l'intransigeance de Robertson dans sa façon de mener la guerre. Le climat est si tendu, que Wilson veut réduire la position de Robertson "de maître à celle de serviteur". Alors, quand le général Ferdinand Foch présente aux Alliés sa proposition de créer une réserve stratégique en vue de contenir l'offensive de printemps allemande, hurlements de Robertson, mais approbation unanime de tous les autres. Face à cette proposition, Robertson écrit au conseiller du roi Arthur Bigge que la mise sous tutelle du corps expéditionnaire britannique "détruirait la confiance parmi les troupes britanniques" et que "l'armée britannique est placée aux mains de gens irresponsables et certains d'entre eux, étrangers" et que donc il refuse de participer aux futures conférences alliées. Cela en est trop pour Lloyd George qui demande au roi George V de trancher. Le roi pense que la révocation de Robertson serait "une catastrophe nationale", mais il se résout à l'accepter vu l'opposition de tout le monde. Le 14, Robertson démissionne de son poste de Chef d'état-major général de l'Empire britannique (Chief of the Imperial General Staff ou CIGS) et il tente de s'opposer à la nomination de son adjoint Wilson pour le remplacer. Alors, Lloyd George propose le poste au Général Herbert Plumer qui refuse. Au final, malgré Robertson, c'est le général Henry Hughes Wilson qui devient le Chef d'état-major général de l'Empire britannique le 16 février. La crise est dénouée. On demande à Haig de trouver un poste honorable en France pour Robertson, ce dernier déclare qu'il est tout à fait "inapte au commandement opérationnel de troupes". Alors on nomme Robertson dans un fumeux poste d'officier général commandant en chef du Commandement de l'Est. Mais ce dernier va passer tout le reste de la guerre à comploter contre Lloyd George sans beaucoup de résultats...

Le 23, se déroule à Londres la Conférence syndicale internationale interalliée, la France est représentée par les cégétistes Alphonse Merrheim et Raymond Péricat. Au regard des évènements russes, tous les participants conviennent qu'il est maintenant possible de renverser les républiques bourgeoises par une dictature prolétarienne. Une résolution définissant les buts de guerre est adoptée en ce sens. Le 28 à la Chambre des communes, le ministre des Affaires étrangères, Lord Arthur Balfour, affirme que le gouvernement britannique ne reconnaît pas les nouvelles autorités bolchéviques, ni les traités qu'elles peuvent signer avec l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, la Bulgarie et la Turquie...

En Irlande. La publication du 'Military service Act', qui permet d'envoyer au front tous les jeunes gens aptes au service militaire, alors que jusqu'à maintenant les Irlandais en étaient exemptés, amène de sérieux troubles. De nombreux jeunes catholiques s'embarquent précipitamment vers un exode qu'ils savent moins dangereux que d'aller faire la guerre sur le continent, d'autant plus que l'Allemagne soutien l'indépendance de l'Irlande. Devant l'agitation permanente qui secoue l'île, les autorités britanniques sont obligées d'envoyer des renforts de police et des militaires...

Aux États-Unis. Le 6 février, le Président Woodrow Wilson demande au Congrès des pouvoirs exceptionnels pour la durée de la guerre et il les obtient sans trop de discussions. Le 11, en réponse au Chancelier allemand Georg von Hertling et au Chancelier austro-hongrois Ottokar Czernin à son message du 8 janvier, le Président Wilson fait une déclaration au Congrès. Il affirme "Les peuples et les provinces ne doivent plus être troqués entre les gouvernements comme des troupeaux ou comme des pions sur un échiquier". Il confirme que la guerre ne pourra cesser que si tous les territoires occupés sont restitués et que les traités de paix soient connus de tous. Le 15, en vertu des pouvoirs exceptionnels accordés au Président, la Maison-Blanche exerce le contrôle de tout le commerce extérieur...

Au Canada. L’Amirauté britannique estime bien réelle la possibilité que des sous-marins allemands soient présents dans la partie ouest de l’Atlantique et elle propose la mise en place d’une défense aérienne anti-sous-marine commune avec les USA sur la côte est du Dominion...

En Belgique occupée. Le 15 février à Bruxelles, les membres de la Cour de cassation se mettent en grève. Ils remettent en cause la déportation de trois présidents de la cour d'appel de Bruxelles et de trois autres personnalités de la magistrature, en fait tous ceux qui ont condamné Auguste Borms et Pieter Tack, des chefs activistes flamands, à la réclusion. Mais les deux hommes, à la demande expresse du Conseil des Flandres, sont remis aussitôt en liberté par les occupants. Dans le même temps, des magistrats sont aussi suspendus et, pour certains, déportés. Par ces actes d'insubordination à l'autorité judiciaire, les séparatistes flamands essayent de se saisir de l'occasion pour tenter de "flamandiser" la Justice. Le mouvement des membres de la Cour d'appel est vite relayé par tous les autres organes de justice, mais sans faire fléchir l'occupant. Le 18 février, l'as belge Willy Coppens, surnommé Le Diable bleu par les Allemands à cause de son avion, un Hanriot HD-1 totalement peint en bleu, survole les toits de Bruxelles en rase-mottes uniquement pour aller dire bonjours à ses parents...

En Italie. Le 13 février, le gouvernement de Vittorio Emanuele Orlando est forcé de reconnaître les clauses de l'accord secret de Londres. Il a été conclu le 26 avril 1915 avec les Alliés et il a mené le pays à la guerre. Les revendications territoriales italiennes, qui sont les buts de guerre du pays, deviennent publiques. L'Italie réclame le Trentin tyrolien, l'Istrie, la Lybie, l'Albanie, une partie de la Grèce et la région de Smyrne en Turquie. Le 16, le gouvernement US accorde un nouveau prêt de 50 millions de dollars au pays, la dette totale de l'Italie à l'égard des États-Unis atteint alors 550 millions de dollars...

En Grèce. Devant la mobilisation générale au profit des Alliés, la garnison de Lamia, toujours fidèle au roi Constantin Ier, se rebelle. Elle est matée très rapidement et les meneurs jetés en prison sans ménagement. Du coup, le chef du gouvernement, Elefthérios Venizélos, fait aussi arrêter les anciens Premiers ministres du roi déchu, Stefanos Skouloudis et Spyrídon Lambros, qui ne cessent de comploter contre son gouvernement...

En Allemagne. Le 19 février à Berlin, l'empereur Guillaume II décerne au général turc Mustafa Kemal Atatürk le Cordon de Prusse de 1ère catégorie. Kemal, qui vient de reprendre les villes de Muş et Bitlis en Arménie, est alors placé sous les ordres du général allemand Erich von Falkenhayn et il se voit confier le commandement de la 7ème armée allemande, dite Asien-Korps, cantonnée en Palestine. Le 20, le parlement ratifie l'accord de paix avec l'Ukraine. Le 27, une présentation du tank allemand A7V avec tir réel se déroule devant le Kaiser, selon Ludendorff l'exercice n'impressionne personne...

En Autriche-Hongrie. Le 1er février, une mutinerie éclate sur la base navale austro-hongroise de Cattaro-Kotor (maintenant en Slovénie). L'équipage du Sankr Georg, un croiseur au mouillage, prend le contrôle du navire. Il hisse le drapeau rouge, mais les couleurs austro-hongroises restent aussi en place et les marins rebelles continuent même à les saluer matin et soir, comme d'habitude. Des Croates et des Slovènes prennent la tête de la mutinerie sans pourtant que leurs doléances et griefs soient véritablement liés au nationalisme des Slaves du Sud. Ils sont en rébellion contre les exercices d’entraînement fastidieux et par l’absence de concrétisation des avantages promis par le traité de Brest-Litovsk, notamment sur l'augmentation des rations alimentaires. Les Autrichiens et les Magyars de souche ne participent pas au mouvement. Les marins rebellent sont rapidement encerclés par les forces terrestres et maritimes loyalistes, 392 sont déférés en justice, 348 sont acquittés et 4 mutins sont fusillés...

Le 9, à Vienne, le président du Conseil Ernst Seidler von Feuchtenegg en désaccord avec son ministre des Affaires étrangères sur la répression des grèves de janvier, donne sa démission au roi Charles Ier. Ce dernier la refuse et il reste alors en place...

En Pologne. La cession d'une partie de la Galicie pour faire la paix avec l'Ukraine et surtout le transfert de la ville de Lviv à majorité polonaise, hérisse le nationalisme national. Même si la majorité du sud de la Pologne est toujours sous domination austro-hongroise, le pays tout entier se rêve indépendant et n'accepte pas le nouveau tracé de frontière arrêté à Brest-Litovsk. Le 14 février, de grandes manifestations se déroulent dans la Pologne "libre" pour contester la partition du pays. Cette cession territoriale entraînera une guerre polono-ukrainienne dès l'annonce de l'armistice du 11 novembre 1918. Les légions du général Józef Haller, qui combattent aux côtés des Austro-Allemands, se mettent à déserter. Haller réussit à gagner la France. Il reçoit le commandement en chef de l'armée de volontaires, formée par le Comité national polonais, qui combat sur le front français...

En Russie. Pendant tout le mois, le pays ne va pas cesser de s'émietter. Déjà, depuis décembre et le début des négociations de paix, une partie de la Pologne, l'Estonie, la Livonie, la Lituanie, le Caucase, la Courlande et la Finlande sont plus ou moins autonomes. A ces pays de l'ouest, il faut ajouter les provinces du nord qui, sous l'influence des Britanniques, réclament leur liberté. Il y a aussi la quasi totalité de la Sibérie orientale qui, à part le grand port de Vladivostok, n'a jamais été totalement tsariste, encore moins bolchevique. En cela, ils sont en parfait accord avec les thèses de Lénine sur le droit des pays à disposer d'eux-mêmes. Pour l'instant, seules la séparations de l'Ukraine et de la Biélorussie, les greniers à blé de la Russie, sont fortement contestées par le pouvoir de Petrograd. Toutefois cet émiettement n'est pas sans conséquences directes sur l'économie du pays. En quelques jours, la Russie perd 34% de sa population, 32% de ses terres cultivées, 54% de ses entreprises industrielles et 89% de sa production de houille. L'Empire allemand, et dans une moindre mesure, l'Empire austro-hongrois soutiennent les aspirations indépendantistes des peuples satellites de l'ouest, ils y voient le moyen de percer le blocus maritime qui commence à peser sérieusement sur leurs industries de guerre. Comme ces États nouvellement créés sont à la merci d'une reconquête russe, ils deviennent des alliés naturels des Empires centraux. Lorsque les gardes rouges interviennent en Finlande, l'Allemagne envoie un corps expéditionnaire qui aide la république de Finlande à s'imposer. C'est également avec l'aide des Empires centraux que les bolcheviks sont chassés d'Ukraine le 24, même si la situation dans cet État est beaucoup plus compliquée...

Le 31 janvier est suivi du 14 février !!! En une seule fois, le calendrier julien russe et ses 14 jours de retard est gommé, la Russie adopte définitivement le calendrier grégorien et se met aux standards de la majorité des pays du monde. Toutefois, l'extrême est du pays, qui échappe au pouvoir des Bolcheviques, va rester dans le calendrier julien jusqu'en 1920. Le 5 février du calendrier grégorien, le gouvernement bolchevique proclame la séparation de l'Église et de l'État. De graves dissensions se font jour au sein du Comité central du parti bolchévique au sujet des négociations de paix avec les Empires centraux. Les "Jusqu'auboutistes" soutenus par Trotsky s'opposent aux partisans de Lénine plus modérés. Dans sa diatribe contre les jusqu'auboutistes, Lénine laisse des phrases mémorables pour l'histoire : "Si la guerre recommence, notre gouvernement sera renversé et la paix sera plus mauvaise… Les paysans pauvres nous abandonneront si nous continuons la guerre... Le moujik ne fera pas la guerre et il renversera n'importe qui lui dira de la faire". Au final, Lénine gagne le Comité central à son point de vue. Alors, les bolcheviques ordonnent à Trotsky de faire une déclaration pour annoncer que le gouvernement russe a la volonté de poursuivre les pourparlers de paix avec les Empires centraux...

Le 21, devant l'avancée des troupes allemandes, Petrograd est mis en état de siège et la mobilisation révolutionnaire est décrétée. Le même jour, un décret du Comité central du parti bolchévique annonce que "tous les emprunts étrangers sont annulés, sans condition ni exception". Le lendemain, des troupes polonaises sous commandement allemand s'emparent de Minsk, la capitale de la Biélorussie et proclament son rattachement à la Pologne afin de tenter d'apaiser les tensions dues à la cession d'une partie du pays à l'Ukraine. Le 23, Lénine s'adressant au Comité central du parti bolchévique affirme que "la politique des phrases révolutionnaires est terminée", pour lui le pouvoir est maintenant acquis. Prêchant pour la conclusion des pourparlers de paix avec l'Allemagne, il affirme "la patrie socialiste en danger". Le 24, les Bolcheviques acceptent formellement les conditions de paix dictées à Brest-Litovsk, y compris pour l'Ukraine. La pénétration allemande continue néanmoins, les villes de Reval et de Pskov sont occupées. Le 27, devant l'avancée des troupes allemandes, tous les membres des corps diplomatiques alliés quittent Petrograd pour rejoindre en première étape Vologda afin de pouvoir s'embarquer ultérieurement à Mourmansk ou Arkhangelsk...

En Ukraine. Le 9 février à Brest-Litovsk, une paix séparée est signée entre les puissances centrales et le gouvernement ukrainien de Mykhaïlo Hrouchevsky. Dès la signature, l'Allemagne exige de l'Ukraine la fourniture de céréales sur la moisson de 1918. Le 16, des combats confus qui mettent en scène les partisans de la Rada, les socialistes antibolcheviques de Simon Petlioura et les bolcheviques eux-mêmes se déroulent autour de la capitale Kiev. Les troupes bolchéviques finissent par occuper la ville le 20 février, ce qui oblige le gouvernement d'Hrouchevsky et les députés de la Rada à s'enfuir. Puis, avec l'aide de troupes austro-hongroises, les partisans d'Hrouchevsky reprennent la capitale. A partir là, l'Ukraine bascule dans l'anarchie la plus totale avec 3 armées qui se font la guerre ou qui s'évitent selon le cas. A la fin du mois, les troupes germano-austro-hongroises atteignent la Crimée et le delta du Danube...

En Lituanie. Le 13 février, sous occupation allemande, alors que des troupes bolchéviques tentent de s'emparer du pouvoir par la force, le Conseil national lituanien proclame l'indépendance du pays. Ce nouvel État annonce être gouverné par des principes démocratiques et il désigne Vilnius pour capitale. Le 20, la déclaration d’indépendance est signée par les 20 représentants qui s'érigent en une assemblée constituante présidée par Jonas Basanavičius. En fait, malgré sa reconnaissance officielle par le traité de Versailles du 28 juin 1919, la Lituanie sera encore en guerre pendant quatre ans contre les Russes, puis contre les Polonais, mais aussi contre la France. Elle ne deviendra juridiquement un État autonome que le 14 décembre 1922...

En Estonie. Le 24 février, le gouvernement bolchevique est chassé par les Allemands. Aussitôt se forme un gouvernement provisoire sous la direction de Konstantin Paets...

Dans le Caucase. Depuis la révolution bolchevique, les pays transcaucasiens refusent de reconnaître l'autorité du nouveau pouvoir de Petrograd. La présidence du Haut commissariat à la Transcaucasie est confiée à Evguéni Guéguétchkori1 (un ancien député menchevik). Le 10 février, une Assemblée parlementaire transcaucasienne, dite SEJM, présidée par Nicolas Tchkhéidzé (ancien président menchevik du Comité exécutif du Soviet de Petrograd, de février à octobre 1917) confirme Guéguétchkori dans ses fonctions...

En Roumanie. Le 6, le général allemand August von Mackensen donne un délai de 4 jours au gouvernement pour accepter de négocier la paix, sinon il reprend les hostilités. Sauf, qu'à cette date, il n'y pas de gouvernement. Le nouveau Premier ministre, Alexandru Averescu n'arrive toujours pas à constituer un semblant de gouvernement pour, au final, signer la défaite. Enfin le 13, après 15 jours d'intenses pourparlers, le cabinet d'Alexandru Averescu est constitué à Jassy la capitale provisoire du pays. Le 25, débutent à Bucarest les négociations de paix. Les Allemands veulent la destitution du roi Ferdinand Ier, qui leur a déclaré la guerre. Mais les négociateurs roumains, aussi habiles que tenaces, ne sont prêts à accepter le changement de dynastie qu'en échange du maintien sous souveraineté roumaine de la province de Dobroudja et du port de Constanța sur la mer Noire. Or, c'était justement la promesse de donner cette province aux Bulgares qui les a fait entrer en guerre aux côtés des Empires centraux. Devant les circonstances, les Allemands oublient leurs promesses. Ils profitent de l'aubaine pour dire que le port de Constanța qu'ils occupent reste Roumain, mais il est mis sous tutelle allemande. Seule une toute petite partie du Dobroudja est accordée aux Bulgares et une frange à l'ouest du pays est accordée aux Austro-Hongrois. Au final, les Roumains malgré leur défaite peuvent être satisfaits car ils gardent le contrôle de la quasi totalité de leur pays. De leurs côtés, les Austro-Hongrois et les Bulgares sont furieux du peu de considération que les Allemands leur accordent dans la victoire. A partir de là, la confiance est ébranlée et ces deux pays vont se montrer des plus méfiants sur les véritables intentions des Allemands en cas de victoire finale...

Tranchées ottomanes en surplomb de la Mer Morte

(1) Shanee deviendra un énorme succès commercial, c'est la chanson de Georges Gershwin la plus célèbre et la plus vendue au monde. Une comédie musicale, puis un film en reprendront le thème.

(2) Parti de Nancy la veille, le lieutenant Anselme Marchal survole Berlin le 21 juin 1916, où il lance 5 000 tracts en allemand destinés à la population. Marchal, à court de carburant, parvient à atterrir non loin de Chełm en Pologne, au milieu de troupes austro-hongroises, au terme d'un périple de plus de 1 300 kilomètres. Du même coup, il établit un nouveau record mondial de distance sans escale. L'évasion réussie de Roland Garos et d'Anselme Marchal servira de socle au cinéaste Jean Renoir pour réaliser son film La Grande Illusion en 1937. Il est d'ailleurs à noter que Jean Gabin dans le film prend le nom de Maréchal.

(3) L'épave du sous-marin britannique l'E-50 est localisée et en partie récupérée en 2011. La tourelle fait alors l'objet d'une restauration très complète. Depuis 2015, elle est exposée au Musée de la Mer du Jutland à Thyborøn. Les 31 hommes qui ont perdu la vie dans le sous-marin sont tous nommés sur une plaque commémorative placée au musée.

(4) Il est à noter que le commandant de l'U-34 en février 1918 n'est autre que Wilhelm Canaris. C'est un brillant officier de marine qui parle couramment cinq langues. Comme il produit de bons rapports politiques et militaires lors de ses différentes missions, il devient informateur pour le compte du ministère des Affaires étrangères allemand. Mais il est rapidement 'grillé' et doit quitter l'espionnage pour prendre la direction d'un sous-marin jusqu'à mai 1918. Nommé amiral en 1940, il devient responsable de l'Abwehr (service du contre-espionnage allemand) pendant la deuxième Guerre mondiale et il mène différentes opérations de renseignements essentielles à la victoire de l'Allemagne nazie. Mais il se défend d'être un nazi et il appuie diverses tentatives pour assassiner Adolf Hitler. En juin 1944, il est un des rares allemands à savoir que les premières strophes du poème Chanson d'Automne de Paul Verlaine "Les sanglots longs des violons de l'automne" est celle qui signifie que le débarquement sur les côtes françaises de la Manche est imminent, et que sa suite "blessent mon cœur d'une langueur monotone" est celle qui signifie que le débarque a lieu. Soupçonné d'avoir pris part au complot du 20 juillet 1944 contre Hitler, il est interné, puis sommairement jugé et condamné à mort par un tribunal spécial. Il est exécuté le 9 avril 1945 au camp de Flossenbürg en Allemagne.

(5) Après la guerre, l'Amirauté britannique se fait remettre le capitaine-lieutenant de l'UC-56, Wilhelm Kiesewetter, alors interné en Espagne. Il est aussitôt emprisonné dans la tour de Londres, mais il est rapidement libéré au motif que la Grande-Bretagne n'a pas le droit d'emprisonner un détenu pendant l'armistice. Jamais jugé, Wilhelm Kiesewetter dirigera de nouveau des unités combattantes durant la deuxième Guerre Mondiale et il mourra tranquillement dans sont lit sans jamais être inquiété pour ses méfaits. Le 26 février 2002, à l'occasion du 84ème anniversaire du naufrage, une plaque commémorative est scellée près de Hartland Point (Devon, Grande-Bretagne) en reconnaissance à tous les tués et disparus de cette tragédie.

 

 

Hydravion US Aéromarine n°40

Tombes de soldats russes en Champagne

Cuisine roulante française dans la Somme enneigée

Volontaires polonais venus des USA au camp de Mailly

Le croiseur allemand Breslau (Midilli pour les Turcs) coulé par une mine dans la mer Egée

Mitrailleuse allemande MG08 montée sur affût spécial pour tir anti-aérien

Macabre découverte, elles abondent sur le front

Soldats portugais dans la vallée de la Lys (photo recolorisée)

Troupes bédouines dans l'est du Jourdain

Soldats US se dirigent vers le front en Lorraine

Soldats US devant un camion désossé (photo recolorisée)

Soldats russes au travail dans une carrière en Haute-Saône

Tranchée dans la neige (photo recolorisée)

Troupes bédouines à l'est du Jourdain

Soldats français internés au Camp de Saint-Ange

Poste d'observation britannique en Mésopotamie

Soldats askaris (Allemands) au Mozambique (photo autochrome)

Par manque de place sur cette page, j’ai mis en entier l’Écho de Barbentane

de mars et avril 1918 sur une feuille à part : cliquez-ici pour le consulter

Quelle folie la guerre !

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Barbentane, le plus beau village de l'Univers

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Tous mes remerciements à toutes celles et ceux qui m’ont aidé dans ces tâches de reconstitution de notre patrimoine barbentanais : prêt de brochures, de photos, des Écho de Barbentane, aide, corrections, traducteurs et autres…

Guy

Écho de Barbentane de mars et avril 1918

Infirmières de la Croix-Rouge Britannique

Soldates russes dans les troupes antibolcheviques

Remise de médailles à des soldats courageux

Atelier du chargement d'obus totalement ravagé après une explosion à Yzeure