BARBENTANE

en Juillet 1917

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Sur le front français entre Ypres et Reims, les batailles autour du Chemin des Dames sont toujours féroces. Celles des observatoires se poursuivent dans des combats sauvages sans qu'aucun des belligérants ne prenne vraiment le dessus. Autour de la Caverne du Dragon conquise de haute lutte par les Français le 26 juin, les Allemands ne peuvent se résigner à cette perte. Tout le mois de juillet, ils lancent attaque sur attaque qui se soldent par des échecs. Pour certains, le secteur est devenu pire qu'à Verdun, l'artillerie déterre les cadavres, les rats pullulent. Avec les chaleurs, l'odeur devient pestilentielle, mais chacun reste sur ses positions. Reims vit un nouveau martyre, certains jours plus de 2 000 obus allemands saccagent les quelques murs de la ville qui sont encore debout. Tous les jours, les territoriaux français déblaient les artères les plus importantes pour que les transports puissent les emprunter. En Argonne le secteur est plus calme, mais au nord de Verdun c'est de nouveau de violents combats. Avocourt, la cote 304, le Mort-Homme et le bois de Cumières reviennent dans l'actualité. En certains endroits, les Allemands prennent des tranchées, mais ne parviennent pas à s'y installer durablement car les contre-attaques françaises les en chassent rapidement. Devant ces charges, le généralissime temporaire Philippe Pétain donne l'ordre de reconquérir les hauteurs du secteur toujours tenues par les Allemands. Le 17 à 3h00, après plusieurs jours de tirs d'artillerie, un régiment entier sous les ordres du lieutenant-colonel Rozier part à l'assaut dans une offensive d'envergure. Les Allemands surpris sont rapidement débordés, mais à 9h00 c'est une pluie de bombes allemandes en tapis qui tombe sur les assaillants, les massacrant sur place. Pendant plus de deux jours, les obus ne cessent de tomber. Les Poilus sont littéralement cloués sur place, personne ne peut les aider ni les ravitailler, eux mêmes sont incapables de porter secours à un soldat blessé à proximité. Le 25, le peu de terrain conquis est repris par les Allemands. Alors, décision est prise de monter une attaque de plus grande envergure pour août afin de chasser définitivement les Allemands des crêtes et écarter durablement la menace. Pour ce faire, les avions français de reconnaissance vont photographier tout le secteur. Pas un seul mètre carré de terrain ne sera oublié et toutes ces photos sont étudiées à la loupe par les artilleurs français...

Le 24, sur le Chemin des Dames, les Français reprennent les premières lignes du plateau de Californie, à l’extrémité orientale du plateau de Craonne. Le 26, lors d'une attaque plus soutenue, les Allemands parviennent à reprendre pied dans la partie nord de la Caverne du Dragon. Cet ouvrage ne sera resté entièrement français que pendant un mois, mais là les journaux ne sont pas invités pour relater l'évènement...

Entre Verdun et la pointe sud des Vosges, c'est le calme plat, seuls quelques accrochages sans conséquence sont notés à proximité de Mulhouse. Toutefois, le 25, une pièce allemande à longue portée tire une centaine d'obus dans la direction de Nancy. Pas de victimes et des dégâts insignifiants, mais les aviateurs n'arrivent pas à repérer le canon, ce qui est inquiétant. En représailles, l'artillerie française détruit des usines à Château-Salins...

Le 31, débute la troisième bataille d'Ypres. Lancée par les Britanniques sur un front de 25 kilomètres en direction de Passchendaele, elle sera terrible et elle va se dérouler jusqu'au 30 octobre...

Dans la Guerre Aérienne. Les Alliés deviennent les maîtres du ciel. Pour les Allemands, il n'est plus question de franchir la "frontière" pour venir guerroyer en France. Ils se contentent de défendre chèrement leur territoire. Même leur aviation de reconnaissance commence à péricliter, ce qui est dramatique pour leur artillerie qui ne peut plus régler correctement ses tirs. Au contraire, les Français comme les Britanniques chérissent cette spécialité aérienne qui leur permet de lancer des attaques avec efficacité...

Le 4 juillet, 15 avions Gotha G allemands au long rayon d'action, bombardent le port d'Harwich sur la côte est de la Grande-Bretagne. Bien que les dégâts soient peu importants, on déplore néanmoins des pertes humaines, soit 11 personnes tuées, et 36 blessées. Sur le chemin de retour, ils sont attaqués par des avions britanniques qui en détruisent 2 et en endommagent un autre. Dans la nuit du 6 au 7, 84 avions français bombardent Trèves, Ludwigshafen et les usines Krupp de la Ruhr. Le 7, vingt-deux Gotha bombardent Londres, ce qui ne détruit pas grand-chose, mais tue 57 personnes et en blesse 200 autres. Le 10, des avions français exécutent un raid sur Maastricht, d'autres sur Essen, détruisant des usines. Le 15, des avions allemands se dirigent de nuit vers Paris. Repérés avant, ils sont pris en chasse et mis en échec par des avions français. Il n'y a ni perte humaine, ni dégât matériel. Dans la nuit du 15 au 16, 11 avions français survolent Trèves, et larguent 2 650 kilos de bombes. Sept incendies sont aperçus, dont un d'une grande violence à la gare centrale. Six autres appareils bombardent Ludwigshafen et en particulier l'importante usine chimique de Badische-Anilin. Durant ce même raid, le maréchal des logis Antoine-Maxime Gallois, aviateur de la territoriale car âgé de 38 ans, pousse jusqu'à Essen, où il lance de nombreuses bombes sur les usines Krupp. Pour avoir piloté son avion pendant plus de 7 heures, il reçoit la Médaille militaire et une citation à l'ordre de l'armée. Le 24, un nouveau raid aérien allemand se porte sur le port de Harwich, on relève 8 morts et 25 blessés. Le 28, Georges Guynemer abat deux avions ennemis, portant son total à 50 victoires, nombre que personne dans le camp allié n'a encore atteint...

Dans la Guerre Maritime. Dans la guerre sous-marine à outrance, si avril a établi le record de navires touchés (516), depuis c'est la décroissance. Juillet avec seulement 311 navires atteints est même inférieur au mois de février (328) avant la mise en place de cette guerre totale. Le fameux plan de l'amiral allemand Henning von Holtzendorff qui préconisait la destruction d'au moins 800 000 tonneaux pendant 6 mois pour gagner la guerre est un superbe échec. Seul le mois d'avril a atteint cet objectif, la mise en place des convois et la lutte anti sous-marine qui ne cesse de progresser, rendent de plus en plus difficile les destructions opérées par les U-Boote...

En juillet, sur les 311 navires touchés par les sous-marins allemands (286 coulés et 25 endommagés), 142 sont britanniques, 31 norvégiens, 23 néerlandais, 22 italiens, 20 français, 17 danois, 13 grecs, 12 étasuniens, 9 suédois, 8 russes, 4 portugais, 3 japonais, 2 espagnols, 2 belges, 1 finlandais, 1 islandais et 1 uruguayen. Les pays neutres payent cher leur neutralité, car ne pouvant s'intégrer dans les convois alliés, leurs navires commerciaux deviennent des proies faciles pour les U-Boote qui ne se privent pas de les couler. Le 4 juillet, l'Amirauté britannique décide même de miner les eaux territoriales danoises et hollandaises, pourtant pays neutres...

Le 4 juillet, à 3h00, le sous-marin allemand U-155 Deuchland, célèbre pour avoir le premier traversé l'Atlantique, émerge devant le port de Ponta-Delgada dans les Açores. Placé assez loin de la côte, il bombarde la ville, ce qui occasionne peu de dégâts, mais tue 4 personnes. Dans la nuit, les batteries côtières ne peuvent pas riposter et c'est le bateau US Orion, un charbonnier armé en réparation, qui tire sur le submersible, l'obligeant à cesser le combat. Cette attaque contraint les Alliés à laisser constamment une flotte armée aux Açores pour défendre ces îles très importantes dans le trafic maritime de l'époque. Le même jour, le cargo britannique Goathland qui se dirige vers le Mexique est torpillé par l'U-82 près de Belle-Île-en-Mer, 20 marins périssent, et sur les 7 rescapés, un marin blessé est recueilli par le sous-marin. Le 9, juste avant minuit à Scapa Flow, le grand port de guerre de la marine britannique à la pointe nord de l'Écosse, le très moderne cuirassé Vanguard explose. Cette destruction est due à l'explosion de la poudre à canon causée par un feu qui s'est déclaré dans les chaufferies. Le navire coule immédiatement, entraînant avec lui 804 marins, seuls deux membres d'équipage parviennent à s'échapper. Une des victimes de l'explosion est le capitaine Kyōsuke Eto, un observateur militaire de la marine impériale japonaise. En termes de pertes humaines, la destruction du Vanguard est -encore maintenant- l'explosion accidentelle la plus meurtrière de l'histoire du Royaume-Uni. Le 10 à 0h15, le cargo US Kansan qui se dirige vers Saint-Nazaire saute sur une mine laissé par l'UC-69 au large de Belle-Île-en-Mer, 4 marins périssent lors du chavirage d'une baleinière. Le 11, le trois-mâts français Coquimbo saute sur une mine dans le golfe de Gascogne, 18 survivants sont recueillis par le chalutier Albert André et 7 marins disparaissent. Le 12, le cargo français Claire est torpillé au large de Bône par l'U-38, 26 personnes périssent. Le 31, le trois-mâts français Madeleine II en route pour l'Australie est torpillé par l'U-115 à l'est de l'Île de Madère, les survivants sont recueillis par le vapeur US Santa-Cécilia, 11 marins périssent. Après avoir coulé le voilier français Gloire à Dieu dans l'Atlantique le 4 juillet, l'UB-23 est attaqué le 26 par le patrouilleur britannique PC-60 au large de l'Espagne. Gravement endommagé, il parvient péniblement à rejoindre le port de La Corogne au nord de l'Espagne le 29. Là, l'équipage est internet dans la ville de Ferrol et ne sera libéré qu'après la guerre. Le 31 juillet, le trois-mâts barque français Madeleine II qui se dirige vers Australie est attaqué au canon par l'U-155 en plein océan Atlantique entre les Açores et Madère. Son commandant ordonne la riposte et pendant trois heures le fier navire qui ne peut guère manœuvrer par manque de vent, se défend vaillamment. Après avoir tiré plus de 200 projectiles avec ses canons, un obus du sous-marin atteint sa soute à munition ce qui fait exploser une partie du voilier, déclenche un incendie et tue 20 marins. Les survivants, dont certains sont blessés, sont recueillis par vapeur US le Santa-Cécila. Pour leur courage et leur vaillance les membres de l'équipage sont cités à l'ordre du jour des armées le 14 octobre 1917. Après le voilier, l'U-155 attaque et coule à la torpille le vapeur britannique Snowdonian sans faire de victime...

Dans la Manche, dans la nuit du 26 au 27, dans un épais brouillard le sous-marin allemand UC-61 s'échoue sur un haut-fond à une centaine de mètres de la commune de Wissant dans le Pas-de-Calais. A 5h00, une vedette de la douane entend des voix mais le temps est si bouché qu'on ne distingue rien. A 10h00, le bruit d'un moteur électrique fait sursauter trois gabelous venus à la rame voir ce qui se passait. Alors, tout surpris, les douaniers comprennent que c'est un sous-marin qui jette pardessus bord tout ce qui pourrait l'alléger afin de se sortir d'affaire avec la marée. A la question "êtes-vous Français ou Anglais" une superbe voix répond dans un français parfait "tu nous emmerdes !!!" Là, le doute n'est plus permis, c'est un ennemi. Les gabelous rentrent aussitôt au port signaler la nouvelle et, le commandant de l'UC-61 reçoit par radio l'ordre de saborder son bâtiment. Les sous-mariniers sautent alors à l'eau et rejoignent la plage toute proche. A Wissant, il n'y a pas d'autres militaires que des cavaliers belges de la territoriale chargés de surveiller la côte entre Calais et Boulogne. Aussitôt, 40 cavaliers se dirigent vers le port juste à temps pour capturer tout l'équipage pendant que l'UC-61 explose au large. En acheminant les prisonniers à Calais, les cavaliers pas peu fiers attirent une telle foule de curieux que c'est presque un cortège de triomphe qui traverse la ville pour atteindre la citadelle. En tout cas, c'est un évènement unique et assez incongru dans cette guerre, c'est la seule fois que des cavaliers, et de la territoriale en plus, capturent l'équipage au complet d'un sous-marin...

Sur le Front Russe. Depuis plus d'un mois que le ministre de la Guerre, Alexandre Kerenski le pousse à attaquer, le général Alexeï Broussilov lance sa grande offensive d'été le 1er juillet. Toutefois, ce n'est qu'une action limitée sur environ 80 kilomètres en Galicie, la partie la plus occidentale de l'Ukraine. Après une courte préparation d'artillerie, toute l'infanterie disponible se rue sur l'ennemi avec pour objectif d'atteindre le plus rapidement possible la ville de Lemberg au centre du front. La supériorité numérique est nettement en faveur des Russes, ils sont au moins trois fois plus nombreux que les germano-austro-hongrois, du moins en quantité, car en qualité combattante, c'est tout autre chose. Les armées russes ne sont plus approvisionnées régulièrement depuis des mois, les soldats manquent de tout, y compris de balles de fusil...

Le Bataillon Féminin de la Mort de la lieutenant Maria Bochkareva est engagé sur le front de Minsk les 8 et 9 juillet. Malgré son encadrement par des troupes plus aguerries, ces soldates subissent de lourdes pertes qui sanctionnent leur inexpérience des combats, Maria Bochkareva elle-même est grièvement blessée dans une attaque...

Conformément au plan, les Germano-Austro-Hongrois sous les ordres du général Hans-Sixt von Arnim, effectuent un repli stratégique au centre du front, laissant croire aux Russes qu'ils remportent la victoire. Du coup, on pavoise à Petrograd. Le Congrès de tous les Conseils des délégués de la Russie, c'est-à-dire l'ensemble des Soviets, adresse à l'armée un chaleureux ordre du jour de remerciement, et demande au pays "de concentrer tous ses efforts pour aider les troupes, car, tant que les peuples d'Europe ne répondent pas à notre appel, la guerre continue". Le 6, l'armée russe du général Lavr Kornilov lance une offensive plus au sud, entre Galitch et Stanislav. Elle progresse elle aussi rapidement, mais sans percer. Puis, petit à petit, devant les pertes conséquentes, les soldats russes se mutinent et refusent d'avancer. Le 16, tout s'effondre. Par les ailes, les Germano-Austro-Hongrois lancent de violentes attaques et mettent en déroute les soldats russes qui refusent même de mettre leur masque à gaz, car ils le trouvent dégradant. La progression est spectaculaire, le 18 les forces des Empires centraux ont progressé de 100 kilomètres à travers la Galicie et l’Ukraine jusqu’à la Zbroutch. Les lignes russes sont complètement disloquées, et le 23 les Russes ont reculé de 240 kilomètres...

Le 24, débute sur le front roumain la bataille de Marasesti, qui sera surnommée "Le Verdun roumain". C'est la dernière bataille importante du front de l'Est, elle oppose l'armée roumaine, secondée par des unités russes de moins en moins motivées, à l'armée allemande commandée par le général August von Mackensen, secondée par des unités austro-hongroises. Les Allemands tentent de percer le front entre le cours inférieur de la rivière Siret (Sereth) et les Carpates. Les résultats attendus par Mackensen sont l'effondrement de la résistance roumaine en Moldavie et la capitulation de la Roumanie dont la capitale provisoire est Iasi, une ville à l'extrême nord du pays. Les défenseurs, 218 000 combattants, sont inférieurs aux 245 000 assaillants, mais ils ont l'avantage du terrain. Comme à Verdun, la bataille sera féroce...

Le 25, après la Galicie, l'armée russe évacue les Carpates et abandonne toutes ses positions devant la poussée des armées germano-austro-hongroises qui reprennent sans combats la ville de Tarnopol. L'armée tsariste est vaincue et, au sud du pays, l'armée russe n'existe plus. Seuls ou presque, les soldats tchèques continuent le combat. Ils savent très bien que s'ils sont repris ils seront immédiatement fusillés en tant qu'anciens déserteurs...

Sur le Front Italien. Là aussi le front est calme, mais un calme d'avant la tempête. Prudemment, l'état-major retire certains postes avancés sur le plateau d'Asiago, positions intenables et vouées à une destruction rapide. Après l'échec de la dixième bataille sur l'Isonzo, fidèle à lui même, le généralissime italien Luigi Cardona prépare tout simplement la 11ème. Son but reste identique, prendre le port de Triestre. Les moyens sont toujours les mêmes, on masse la presque totalité de l'armée entre Tolmin et Triestre, soit une centaine de kilomètres, pour les lancer dans un assaut frontal contre les Austro-Hongrois. Tout le front alpin est plus ou moins figé, seules des escarmouches sont signalées...

Dans les Balkans. Depuis que les Britanniques annoncent qu'ils veulent quitter la région, le général Maurice Sarrail est paralysé. Si maintenant la Grèce n'est plus un problème et si l'armée grecque commence à monter en renfort au nord du pays, Sarrail n'ose lancer une offensive d'envergure, car les forces britanniques assurent la défense centrale du front. Plus encore, sans les navires britanniques, le ravitaillement des forces combattantes deviendrait impossible, car tout doit être acheminé sur place, de la nourriture aux balles des fusils. Malgré un communiqué officiel qui signale que "Les troupes britanniques et françaises unies aux troupes russes, italiennes, roumaines et grecques jouissent, cette année, d'une bonne santé", la malaria et autres maladies font toujours des ravages. Alors on campe sur ses positions sans trop essayer de bouger. Contre toute attente, ce sont les Bulgares qui attaquent. Le 2 juillet, une bataille locale d'envergure se déroule contre les Britanniques au lac Doiran, les défenseurs reculent. Mais ils se reprennent très vite et, avec l'aide de l'aviation, ils récupèrent facilement le terrain perdu. Le 22, en accord avec le nouveau gouvernement, les troupes françaises évacuent Athènes et se dirigent vers le front. Là comme ailleurs en dehors des attaques d'infanterie, l'artillerie maintient la pression et les aviateurs alliés bombardent les campements ennemis tout le long du front...

Au Moyen-Orient.

Dans le désert du Néguev. Depuis plusieurs mois, le futé Laurence d'Arabie propose au roi Fayçal de se lancer à la conquête d'Akaba, plutôt que de Messine, trop bien défendue à son goût. En soi, le port d'Akaba n'a pour les Turcs qu'une importance mineure, il est d'ailleurs à peine défendu par une faible garnison et un fort. Pour les forces anglo-bédouines, il en est tout autrement. Situé à l'extrême nord du golfe du même nom, il pourrait devenir le grand port de ravitaillement qui fait cruellement défaut aux arabes. Les Turcs ont sécurisé la ville d'une agression amphibie, la seule possible à leurs yeux, car à l'ouest c'est la Palestine qu'ils occupent, et au nord-est c'est le désert du Néfoud, considéré par tous comme impossible à faire traverser par une armée selon les codes militaires habituels. C'est justement là que Laurence veut attaquer, même ses lieutenants bédouins sont sceptiques. Alors, Laurence se retourne vers Auda ibu Tayi, le chef de la tribu bédouine des Howeitat, qui lui, croit au projet et lui donne une large troupe de cavaliers admirablement bien préparés pour cette expédition. Partis en mai pour ne pas trop se faire remarquer, les Bédouins progressent en ordre dispersé vers la région du Wadi Sirhan, occupée par la tribu des Rualla. Pour pouvoir se ravitailler et s'assurer de leur loyauté, Auda donne 6 000 livres en or à leurs chefs. Cela lui permet d'utiliser leurs oasis pour se dissimuler dans cette phase de regroupement. Dans le même temps, Laurence mène des actions plus au nord, sur le chemin de fer du Hedjaz, détruisant un pont ferroviaire à Baalbek, pour faire croire aux Turcs que la cible principale du moment est Damas ou Alep. Puis, toute la force expéditionnaire maintenant rassemblée se met en route dans le désert du Néfoud pendant les grosses chaleurs. Malgré la canicule, marchant de nuit, les Bédouins ont plus de pertes à cause des morsures de serpents ou de scorpions que des quelques attaques de mercenaires à la soldes des Turcs. Début juillet, les Turcs éventent la ruse et envoient 1 600 cavaliers supplémentaires vers Akaba, mais il est trop tard. Le 3 juillet, un groupe d'assaillants attaque et prend la forteresse ottomane d'Abou el Lissal, à mi-chemin entre Akaba et la ville de Ma'an. Mais un bataillon d'infanterie turc la reprend le 5, en massacrant au passage les bédouins qui campent à proximité. Le 6, furieux du massacre, Auda lance personnellement une attaque contre les troupes turques. La charge est rapidement victorieuse, la résistance turque faible, mais les Arabes massacrent par pure vengeance plusieurs centaines de soldats, avant que leurs chefs puissent les en empêcher. Au total, 300 Turcs sont tués et 160 faits prisonniers, pour seulement 2 tués et quelques blessés chez les Bédouins. Dans la mêlée, Lawrence tue son dromadaire en lui tirant un coup de pistolet dans la tête et Auda frôle la mort car six balles traversent ses vêtements sans l'atteindre. Par contre, sa jument est tuée et une balle fracasse ses jumelles, ce qui lui sauve la vie. Dans le même temps, des navires britanniques se positionnent au large d'Akaba et bombardent le fort. Lawrence et Auda reçoivent le renfort de 2 000 bédouins qui arrivent de Lissal avec le chérif Nasir à leur tête. Toute la force expéditionnaire contourne alors les lignes défensives d'Akaba, et les Bédouins obtiennent rapidement la reddition des troupes ottomanes du fort presque totalement détruit par les tirs des navires...

Après cette victoire, Laurence et quelques hommes traversent en 48h les 260 kilomètres de désert entre Akaba et Suez à dos de chameaux spécialement entrainés pour la course. Là, il rencontre l'amiral britannique Rosslyn Wemyss et le convainc d'acheminer rapidement du ravitaillement pour les Bédouins qui sont isolés dans la ville nouvellement conquise. Au Caire deux jours après, il rencontre le général Edmund Allenby qui vient de remplacer le général Archibald Murray. A cet officier supérieur strictement métropolitain à la carrure impressionnante, le frêle officier subalterne qu'est Laurence lui explique longuement que, dans le désert, l'artillerie ne sert strictement. Il lui dit "donnez-moi des provisions, des armes avec 200 000 pièces d'or pour garder mes Bédouins et je gagne la bataille du désert". Allenby se laisse charmer et lui promet qu'il fera tout ce qui est en son pouvoir pour l'aider. Ce ne seront pas là des paroles vaines et le port d'Akaba va devenir la porte de ravitaillement des armées bédouines dans tout le Moyen-Orient...

Sur les autres fronts de la péninsule arabique, en Palestine, comme en Mésopotamie, l'été se passe sans rien de sérieux chez les Britanniques ou les Turcs...

Mais il est temps de revenir à Barbentane. C'est l'Écho d'août et septembre 1917 qui donne des nouvelles de juin et juillet. C'est la photo d'un groupe de prisonniers en Allemagne qui fait la une de l'Écho. Henri Lautier, "le sympathique gérant du Café du Midi"(9) pose avec 3 de ses collègues d'infortune (dont un en uniforme britannique). Dans le premier article de la page suivante, Henri Lautier raconte son périple depuis qu'il a été fait prisonnier le 25 avril 1915 dans les Vosges. Il est actuellement au camp d'Althen-Grabow qui est situé sur la commune de Dörnitz en Saxe-Anhalt(10). Hélas pour lui, il ne peut assister aux obsèques de son père décédé justement le 1er août (à noter que dans la vie paroissiale, son père est enterré le 22 août, ce qui laisse supposer une erreur de date lors de l'impression)...

Le dimanche 10 juin, jour de la Fête-Dieu, le conseil municipal escorte le dais lors de la procession dominicale. Le lendemain, le curé Aimé Guigues est obligé de s'aliter de nouveau. Il repart à Marseille se faire opérer une nouvelle fois, et revient au village le 22 juillet complètement rétabli. Il y a gagne le surnom de "l'homme perdu" par son médecin, mais aussi celui de "roi de la prostate" par un autre opéré. En son absence, il est remplacé par l'abbé Jean-Baptiste Lunain(11) et le père Hilaire(12)...

Comme à son habitude, le curé Guigues écrit des poèmes sur son lit d'hôpital. En page 5, c'est "Hommage au Maître", poème donné en même temps qu'une belle édition de Mireille au chirurgien Jean-Louis Escat(13) qui l'a opéré plusieurs fois à la clinique Bouchard à Marseille...

En l'absence du curé, c'est Joseph Ardigier, maire par intérim, qui organise la tournée du Culte et des Écoles libres. Tout le territoire communal a été visité entre le 17 et le 28 juillet pour une campagne fructueuse qui, selon l'Écho fait vivre la paroisse et les trois écoles libres du village. A l'Assomption, c'est l'abbé Arnaud d'Agnel, aumônier dans un lycée de Marseille, savant et écrivain, qui officie pour les cérémonies. Pour la Saint-Roch, il a fait un temps splendide. Les 4 nouvelles prieures de Sainte-Marguerite et les 10 nouvelles prieures de Sainte-Philomène sont nommément citées. En page 8, une drôle de lettre de l'abbé Joseph Mascle qui écrit de Monastir en Serbie et rend hommage au pouvoir destructeur des canons...

Il n'y aucun tué barbentanais pendant le mois de juillet...

Dans le courrier militaire, Joseph Moucadeau, blessé pour la 4ème fois, écrit de Salonique ; Fernand Barral, anciennement en Serbie, marche beaucoup sans savoir où il va ; Louis Bourges fait son petit travail d'infirmier ; Louis Ayme se trouve dans une région riche mais où il ne trouve rien à manger et, après 10 jours passés à Athènes, il repart en train vers les tranchées ; Raoul Saint-Michel se plaint de marcher beaucoup et souvent le ventre vide, par 60° ; Jean-Marie Auzépy croit en un prochain miracle, et en passant à cheval, il a salué le clocher de Fr... [Fromereville je suppose], il loue l'aviation qui réalise des tours d'adresse d'une grande témérité ; Jean Brémond est dans un calme relatif ; Henri Rouqueirol est passé de l'Alsace à l'enfer de Craonne ; Sébastien Fauque échappe à l'explosion de deux grenades qui lui ont occasionné 14 blessures ce qui a entraîné deux opérations ; François Veray, en convalescence, garde des chèvres ; le caporal Jean Fontaine dans l'Aisne se sent trahi par la défection des Russes ; le caporal Louis Petit, qui est sous la pluie, se "languit" que la guerre cesse ; Jean Bruyère est content de se retrouver en caserne ; Marius Escalier a travaillé pendant 50 heures sans manger ni dormir sous des marmites boches de calibre 77 ; Louis Ayme a quitté la Macédoine pour revenir en Grèce où les gens ne cessent de mendier du pain qu'il ne peut leur donner car lui même en réclame ; Etienne Bernard, dit Dodo, considère que le pays des dattes ne vaut pas le plus mauvais petit patelin français ; de Belfort le caporal abbé Revest, au vu des nombreux combats aériens, aimerait devenir homme-oiseau ; Jean-Marie Ginoux étouffe de chaleur ; au Maroc Léopold Michel subit 50°, sirocco, tempêtes de sable, sauterelles, punaises et puces ; Etienne Bernard est au repos dans la Haute-Saône après les terribles épreuves du Chemin des Dames, mais c'est l'abbé Joseph Mascle(14) qui a peur que, de retour à la vie sacerdotale, il ait l'âme endurcie par les épreuves subies...

Dans la vie paroissiale, 4 baptêmes, 5 enterrements dont celui de Louis Glénat, époux de Blanche Gruzzu, ils habitaient la belle maison en face du Monument aux Morts. Mais aussi 4 mariages, signe évident que la vie sociale reprend malgré les évènements...

La dernière page de l'Écho est une prière non signée...

Guy

Le 14 juillet à Paris, soldats écossais et australien parés pour le défilé

Prisonniers austro-hongrois en Sibérie (photo autochrome)

Prisonniers allemands à la Cote 304 au nord de Verdun

Poilus prêts pour le défilé du 14 juillet

Le colonel Charles Stanton au cimetière Picpus à Paris lors de son fameux discours

C'est l'Écho d'août-septembre 1917 qui relate les événements de juillet 1917...

Théâtre aux armées, on prépare les festivités du 14 juillet

Répression des manifestations de juillet à Petrograd

Zoulous sud-africains exécutant une danse guerrière dans l'Est-Africain

Sous-marin allemand UC-61 après son sabordage à Wissant dans la Manche

A Paris, soldats français avant le défilé du 14 juillet montrant leur petit drapeau US

Mutins russes au camp de la Courtine dans la Creuse

Soldat britannique qui teste une armure pare-balles

Affiche de propagande

Enterrement d'un officier allemand en France

Soldats indiens de religion sikh dans la Somme (photo autochrome)

Troupes chinoises républicaines à l'assaut de la Cité interdite à Pékin

Juillet 1917 - Dans Le Monde en Guerre

 

La Paix en Juillet 1917. Le 24 juillet, sans en faire part au pape, le nonce apostolique de Benoît XV à Munich, Eugenio Pacelli, futur pape Pie XII, fait une proposition de paix au nouveau chancelier allemand Georg Michaelis. Elle prévoit la restitution des colonies allemandes, l'évacuation de la Belgique et des territoires français occupés. Cette nouvelle résolution reprend en grande partie les propositions de paix qui ont échoué entre Charles Ier et les Alliés. Eugenio Pacelli espère que, venant de l'Église catholique, elle sera mieux acceptée...

Dans le Monde Politique.

En France. Début Juillet, le camp d'entraînement de Champlieu dans l'Oise reçoit ses premiers chars Renault FT-17 pour comment l'instruction des équipages. Le 1er juillet, est publiée la circulaire du ministre français de l'Armement, Albert- Thomas, sur le travail des femmes. Elle stipule "L'intérêt national exige qu'elles [ndlr : les femmes au travail] soient utilisées rationnellement et avec de grands ménagements, car elles représentent une réserve d'avenir qui doit être sauvegardée"...

Le 4, c'est le grand jour de l'Independence Day en France. Partout où elles sont présentes, les troupes étatsuniennes qui viennent juste de débarquer, assurent un défilé (Saint-Nazaire, Paris, Bordeaux). La foule fait un triomphe aux Sammies qui, s'ils n'ont pas encore remporté de batailles, font déjà la conquête de toutes les jeunes filles françaises esseulées et elles sont nombreuses. A Paris, une imposante prise d'armes a lieu dans la cour des Invalides. Le général John Pershing, qui n'a pas l'éloquence d'un orateur, laisse au colonel Charles Stanton le soin de faire un hommage au marquis Gilbert du Motier de La Fayette qui est enterré au cimetière Picpus. A la fin de son discours, Stanton lance un vibrant "La Fayette, nous voilà" !!! En un éclair cette phrase va faire la une des journaux du monde entier et elle est encore célèbre aujourd'hui…

Le 7, à l’issue de son 7ème comité secret, le parlement "est résolu à assurer le plein exercice de son contrôle sur tous les services de l’armée sans ingérence dans les opérations militaires" et, sous cette condition, il vote la confiance au gouvernement Ribot. Par suite de récoltes déficitaires en blé et des difficultés dans les transports, des restrictions sont apportées à la consommation du pain. L'allocation principale aux familles des mobilisés est augmentée de 25 centimes. Le 13, c'est la création de la médaille de la Reconnaissance française qui sera attribuée aux femmes et aux civils volontaires pour reconnaître leur mérite ou les services rendus…

En France, au front comme dans toutes les villes, le 14 juillet est célébré dans un grand enthousiasme. A Paris, la fête des drapeaux est particulièrement brillante. Le 17, c'est la première réunion de la commission d'enquête pour cerner les causes et les responsabilités de l'échec de l'offensive d'avril au Chemin des Dames...

Représentation du théâtre aux armées quelque part sur le front français le 14 juillet

Soldats allemands en Russie

Un des célèbres tableaux du peintre britannique John Singer Sargent qui représente les colonnes de gazés à l'ypérite dans les Flandres (décembre 1917)

L’Écho de Barbentane d'août et septembre 1917

Premières conquêtes US en France

Alexandre Kerenski sur le front russe

Mitrailleurs allemands dans les Flandres

Récolte de pommes de terre en Ukraine

Force bédouine dans le désert du Néguev

Barbier à l'œuvre quelque part en France (photo autochrome)

Le lieutenant André Mornet procureur au procès de Mata-Hari

A l'hôpital britannique de Camiers dans le Pas-de-Calais, visite de la Reine Mary

Remise de la Légion d'Honneur à Georges Guynemer au centre de la photo

Automitrailleuse russe sur le front de l'Est

Acheminement d'un canon dans les montagnes roumaines

Tranchée turque à Akaba

A Marseille et pendant plusieurs jours, se déroule en grand secret le procès de l'espionne suisse Marie-Antoinette Avvico (ou Awico), plus connue sous le nom de Régina Diana(1). Pour sauver sa peau, Marie-Antoinette répète ses sentiments francophiles et balance rapidement ses commanditaires "ils jouent aux cartes chaque lundi à L’Aiglon, à Genève". Rien n’y fait. Pendant qu’elle vend ses bijoux pour payer un avocat, sa voisine de cellule en rajoute. Sa mère tente également de contacter le consul d’Allemagne à Genève, tout cela en vain. Le procès se termine le 16 par sa condamnation à mort. Un recours en grâce est aussitôt demandé au Président de la République...

Le 22, lors de la clôture du comité secret du Sénat, Georges Clémenceau accuse le ministre de l’Intérieur Louis Malvy d’indulgence à l’égard des "défaitistes", il lui reproche aussi de "trahir les intérêts de la France". C'est le début d'une cabale montée par l'extrême droite dirigée par Léon Daudet. On reproche surtout à Malvy de servir les intérêts des ouvriers au détriment de ceux des patrons. Pêle-mêle, on l'accuse d'être l'amant de Mata-Hari, le responsable de l'échec du Chemin des Dames, de fournir des renseignements à l'Allemagne et même d'être l'instigateur des mutineries de mai. Bien sûr, tout cela est totalement faux, mais il finira par être traduit devant la Haute Cour pour trahison en août 1918...

Le 24 à Paris, c'est l'ouverture du procès à huis clos de l'espionne Margaretha Zelle, dite Mata Hari, devant le 3ème conseil militaire. L’accusation est confiée au lieutenant André Mornet(2). Les juges doivent décider si elle est bien l'agent H 21, coupable "d'espionnage et d'intelligence avec l'ennemi". Son défenseur, Maître Édouard Clunet, un ancien amant, est un expert réputé du droit international, mais malheureusement peu familier des effets de manches d'une cour criminelle. Elle est même, lors du procès, abandonnée par son amoureux Vadim Maslov qui la qualifie tout simplement "d'aventurière". Après 3 jours d'audience dans un procès bâclé et sans véritable preuve, la célèbre danseuse est condamnée à mort pour espionnage. Une demande en grâce est aussitôt demandée au président de la République Raymond Poincaré...

Le 25, se tient à Paris une conférence interalliée. Les Britanniques veulent retirer au plus vite leurs troupes des Balkans car pour eux, les soldats grecs y seront plus efficaces. Ils sont tentés par un débarquement au Liban, à Beyrouth ou Tripoli, et comptent y associer les troupes françaises. Le général Ferdinand Foch qui est consulté sur ce point est très réticent, le cuisant échec des Dardanelles étant toujours présent. La conférence se termine par un statu quo pour au moins tout l'été...

Le 27, le Parlement adopte la loi qui instaure le statut particulier de "Pupille de la Nation" à tous les orphelins de guerre. Ce statut est accordé aux enfants dont le père, la mère ou le soutien de famille est décédé du fait de la guerre ou de ses suites, ou se trouve dans l’incapacité de travailler. C'est l'une des plus grandes lois sociales de la guerre(3), plus d'un million d'enfants vont en bénéficier durant ce conflit, soit un à deux élèves dans chaque classe française. Le même jour, entre en vigueur la carte de rationnement sur le charbon. Le 31, le parlement poursuit la réforme fiscale. A compter de 1918, en plus de l'impôt sur le revenu et des impôts locaux (assis sur les portes et les fenêtres), 5 nouveaux impôts sont créés : sur les propriétés bâties et non bâties, sur les bénéfices des propriétés agricoles, les bénéfices des professions non commerciales et les bénéfices industriels et commerciaux...

En Grande-Bretagne. Le 17 juillet, devant le développement d'un sentiment anti-allemand de plus en plus virulent, causé par les bombardements aveugles des villes du Royaume-Uni, la famille royale britannique décide de changer de nom. Le roi Georges V abandonne son nom de famille d'origine allemande -Saxe de Cobourg-Gotha- pour porter dorénavant celui de Windsor. Il en est de même pour les cousins de la famille royale, les Battenberg, dont le nom sera désormais Mountbatten. Le 30, répondant à une question sur les buts de guerre des Alliés à la Chambre des communes, le ministre des Affaires étrangère, Lord Balfour, soutient la "légitimité des droits de la France sur l'Alsace et la Lorraine". Le même jour, Winston Churchill est nommé ministre de l'Armement par le Premier ministre David Lloyd George. A ce poste, il veille à l'approvisionnement des armées et continue à plaider pour l'utilisation des chars qui commencent à se montrer efficaces. Le 23, à la Chambre des communes, Lloyd George déclare "une paix est possible avec le peuple allemand, mais pas avec son régime autoritaire"...

Aux États-Unis. A Washington, le département de la guerre fait connaître qu'il a terminé l'équipement complet de l'armée en armes individuelles, munitions, uniformes et accessoires. Il assure que le ravitaillement est maintenant assuré pour un million d'hommes. Le 15, la Chambre des représentants revoit les demandes militaires à la baisse. Au lieu des 100 000 avions réclamés pour garantir la suprématie aérienne alliée sur le front de l'ouest, le Parlement ne vote des crédits que pour la construction de 22 000 machines volantes au grand désappointement des militaires. Par crainte d'un détournement de marchandises au profit de l'Allemagne, le président Woodrow Wilson donne l'ordre de ne plus exporter, sans autorisation spéciale vers les pays neutres européens, une série de marchandises parmi lesquelles figurent : les céréales, les fourrages, la viande, les combustibles, les engrais, la fonte et l'acier. Un important accord est conclu entre le haut commissaire de la République française et le gouvernement US. Cette convention a pour but d'assurer la construction aux États-Unis, le transport et l'installation très rapide en France, d'un important matériel ferroviaire pour suppléer et remplacer le matériel français qui arrive en limite d'utilisation. Alors l'US Army passe la commande de 2 200 locomotives, des 140 G simples et robustes, au constructeur Baldwin(4). Ces machines sont bien rodées et déjà utilisées par les Britanniques au Royaume-Uni. Des milliers de wagons sont aussi prévus. Tout ce matériel va arriver en pièces détachées et sera réassemblé par le génie US dès son déchargement des bateaux, directement sur les ports...

Le 27, cinq Havilland DH-4 arrivent aux USA. Même s'ils sont de conception dépassée, ils doivent servir de modèle aux constructeurs étasuniens, ce qui met en fureur les industriels français et britanniques très hostiles à ce transfert de technologie à peu de frais...

En Russie. Le gouvernement provisoire décide de ne pas intervenir en Grèce afin de laisser les Hellènes conduire leur politique intérieure et extérieure, mais il blâme l'intervention des Alliés. Devant la pagaille qui s'installe dans l'armée et afin de faire revenir la discipline, le ministre de la Guerre, Alexandre Kerensky, décide de créer auprès de chaque commandant en chef la fonction de commissaire militaire du gouvernement. Ce "commissaire politique" a pour fonction de donner une solution uniforme à toutes les questions politiques qui surgissent dans l'armée et la marine. A partir du 16 et jusqu'au 20 juillet se déroulent des manifestations d'une ampleur considérable, plus de 500 000 personnes à Petrograd, qui resteront dans l'histoire sous le nom "Les Journées de Juillet". Devant l'échec de l'offensive Kerensky, de nombreux soldats de la garnison de Petrograd refusent de partir en renfort pour le front. Après une première manifestation le 16, ils sont rejoints par les ouvriers et les marins de Kronstadt. Au cours des manifestations suivantes, ils réclament la démission immédiate du gouvernement provisoire et le transfert du pouvoir au Soviet de Petrograd. Les protestations, jusque-là pacifiques, se transforment en violentes émeutes. Les soldats loyalistes tirent sur la foule en faisant des morts. Alors que Lénine est parti se reposer en Finlande(5), le parti bolchevick est partagé entre soutien aux émeutiers en risquant une défaite, ou bien s'abstenir, et dans ce cas perdre la confiance des manifestants. Finalement, les bolcheviks se joignent aux manifestations, mais ils ne poussent pas leur avantage. Le 18, lorsqu'il revient de Finlande, Lénine s'adresse aux manifestants du balcon de l'hôtel particulier de la Kschessinska, mais sans enthousiasme. En interne, les bolcheviks s'opposent à cette insurrection, estimant qu'il est encore trop tôt pour renverser le gouvernement en place. De plus, ils ne sont majoritaires qu'à Petrograd et Moscou, tandis que les partis socialistes modérés conservent une influence importante dans le reste du pays. Ils préfèrent laisser le gouvernement aller au bout de ses possibilités afin qu'il puisse démontrer son incapacité à gérer les problèmes du peuple : la paix, la journée de 8 heures et la réforme agraire. Lénine estime que, bien que les manifestants de Petrograd se soient radicalisés, le pays dans son ensemble n'est pas prêt pour la révolution. Les émeutiers seraient rapidement vaincus s'ils tentaient de s'emparer seuls du pouvoir à Petrograd. Le gouvernement provisoire, effrayé du soutien qu'apporte la Garde rouge aux bolcheviks, fait venir des troupes cosaques dans la capitale. Le 19, Alexandre Kerenski, le ministre de la Guerre que les journaux français appellent le "Danton russe", est victime d'une tentative d'assassinat. Le 20, il prend les pleins pouvoirs au gouvernement provisoire en évinçant le prince Gueorgui Lvov. Il dissout le comité central de la flotte de la Baltique et interdit la Pravda. Il ordonne d'arrêter les dirigeants bolcheviques sous l'accusation d'incitation à la révolte avec l'appui financier des Allemands. Lénine, ainsi que Grigori Zinoviev, fuient et entrent dans la clandestinité en Finlande. D'autres dirigeants bolcheviks sont arrêtés et jetés en prison, entre autres Lev Kamenev, Léon Trotsky et Anatoli Lounatcharski. Le 22, Kerenski déclare son gouvernement "de Salut public" et s'attribue tous les pouvoirs pour maintenir l'ordre public et la discipline dans les armées. Des cours martiales sont instaurées. Composées de trois officiers et de trois soldats, elles siègent à la tête de chaque armée et sont chargées de punir les traîtres à la patrie. En Conseil des ministres, il est un temps envisagé de transférer la capitale et les pouvoirs centraux à Moscou. Finalement, le gouvernement décide de rester à Petrograd...

Le 18, des indépendantistes ukrainiens annoncent la formation d'un gouvernement provisoire à Kiev. En Finlande, les indépendantistes proclament l'indépendance du pays. En réaction, le gouvernement provisoire russe ordonne la dissolution du Parlement finlandais...

Le 25, Joseph Noulens, l'ancien ministre des Finances qui a créé l'impôt général sur le revenu en 1914, succède à Maurice Paléologue comme ambassadeur de France en Russie...

En Allemagne. La Commission principale du Reichstag entend le secrétaire d'État aux Affaires étrangères, Arthur Zimmermann, ainsi que le secrétaire d’État à la Marine, Édouard von Capelle. Ils affirment très énergiquement, que "la guerre sous-marine fait des progrès heureux et décisifs", ce qui est un pur mensonge. Le 6 au Reichstag, le député du Zentrum (aile gauche du parti catholique), Matthias Erzberger(6), qui revient d'un séjour au Vatican où il a rencontré Benoît XV, dresse un bilan sévère de la stratégie militaire, et suggère l’ouverture de négociations de paix. Les affaires s'enveniment entre la caste des militaires prussiens et le Chancelier Théobald von Bethmann-Hollweg. Ce dernier, progressiste et avec l'appui de la majorité du parlement, gauche et droite associées, promeut depuis plusieurs mois l'évolution du système politique vers une monarchie parlementaire avec l'attribution du droit vote au peuple au moyen du suffrage universel. Il est de ce fait considéré comme un défaitiste par tous les tenants d'un Empire puissant. Son argumentaire est si fort que le Kaiser finit par signer le décret autorisant le suffrage universel le 11 juillet. Le lendemain, le maréchal Paul von Hindenburg soutenu par le général Erich Ludendorff, menace de démissionner si le Kaiser ne renvoie pas immédiatement Bethmann-Hollweg. Contre sa volonté, ainsi que celle du Kronprinz (son fils), Guillaume II finit par se résoudre à se séparer de son chancelier avec cette phrase d'ultime respect "Je dois renvoyer l'homme qui dépasse tous les autres de deux têtes". Le 15, sur proposition des militaires prussiens, Georg Michaelis est nommé Chancelier à la place Bethmann-Hollweg. Juriste de formation, catholique fervent, Michaelis est un fonctionnaire capable, mais pas le rusé politicien dont l'Allemagne a grandement besoin. Le 19, le parlement adopte à la majorité une résolution en faveur d'une "paix sans annexions" qui condamne explicitement les conquêtes territoriales. Cette nouvelle initiative d'Erzberger est appuyée par le parti social-démocrate et le parti populaire progressiste. Cette résolution reste sans effet, le Reichstag ne pouvant défaire l'exécutif dominé par les leaders militaires, Hindenburg et Ludendorff. Au cours des débats et devant son impuissance, Michaelis se met à dos tout le Parlement dès son entrée en fonction. Le 20, le Reichstag accorde un nouveau crédit de guerre d’un montant de 15 milliards de marks au gouvernement. Le 25, les marins de Wilelmshafen créent en grand secret une organisation révolutionnaire destinée à déclencher une insurrection en cas d’insuccès de la conférence socialiste internationale prévue pour septembre à Stockholm...

En Autriche-Hongrie. Le 2 juillet, l'empereur allemand Guillaume II et l'empereur d'Autriche-Hongrie, Charles Ier avec leurs chefs d'état-major respectifs se réunissent dans un grand sommet de la guerre à Vienne. Bien informés de la future offensive d'été sur le front russe, ils mettent au point une tactique appropriée. En premier, là où se déroulera l'attaque principale, les armées des Empires centraux effectueront un repli stratégique pour laisser s'engouffrer le plus de soldats possible. Puis les ailes nord et sud effectueront une poussée pour encercler les armées russes qui se seront engouffrées au centre afin de les détruire l'une après l'autre. Sur le front de l'ouest et le front italien, aucune attaque d'envergure n'est programmée pour l'été, ce qui n'empêche pas les attaques locales pour maintenir la pression. La priorité du moment reste l'anéantissement des armées russes. Puis, quand cela sera fait, les armées pourront se retourner vers l'ouest avant que les renforts étatsuniens ne soient opérationnels. Après trois ans d'une guerre meurtrière, on revient au plan Schlieffen-Moltke d'avant 1914...

En Italie. Le 5 juillet, l'armée crée des unités de troupes d'assaut dites "Reparti d'assalto", plus connues sous le nom d'Arditi. Ces soldats sont spécialement entrainés et armés pour mener des coups de main dans les tranchées ennemies. A la fin du mois, le gouvernement crée un Comité de Guerre...

En Belgique Libre. Le 11 juillet, le roi Albert Ier reçoit une lettre ouverte d'un groupe de soldats flamands qui se plaignent de discrimination linguistique...

Au Portugal. Le 13 juillet dans le village de Fatima c'est l'effervescence. Une foule de 4 à 5 000 personnes accompagne, en récitant des prières, les trois jeunes bergers, Lucie et ses deux cousins François et Jacinthe, aux prés de Cova da Iria. Selon les témoins, à un moment la lumière diminue et Lucie dit tout haut "Notre Dame arrive". S'engage alors une discussion entre Lucie et la vision que seuls les jeunes bergers voient et entendent. Après, Lucie et ses cousins racontent "La vision leur a donné rendez-vous au même endroit le 13 août, et elle les implore de prier tous les jours pour obtenir la paix du monde et la fin de la guerre. Après, au mois d'octobre seulement, elle leur dira qui elle est"…

En Pologne occupée. Le 2 juillet, en exigeant plus d’indépendance, l'homme fort polonais Josef Pilsudski quitte le Conseil d’État provisoire institué par les Austro-Hongrois et les Allemands en novembre 1916. Cet activiste indépendantiste est le créateur des légions polonaises qui combattent contre les Russes aux côtés des Allemands depuis 1914. Mais, pressentant la future décomposition de l'armée tsariste, il se retourne maintenant contre les Empires centraux. Le 21, les Allemands l'arrêtent et l'incarcèrent à la prison de Magdebourg. Cet emprisonnement provoque des remous à Varsovie et accroit sensiblement son prestige auprès de ses compatriotes. Cette arrestation contribue à faire de Josef Pilsudski le nouveau leader de la Pologne indépendante. Du coup, les soldats polonais sous les uniformes germano-austro-hongrois commencent à déserter pour rejoindre la partie de la Pologne ex-russe devenue libre...

En Grèce. Le 2 juillet, le Royaume de Grèce déclare la guerre à l'Empire ottoman, à l'Empire allemand, à l'Autriche-Hongrie et au Royaume de Bulgarie. Depuis la levée du blocus, les Grecs recommencent à s'alimenter à peu près convenablement, ce qui ruine toutes les velléités d'insurrection des loyalistes. Pour une entrevue avec le nouveau roi Alexandre, le général Maurice Sarrail fait une entrée remarquée dans Athènes. La foule, sans être enthousiaste, elle n'est pas vraiment hostile, alors qu'il y a à peine un mois il était encore voué aux gémonies...

Serbes en Exil. Le 20 juillet, c'est la déclaration de Corfou. Elle est conclue entre le gouvernement serbe en exil et le Comité yougoslave représentant les Slaves du sud de l’Empire austro-hongrois. Elle prévoit pour la fin de la guerre la création d’une monarchie parlementaire constitutionnelle et démocratique, avec la dynastie serbe des Karadjordjevic à sa tête. C'est l'acte de naissance de ce qui deviendra la Yougoslavie en 1945...

Au Siam. Le 22 juillet, malgré les réticences de certains membres du gouvernement royal, le roi Vajiravudh (Rama VI) déclare la guerre aux Empires centraux. Cela lui permet de réquisitionner 11 navires allemands appartenant à la compagnie "North German Lloyd" afin de doter le pays d'une petite flotte de transport maritime. Par la suite, le Siam envoie en Europe une faible force expéditionnaire, sous le commandement du général Phya Pijaijarnrit. Elle est composée de 1 284 volontaires et comporte un détachement de 95 pilotes, une unité de transport, une unité médicale et une unité de maintenance(7)...

En Espagne. La situation est très confuse et le pays s'enfonce dans une crise durable. L'agitation sociale secoue toutes les grandes villes du pays : Valence, Bilbao, Barcelone et même Saint-Jacques-de-Compostelle. Les classes laborieuses réclament de meilleurs salaires. Comme la censure est féroce, les rumeurs se transforment très rapidement en quasi-vérités, même la rumeur infondée du déménagement du Parlement à Barcelone fait réagir tout le pays. Pour régler le problème, le ministre de l'Intérieur réunit les principaux directeurs de journaux, et décide de supprimer la censure. Elle sera désormais confiée aux journalistes eux-mêmes. Le ministère de l'Intérieur limitera son contrôle à la critique de chaque journal. Mais cela ne règle en rien les problèmes sociaux...

Au Brésil. Depuis mai, la région de Sao-Paulo, là où est installée la presque totalité des industries du pays, est secouée par de nombreuses grèves. Toutes sont motivées par des conditions de travail très pénibles, plus de 10h00 par jour, y compris pour les femmes et les enfants, et aussi par une baisse généralisée des salaires. En moins de deux ans, le salaire moyen passe de 300 milreis par semaine avant la guerre à 90 milreis depuis le début de l'année. Par l'ampleur du mouvement, un tiers des travailleurs est en grève, la région est totalement paralysée. La région, l'état et le patronat sont contraints de passer des compromis avec les syndicats le 14 juillet. Pour la première fois, les travailleurs du pays, en général tous d'anciens esclaves, sont écoutés et prennent conscience de l'intérêt de la lutte des classes...

En Chine. Le 1er juillet, c'est le bref épisode de la "Restauration mandchoue de 1917". Le parti des généraux, mené par le général mandchou et royaliste Zhang Xun qui vient de prendre Pékin avec seulement 5 000 hommes, renverse la République et restaure la monarchie. Le dernier empereur de la dynastie Qing, Puyi, est remis sur le trône. Le président de la République, Li Yuanhong, parvient à fuir. Il se réfugie d'abord à la légation française puis à l'ambassade japonaise. Avant son départ, il nomme Feng Guozhang président par intérim, et Duan Qirui, l'homme fort de la République, comme Premier ministre. Cette révolution de palais, laisse les provinces indifférentes, mais Duan prend immédiatement le commandement des troupes républicaines stationnées près de Tianjin. Le 5, ses troupes prennent le tronçon de voie ferrée de 40 km entre Pékin et Tianjin. Le même jour, le général Zhang reçoit des renforts mandchous. Mais Zhang fait face à d'énormes obstacles puisque presque toute l'armée du nord-est du pays s'oppose à lui. Il est ainsi forcé de se retirer après la prise de contrôle par les troupes républicaines des deux principales lignes ferroviaires de la capitale. Le neuvième jour de la restauration, le général Zhang démissionne de ses fonctions, mais il reste commandant des troupes installées dans la capitale maintenant encerclée par les Républicains. Le 12, les troupes républicaines s'emparent rapidement de Pékin et se lancent à l'assaut de la Cité interdite. Les troupes royalistes vite vaincues se retranchent dans le temple du Ciel. Le général Zhang n'a d'autre solution que de se réfugier dans le quartier des légations étrangères. Après sa fuite, les troupes royalistes demandent un cessez-le-feu, qui est immédiatement accepté. Le président Li refuse de revenir à son poste et démissionne. Le pouvoir revient alors à son vice-président, Feng Guozhang...

Dans le Monde des Sciences, des Arts, des Lettres et du Sport. Le 4 juillet à Cordoue (Espagne) c'est la naissance de Manuel Laureano Rodríguez Sánchez dit "Manolete". Célèbre toréro à partir des années 1933, il fait entrer l'art tauromachique dans l'ère moderne. Grièvement blessé le 28 août 1947 par un toro(8) de Don Eduardo Miura, il décède le lendemain à l'hôpital de Linarès (Espagne). Le 5, est tué à Villers-au-Bois dans le Pas-de-Calais, l'athlète canadien de 36 ans, Percival Molson. Né le 14 août 1880 à Cacouna au Québec, meilleur athlète 3 ans de suite à son université, il devient célèbre en tant que hockeyeur et tennisman. Le stade de l'Université McGill à Montréal porte maintenant son nom. Le 18 à Cayenne (Guyane française), c'est la naissance d'Henri Savaldor. Crooner, chanteur, guitariste, compositeur et humoriste apprécié de tous, il débute sa longue carrière en 1930 et la poursuivra jusqu'à son décès à Paris le 13 février 2008. Le 24 à Nice, c'est la naissance d'Ange Betti, dit Henri Betti. Pianiste et compositeur français, on lui doit la musique de nombreuses chansons populaires de l'après-guerre 39-45. Il décède le 7 juillet 2005 à Courbevoie (Hauts-de-Seine). Le 27 à Prétot-Vicquemare (Seine-Inférieure, maintenant Seine-Maritime), c'est la naissance d'André Raimbourg, dit Bourvil. Déjà célèbre pour ses pitreries sur les bancs de l'école où il s'amuse à parodier Fernandel, il deviendra un artiste reconnu comme musicien, chanteur, humoriste et acteur français. C'est l'homme de cœur de nombreuses femmes, jeunes ou moins jeunes sur lesquelles il exerce un certain charme. Atteint d'un cancer du sang, il disparaît après une longue agonie le 23 septembre 1970 à Paris.

 

Sur le Front des Combats.

En France. En ce mois de juillet, aucune grande offensive n'est lancée par les belligérants. Toutefois, les escarmouches sont très nombreuses pour des objectifs très locaux...

Dans le secteur britannique qui va de la mer du Nord au sud d'Ypres, les combats se poursuivent avec moins d'intensité que le mois précédent. Après la bataille de Messines, les soldats de sa Gracieuse Majesté préparent la prise de Passchendaele. L'objectif du général Douglas Haig, le commandant en chef du BEF (British Expeditionary Force), reste le même depuis mai : essayer d'atteindre Bruges pour détruire les bases sous-marines allemandes qui déciment la flotte marchande du pays. Tout le mois va être consacré à la préparation de la prise de la crête de Passchendaele située entre Westrozebeke et Broodseinde. Pour Haig, il faut que la crête soit britannique avant la fin août car, après, commence la saison des pluies qui paralyse tous les mouvements d'importance dans cet immense marécage qu'est la Flandre. Alors, on s'active pour lancer l'assaut au plus tard à la fin du mois...

Les Allemands, s'ils ne peuvent arrêter les préparatifs, lancent des attaques avec un nouveau gaz dans le but de paralyser à peu de frais les soldats britanniques qui commencent à se masser en vue de l'attaque. Ce nouveau produit, le sulfure d'éthyle dichloré, est un gaz vésicant très agressif qui attaque la peau, les lèvres, les yeux et les poumons. Il dégage une odeur de moutarde, ce qui lui vaudra son surnom de "gaz moutarde" ou "Ypérite" car sa première utilisation a lieu près de la ville d'Ypres. Dans la nuit du 12 juillet, l'artillerie allemande déclenche un bombardement chimique. Sur le moment, les Britanniques ne ressentent rien de plus qu'une légère odeur piquante de moutarde. Mais au lever du jour, ils se réveillent avec des douleurs intolérables, des cloques et des brûlures sur tout le corps. Près de 15 000 fantassins sont atteints, avec des séquelles graves et durables. Cinq cents soldats succombent rapidement, c'est autant de victimes britanniques dues au gaz que durant toute l'année 1916. En plus des blessés, il faut presque le double de personnes pour les soigner et les guider, car beaucoup sont devenus aveugles. Malgré l'extrême dangerosité de leur fabrication et de leur manipulation, les obus à l'ypérite relancent la guerre chimique. Il ne s'agit plus pour les Allemands de percer le front, mais d'user l'adversaire, tant au physique qu'au moral. D'arme tactique, les gaz deviennent une arme d'usure. Le but est assez largement atteint. Dans tous les camps, les soldats se voient contraints de porter à chaque alerte des équipements de protection pour tout le corps avec des masques. Tout cet équipement gêne leurs mouvements et aggrave encore un peu plus leurs conditions de vie. Il arrive que, de lassitude, ils les enlèvent trop tôt après l'alerte, au risque d'être touchés par l'ypérite. Qui plus est, ce gaz vicieux ne produit ses effets délétères qu'après plusieurs heures. Alors, chacun vit dans l'angoisse d'avoir été touché à son insu au début de l'alerte...

Regroupement de blessés sur le front italien

(1) C’est seulement en novembre 2014 que le ministère français de la Défense rend publics, et met en ligne sur Internet, les procès des milliers d’exécutions effectuées entre 1914 et 1918. Pour beaucoup de Poilus la documentation tient en quelques pages. Pour l'espionne suisse Marie-Antoinette Avvico qui a bénéficié d'un long procès, presque tout est conservé.

(2) Le lieutenant André Mornet est le type même du juriste sans scrupule qui déshonore la Justice française. Entre 1914 et 1918, il envoie devant le peloton d’exécution nombre de rebelles, de déserteurs et de soldats qui seront fusillés pour l’exemple. En juillet 1917, il est le substitut du procureur qui expédie en trois jours la pseudo espionne Mata-Hari vers le peloton d'exécution, après un procès expéditif et sans réelle preuve. Retraité, il est néanmoins président honoraire de la Cour de cassation en 1940. Après avoir prêté serment à Pétain, il est nommé directeur de la Justice militaire en mai de la même année. En septembre 1940, il devient le vice-président de la commission pour la révision des naturalisations, qui est chargée de priver les juifs de la nationalité française et il élabore le statut des juifs qui sera voté le 3 octobre 1940. En novembre 1944, il est appelé comme procureur général auprès de la Haute Cour de justice. A ce titre, il est partie prenante des procès de Philippe Pétain et de Pierre Laval, pour lesquels il réclame et obtient la peine de mort. Pendant le procès de Pétain, durant lequel il sera pris à partie par maître Jacques Isorni, l'un des avocats de l'accusé, sur son attitude durant l'occupation, il déclare, afin de faire cesser la clameur de la foule "J'invite la cinquième colonne à cesser ses manifestations". Le procès Laval terminé, il insiste pour que le condamné soit réanimé après sa tentative de suicide, le matin de son exécution.

(3) Outre les orphelins de guerre, depuis le 1er janvier 1982, le statut de Pupille de la Nation est étendu aux enfants dont les parents ou tuteurs ont été victimes d'un attentat.

(4) Les locomotives à vapeur 140 G utilisées en France ne seront jamais rapatriées aux USA. Elles seront rachetées à bas coût par le gouvernement français, et les cheminots les baptiseront les Pershing.

(5) Depuis 1809, la Finlande est un grand-duché autonome, sous tutelle russe. Elle n'obtiendra son indépendance que le 6 décembre 1917.

(6) Matthias Erzberger sera l'un des participants allemands aux négociations et à la signature du traité de Rethondes qui met fin à la Grande Guerre le 11 novembre 1918. Le 26 août 1921, les anciens officiers de marine Heinrich Tillessen et Heinrich Schulz, tirent 6 coups de révolver sur Matthias Erzberger et son collègue Carl Diez, alors en vacances à Bad Griesbach, un village situé dans la Forêt-Noire. Erzberger sera tué sur le coup, Diez gravement blessé.

(7) Le contingent de militaires siamois servira sur le front de l'ouest aux côtés des Français et des Britanniques à partir de son débarquement en Europe en janvier 1918. Les 95 pressentis pour être pilotes seront tous brevetés. L'unité médicale comprenait des infirmières et elles furent les seules femmes à servir dans les tranchées du front occidental.

(8) Dans le monde de la tauromachie, quand on parle d’une bête qui participe aux courses à la cocarde (dite aussi course camarguaise) on écrit “taureau”, mais quand on parle d’une bête de corrida on écrit toujours “toro”.

(9) Le café du Midi était situé à l'emplacement de la superette Utile sur le Cours.

(10) Le camp d'Althen-Grabow est un camp de prisonniers qui reçoit des soldats des services sanitaires et aussi des ecclésiastiques. En 1916, il regroupe des sections de prisonniers de religions juive et musulmane. Un des plus célèbres prisonniers du camp n'est autre que Maurice Chevalier qui profite de son incarcération pour apprendre l'anglais avec un prisonnier britannique.

(11) Né à Barbentane, l'abbé Jean-Baptiste Lunain est en retraite au village depuis juillet 1914, il décèdera le 19 décembre 1917 à l'âge de 74 ans.

(12) Le père Hilaire est un moine franciscain, certainement en résidence à Avignon car il vient au village en chemin de fer.

(13) Le docteur Jean-Louis Escat est un célèbre urologue marseillais, il laisse d'ailleurs son nom à la rue où se trouve toujours la clinique Bouchard, anciennement rue Sainte-Philomène.

(14) L'abbé Joseph Mascle est né à Eyragues le 28 avril 1877. En 1901, il est versé aux services des auxiliaires à cause d'un chevauchement d'orteil (excuse ou réalité ?) et ne fait un service actif comme infirmier dans la territoriale qu'à partir du 1er novembre 1911 (15ème et 25ème territoriales). En 1914, il est professeur au Collège catholique d'Aix-en-Provence. Il est incorporé comme infirmier le 2 août 1914 à Marseille, puis il intègre le 106ème régiment d'artillerie lourde le 26 février 1917. En mars, il est en Macédoine (Cervena-Stena, Monastir, Gravitza) comme infirmier dans la 17ème division coloniale. En 1918, il est versé à la 4ème division de l'armée du Levant. Il en devient aumônier titulaire du culte catholique le 28 février 1921. Il est libéré le 1er novembre 1923. Il est cité deux fois à l'ordre de sa division. Le 7 novembre 1918 "Au cours de l'offensive du 15 septembre 1918, a fait preuve du plus grand dévouement et d'un parfait mépris du danger pour apporter aux blessés le secours de son ministère" et le 15 mars 1921 "A pris part à la colonne du général Fernand Goubeau pendant les opérations en Cilicie et Aïntab*. S'est prodigué sans compter dans l'exercice de ses fonctions et a été pour tous un bel exemple d'entrain et d'endurance. A demandé à rester à Aïntab après le départ de la colonne pour assister les malades et les blessés des troupes de la garnison, privées d'aumônier". Il reçoit la Légion d'honneur le 19 mars 1926 comme "aumônier militaire du culte catholique à l’Armée du Levant. Vingt-sept ans de services, onze campagnes". Il décède à Aix-en-Provence le 2 juin 1952 à l'âge de 75 ans...

* Maintenant Aïntab se nomme Gaziantep en Turquie pour saluer la résistance de ses habitants turcs contre les Alliés en 1920 et 1921. C'est une ville de près de 2 millions d'habitants située à la frontière syrienne. Ancienne ville avec une forte minorité arménienne, elle a subi l'épuration ethnique de 1915. Elle est réputée pour sa cuisine, et surtout c'est l'un des principaux centres producteurs de tapis usinés dans le monde.

Par manque de place sur cette page, j’ai mis en entier l’Écho de Barbentane

d'août-septembre 1917 sur une feuille à part : cliquez-ici pour le consulter

Soldats français au bois Charpentier à Ypres

Pétain, Lacaze, un officier britannique et Foch à la conférence interalliée du 25 juillet à Paris

Femmes françaises confectionnant des casques de type Adrian

Quelle folie la guerre !

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Barbentane, le plus beau village de l'Univers

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Tous mes remerciements à toutes celles et ceux qui m’ont aidé dans ces tâches de reconstitution de notre patrimoine barbentanais : prêt de brochures, de photos, des Écho de Barbentane, aide, corrections, traducteurs et autres…

Guy

Soldats sénégalais à la corvée quelque part en France (photo autochrome)

Soldats US le jour de l'Independence Day au quartier Reuilly à Paris

A la gare du Nord le 4 juillet, distribution de café pour les soldats US qui vont défiler

Prise d'armes le 4 juillet dans la cour des Invalides à Paris

Le cuirassé britannique Vanguard avant son explosion à Scapa Flow le 9 juillet

Marins de Kronstadt en rébellion contre le pouvoir russe