BARBENTANE

en Mars 1917

Documents annexes

à télécharger

au format PDF

En Suisse. Le pays est un nid d'espions et, tous bords confondus, plus de 120 affaires d’espionnage sont relayées par la presse suisse. Un chiffre probablement en dessous de la réalité, tant le pays a joué un rôle central dans l’espionnage entre les belligérants bloqués par un front figé et qui ont chacun développé leurs réseaux derrière d’honnêtes entreprises ou de sombres arrière-salles d’hôtels. Les Britanniques s’intéressent aux usines d’Oerlikon, suspectées de livrer des torpilles aux germaniques, pendant que l’Allemagne garde un œil sur Jules Bloch, un industriel qui organise des ventes de munitions aux Alliés depuis La Chaux-de-Fonds (canton de Neufchâtel). Mais c’est surtout pour infiltrer des agents chez l’ennemi que les espions suisses avec leur bilinguisme naturel sont prisés. Des agents improvisés effectuent de longs voyages d’un côté ou de l’autre : Félix Malherbe parvient à se renseigner sur les arsenaux de Dijon, les bateaux de Saint-Malo et la défense de Belfort, avant d’être pris et fusillé à Troyes. Les belligérants recrutent aussi parmi les déserteurs des deux camps, dont on estime que 4 000 sont réfugiés à Genève, mais aussi parmi la population locale. En période de crise économique, les sommes proposées sont souvent suffisantes pour faire naître de rapides vocations. Tous les métiers relationnels sont recherchés : les portiers, les artistes, les hôteliers, les chômeurs engagés comme chauffeurs par les légations ou des révolutionnaires désargentés. Avec le temps, les recruteurs parviennent à débaucher des douaniers et des gendarmes dans les secteurs stratégiques...

En Suède. Devant les difficultés de ravitaillement, l’autoritarisme du roi suscite de vives critiques et l’on parle de réviser la Constitution. Des troubles éclatent à Stockholm. Prudent, le roi renvoie le 30 mars le cabinet Hjalmar Hammarskjöld et crée un ministère de transition dirigé par Karl Staaff...

En Hollande. Les journaux affirment que les personnes non employées dans les usines de guerre n’ont que 4 livres de pain et 3 livres de pommes de terre par semaine...

En Espagne. Face à l'inflation galopante des prix alimentaires, de nombreuses grèves éclatent pour des augmentations de salaire. Devant ces troubles qui touchent presque toutes les grandes villes, le gouvernement donne l'ordre de n'accepter au télégraphe et au téléphone que des communications visées par la censure. Vers la fin du mois, les évènements russes influencent les dirigeants révolutionnaires de la CNT (anarchistes) et l'UGT (syndicalistes) pour mettre au point un accord d'unification afin de préparer une future grève générale...

Au Mexique. Le 11 mars, Venustiano Carranza est élu président de la République. Mais comme il ne met pas en place toutes les mesures constitutionnelles prévues, les troubles persistent. Carranza s’oppose aux compagnies pétrolières étrangères en déclarant que le pétrole est une ressource naturelle mexicaine. L'ambassadeur des États-Unis à Mexico fait savoir à Carranza qu'il sera rendu responsable en cas de troubles envers les USA. Il est aussi fermement invité à protéger les gisements de pétrole britanniques du pays...

En Chine. Le 4 mars, le gouvernement rompt ses relations diplomatiques avec l'Allemagne, et six navires allemands, ancrés dans le port de Shanghai, sont saisis. Le 20, l'armée chinoise prend possession des concessions allemandes de Tientsin et de Hang-Keou, villes situées dans le nord du pays...

Au Nicaragua. Le 8 mars, le gouvernement conservateur d'Emiliano Chamorro Vargas déclare la guerre à l'Allemagne...

A Cuba. Le 8 mars, sous prétexte d'aider les populations indigènes, les États-Unis débarquent une nouvelle fois à Santiago de Cuba. Le général José Miguel Gómez est démis par la force et le général Mario Garcia Menocal est rétabli comme président de la République par les USA. Les soldats US resteront sur l’île pendant six ans...

A Porto Rico. Bien que l'île n'ait pas un statut d'état incorporé aux États-Unis, les Portoricains obtiennent la nationalité étasunienne le 2 mars...

Dans le Monde des Sciences, des Arts, des Lettres et du Sport. Le 23 mars s'ouvre à Zurich (Suisse) la première galerie Dada. Elle est située dans un grand appartement loué par Han Coray au deuxième étage de la maison du fabriquant de chocolat Sprüngli, à l'angle de la Paradeplatz et de la Bahnhofstrasse. Elle va rester célèbre pour ses rencontres d'artistes jusqu'en 1933...

 

Sur le Front des Combats.

Préparatifs de l'Offensive Nivelle. Au milieu de mars, le retrait allemand sur ses nouvelles lignes de défense, l'opération Alberich, programmée et exécutée à la perfection face aux Français, prend les armées de la république au dépourvu. Pire, ce repli partiel est interprété par le Grand Quartier Général français comme un signe supplémentaire de l’effondrement allemand. Les Britanniques sont plus méfiants. Depuis un mois, sans comprendre vraiment le pourquoi de ce repli, ils combattent les Allemands qui se dérobent, mais cela empêche au moins les armées prussiennes d'effectuer toutes les destructions programmées dans les territoires évacués. L'angle droit de la ligne de front qui motive l'offensive prévue en avril est gommé, la nouvelle ligne de défense s'étend désormais dans une direction nord-ouest/sud-est de Vimy à Reims en passant par le Chemin des Dames. Les Alliés mettent une semaine à se rendre compte de l'ampleur de ce retrait. Le plan initial de l'offensive est désormais caduc. Nivelle et ses généraux adaptent leur projet à cette situation nouvelle et dissocient l'attaque britannique sur Vimy de l'attaque française qui se centrera sur le Chemin des Dames. Mais, dans leur recul, les Allemands laissent un tel champ de ruines face aux Français, qu'il faudrait des mois pour que les armées françaises en fassent un terrain idéal pour une grande offensive. Pis, comme l'aviation française est interdite de survol de la ligne Hindenburg par l'aviation allemande, l'état-major français est devenu totalement aveugle. Il ne sait plus où sont les emplacements de l'artillerie, ni même où sont les points fortifiés, et certaines tranchées sont si habilement camouflées qu'elles passent complètement inaperçues. L'essentiel de la victoire de Verdun a été acquis par la précision de la connaissance du dispositif ennemi, ce sera loin d'être le cas pour l'offensive d'avril...

En France. Durant tout le mois, les Britanniques ne cessent de harceler les Allemands dans leur repli stratégique, parfois les contre-attaques allemandes sont meurtrières. En 10 jours, ils progressent de 5 kilomètres à Bapaume dans le Pas-de-Calais. Le 12, ils prennent le bois de Saint-Pierre-Vaast. Ce bois est l'une des principales positions allemandes qui contenaient l'avance britannique à l'est de la route de Béthune. Le 18, ils rentrent dans Péronne, ce qui prive l'ennemi d'un centre important de ravitaillement. Le 20, ils s'emparent de Roisel, le dernier chef-lieu de canton que tenait l'ennemi dans la Somme. A partir de là, ils se heurtent à la ligne Hindenburg et c'est une ligne d'acier...

 

Les Français sont beaucoup moins entreprenants, tout juste s'ils occupent lentement le terrain que les Allemands abandonnent dans leur repli vers la ligne Hindenburg. Il faut dire que la progression est très dangereuse pour les poilus qui s'aventurent dans ce nouveau désert couvert de destructions. Toutes les infrastructures et plus de 200 villages sont détruits. Tout ou presque est miné, les soldats ne sont pas habitués à ça. Des obus au gaz dissimulés un peu partout, se déclenchent sans faire de bruit mais ils tuent à coup sûr. Les Britanniques plus combatifs n'ont pas laissé le temps aux Allemands de poser leurs engins de mort et ils n'ont pas eu à subir ces désagréments. Le 16, les poilus entrent dans Lassigny, le 17 dans Roye et le 18 dans Noyons. Dans une opération conjointe, Français et Britanniques commencent l'encerclement de Saint-Quentin...

Jusqu'au 19 mars, les Allemands mènent des attaques de diversion pour masquer leur repli stratégique. Le 3, ils attaquent en Flandres à Bailleul. Puis en Champagne, où la réaction française est très vive, mais c'est au nord de Verdun que les gros canons germaniques reprennent du service avec la même violence que 6 mois auparavant. En une semaine les Français réinvestissent 80 kilomètres carrés du territoire. Le 19, l'opération Alberich est terminée pour les Allemands. Bien installés maintenant dans leurs nouvelles tranchées fortifiées il se mettent en position d'attente afin de contrecarrer au mieux l'offensive franco-britannique qu'ils savent imminente. Cela ne les empêche pas de faire subir à ce lambeau de France des destructions qu'aucun impératif militaire n'impose. Le 19 mars, ils détruisent le château de Ham, un édifice vieux de plus de 1 000 ans, de nouveau fortifié vers 1670 par Vauban. Dans le but de détruire le patrimoine culturel français, le 27, avec près de 40 tonnes de cheddite, ils font littéralement exploser le château de Coucy qui date du XIIIème siècle. Son donjon de 31 mètres de diamètre et de 63 mètres de haut était le plus haut ainsi que le plus solide des château-forts du moyen-âge. Il avait été restauré avec amour par Eugène Viollet-le-Duc dans les années 1870...

Dans la Guerre Aérienne. La première moitié de 1917 est marquée par la nette domination aérienne allemande. Les pilotes des jagdstaffeln (escadrilles allemandes), aux commandes de leur Albatros D-III, font un carnage dans les escadrilles alliées. Ils cumulent deux avantages : non seulement leurs machines sont techniquement supérieures, mais ils ont ordre de ne jamais s'aventurer au-dessus des lignes ennemies. Par contre, pour les Alliés qui préparent leur offensive de printemps, la reconnaissance aérienne des nouvelles positions ennemies est vitale. Les pilotes franco-britanniques doivent bien s'aventurer sur les lignes allemandes pour les photographier. S'ils volent trop haut, ils font du mauvais boulot et s'ils volent trop bas, ils sont pris sous le feu croisé des avions allemands qui leur tombent dessus et de la défense anti-aérienne qui est devenue très efficace. A titre d'exemple, en deux jours, les Alliés perdent 50 avions et 33 pilotes/observateurs, c'est presque un carnage dans le cercle restreint de l'aviation militaire. A cela, il faut ajouter des conditions météo pas fameuses qui limitent les jours de vol. Pour en rajouter, tout à son offensive, Nivelle demande de nombreuses missions de bombardement sur les arrières allemands, ce qui immobilise d'autant les chasseurs, laissant bien esseulés les avions de reconnaissance pourtant vitaux dans la période. Malgré les exploits individuels de certains pilotes alliés qui, comme Georges Guynemer, abat 3 avions le 16 mars, et le lendemain un autre (35ème victoire), les pertes alliées sont presque trois fois plus importantes que celles infligées à l'ennemi. Du côté allemand, c'est Manfred von Richthofen qui détruit en un jour deux avions britanniques signant là sa trentième victoire...

En revenant d'un raid sur l'Angleterre, trois zeppelins survolent la région parisienne et l'un d'eux est abattu à Compiègne. En représailles de la destruction systématique de Bapaume par les Allemands en fuite, un avion français bombarde la ville de Francfort-sur-le-Main. A la fin du mois, le port de Dunkerque, par où transitent de nombreux éléments de l'armée britannique, est bombardé par les Allemands...

En France, un nouveau sous-secrétariat d’État de l’Aéronautique militaire voit le jour le 20 mars 1917 avec à sa tête le député Daniel Vincent. Ce dernier, rapporteur du budget de l’aéronautique depuis 1915, est très au fait des questions d’aviation, qu’il s’agisse de problèmes administratifs ou industriels. Par ailleurs, ancien observateur à l’escadrille V-116, il connaît bien les difficultés que rencontre le personnel de l’avant, et nombreux sont ceux qui fondent de grands espoirs sur cette nomination. Comme son prédécesseur René Besnard, Vincent se lance dans la voie de la rationalisation de la production industrielle, et obtient des constructeurs l’étude de matériels nouveaux. L’Inspection générale des fabrications disparaît, remplacée par une nouvelle organisation dans laquelle chaque marque d’avion est confiée à des officiers spécialisés. En dépit de ces efforts, Daniel Vincent, à l’instar de son prédécesseur, subit les attaques répétées de parlementaires qui, conjuguées à une nouvelle crise ministérielle avec l’arrivée du cabinet Painlevé, l'obligeront à démissionner le 12 septembre 1917...

Le 21 mars, s'embarquent dans un train à Lyon, les pilotes de la deuxième escadrille française envoyés en Russie. Ce détachement de pilotes, de mécaniciens et d'avions fait suite aux accords passés en janvier 1916 entre la France et la Russie. Après un périlleux périple à travers la Manche, la Grande-Bretagne, la mer du Nord, la mer de Barents, Mourmansk, Petrograd et enfin l'Ukraine, ils vont rejoindre la première escadrille française installée en Ukraine depuis près de 6 mois. Familièrement appelé l'Escadrille du Tsar, commandé d'abord par le général Paul Pau, puis par le général Maurice Janin, le contingent français comprend plus de deux cents officiers, ainsi qu'un millier de sous-officiers et d'hommes de troupe relevant des différentes armes. Les avions arrivent en pièces détachées, parfois avec beaucoup de retard, tant les transports en Russie sont désorganisés. Tous ces soldats français vont combattre avec les Russes jusqu'en décembre 1917 sans se mêler des terribles soubresauts qui secouent le pays. Dans son ordre du jour d'octobre 1917, le général Henri Albert Niessel dit aux aviateurs "Le détachement en entier doit en toutes circonstances se considérer comme le porte-drapeau de l'aviation française, et faire preuve, au milieu des pires difficultés, de sentiments intangibles de discipline, d'honneur et de sacrifice"...

Dans la Guerre Maritime. Conformément au désir de son chef, l'amiral Henning von Holtzendorff, la marine allemande monte toujours en puissance. Ses redoutables sous-marins, mais aussi les mines dérivantes, occasionnent la perte de 379 navires et en endommagent 34. C'est presque 100 navires de plus qu'en février qui sont détruits. Sur les 413 navires touchés, 219 sont britanniques, 72 français, 72 norvégiens, 25 italiens, 7 hollandais, 7 portugais, 5 russes, 5 grecs, 4 Étasuniens, 4 belges, 4 danois, 3 suédois, 2 espagnols, 1 japonais et 1 égyptien. La guerre est totale, sans pitié, même le navire hôpital britannique Glenart Castle est endommagé par une mine flottante le 1er mars. Si la majorité des bateaux touchés sont de petites unités, les U-Boote commencent à s'attaquer aux plus gros navires commerciaux. Les pertes du mois s'élèvent à 593 000 tonnes, mais les Allemands sont encore loin de leurs objectifs (800 000 tonneaux) qui pourraient mettre les Alliés à genoux...

Le 9, le destroyer britannique Albacore est endommagé par une mine laissée par l'UC-44 dans la passe de Kirkwall dans les îles Orcades au nord de l'Écosse, 17 marins périssent. Le 12, le sous-marin britannique E-49 saute sur une mine laissée par l'U-73 au large des îles Shetland. Ses 31 marins périssent, il n'y a pas de survivants. Le même jour, dans l'ouest de la Manche, l'U-85 est attiré par un navire qui semble en difficulté et que l'équipage s'apprête à abandonner. Faisant surface, l'U-85 est alors criblé de balles de gros calibre tiré par les mitrailleuses du Privet qui est en fait un bateau piège. Le sous-marin coule en quelques minutes emportant avec lui son équipage de 37 marins. Le 19, le cuirassé français Danton est coulé au sud de la Sardaigne par deux torpilles lancées par l'U-64. Il coule en moins de 30 minutes et 296 marins périssent. Les 806 rescapés sont secourus par le contre-torpilleur Massue aidé par le modeste chalutier Louise-Marguerite. Le 23, le destroyer d'escorte britannique Laforey saute sur une mine au large de Dieppe, 59 marins sont tués, 18 survivent...

Sur les 3 navires commerciaux US coulés par les U-Boote, Algonquin, Vigilancia et City Of Memphis, il n'y aucune victime. Le 4ème navire, le tanker Illinois qui retourne à vide aux USA, est d'abord capturé intact par l'UC-21 le 18 mars, puis coulé à l'aide d'une charge explosive. Tout son équipage est secouru par le bateau pilote du port d'Alderney de l'île anglo-normande d'Aurigny qui est située à proximité du naufrage…

Dans les eaux chaudes du sud de l'Atlantique, le bateau corsaire allemand Seealder commandé par Félix von Luckner poursuit ses attaques. Le 5, il arraisonne le Dupleix, un bateau français chargé de salpêtre. Puis le 11, il attaque le Horngarth, un navire britannique qui se dirige vers Montevideo. Le 21, il arraisonne le Cambrone, un trois mats français qui se dirige vers le Chili. Comme le Seealder est encombré de prisonniers, Luckner décide de les libérer malgré le danger d'être dénoncé et recherché. Il fait démâter en parti le Cambronne, le charge de 263 prisonniers et, sous la direction du plus vieux officier prisonnier à bord, le capitaine John Mullen du Pinmore, il le laisse poursuivre sa route vers Rio-de-Janeiro...

Le 22 mars, le croiseur auxiliaire allemand Möwe (Mouette), transformé en navire corsaire, rentre au port de Kiel malgré la surveillance dont il était l'objet de la part de la Royal Navy. En quatre mois de courses en mer dans l'Atlantique puis sur la côte brésilienne et à la pointe de l'Afrique, il s'est saisi de 25 navires alliés pour 123 265 tonneaux de fret. Tout son équipage reçoit la croix de fer. Devenu outil de propagande pour l'État allemand, il est désarmé et transformé en mouilleur de mines....

Sur le Front Russe de l'Ouest. Malgré le froid et des conditions climatiques peu favorables, les Allemands essayent de profiter des difficultés de ravitaillement des troupes russes. Durant tout le mois, des raids sondent les défenses russes, surtout dans l'Ukraine où la récolte de blé de l'été s'annonce prometteuse...

Sur le Front Italien. Que ce soit dans les Alpes ou sur l'Isonzo, c'est toujours l'hiver. A part quelques échanges de coups de feu ou d'artillerie, les soldats qui se font face sont plus occupés à se prémunir du froid que de se faire la guerre...

Sur le Front Roumain. En ce mois de mars et sur cette ligne de front, les conditions météo sont dignes de la Sibérie. Rien de bouge par -20 à -25°, même les culasses des fusils finissent par geler. Au moindre petit réchauffement c'est une neige abondante qui recouvre les tranchées...

Dans les Balkans. En Thessalie, à la suite d'agressions mortelles contre des patrouilles françaises, des perquisitions sont faites dans les couvents, lieux où se cachent facilement les rebelles. A celui de Ladenion, un dépôt d'armes est trouvé. Après demande au général Maurice Sarrail, ordre est donné de fusiller un officier grec et un pope bulgare responsables du lieu. Aux réclamations qui lui sont adressées, le général précise "quiconque participera à un guet-apens contre nos soldats ou en secondera les auteurs subira le même sort"...

Après une violente préparation d'artillerie, les Germano-Bulgares attaquent les tranchées alliées dans la région de Monastir. L'assaut est facilement repoussé et de nombreux assaillants sont blessés, d'autres sont faits prisonniers...

Sur les Fronts du Moyen-Orient.

En Mésopotamie. Confortés après leur prise facile de Kut-el-Amara, les Britanniques poursuivent leur progression vers Bagdad. Le 5 mars, ils sont aux portes de la grande ville et le 8, ils atteignent l'affluent Diyala qui en délimite sa périphérie. Malgré ses bonnes intentions de défendre à outrance cette capitale provinciale, le général turc Khalil Pacha, dont les troupes ont perdu la moitié de leur faible artillerie dans leurs reculs successifs, résiste à premier un assaut frontal. Habilement, le général Frederick Maude ordonne à une partie de ses soldats de faire le plus de bruit possible en tentant de contourner la ville par le nord. La ruse marche, et Khalil Pacha, croyant un assaut frontal impossible, déplace des troupes vers le nord pour ne pas se faire déborder. En un assaut au matin du 10, les positions défensives sur le Diyala sont enfoncées. Devant cette soudaine défaite et dans un moment de mauvaise humeur, Khalil Pacha ordonne à son armée de se retirer au nord de Bagdad le soir du 10 mars à 20 heures. Mais la situation échappe rapidement aux troupes turques et c'est une véritable débandade qui se déroule, ce qui laisse 9 000 prisonniers aux Britanniques...

Le 11 mars, le général britannique Frederick Maude à la tête de sa 6ème division indienne entre dans Bagdad. Ils sont accueillis avec enthousiasme par les résidents locaux. Le retentissement est mondial, mais plus encore, c'est quasiment un évènement révolutionnaire dans toute la communauté arabo-musulmane. En effet, depuis la fin de la 8ème croisade en novembre 1270, c'est la première fois qu'une troupe de "mécréants", même s'ils sont de religion sikh pour la plupart d'entre eux, s'empare d'une ville sainte de l'islam. Les Britanniques, très bien informés des possibles difficultés que cela pourrait entraîner, manœuvrent avec assez tac pour éviter tout heurt préjudiciable à la poursuite de leurs différentes opérations militaires dans cette partie du monde. En priorité, ils mettent sous l'éteignoir les revendications territoriales que le gouverneur des Indes, Percy Cox, tente d'émettre au nom de l'Empire indien. D'autre part, Frederick Maude annonce quelques jours après la "Proclamation de Bagdad" dans lequel il déclare "Nos armées ne viennent pas dans vos villes et vos terres en tant que conquérants ou en ennemis, mais en tant que libérateurs". De facto, Maude devient gouverneur de la Mésopotamie de Bassora à Bagdad et les Britanniques créent un Comité d'administration mésopotamienne, sous la direction de Lord George Curzon. Pour éviter une rébellion qui rendrait sa tâche impossible, Curzon demande aux notables irakiens de l'aider dans l'administration du pays...

Plus au nord, les Russes pénètrent dans la banlieue de Mossoul. En utilisant la vallée du Dialah, étrange rivière qui peut devenir un torrent de sable, les Russes et les Britanniques ne sont plus séparés que par 400 kilomètres, peccadilles pour des armées qui viennent de si loin...

En Perse. Après avoir franchi un col à plus de 2 000 mètres en plein hiver, les Russes s'emparent de la ville perse d'Asadabad. En territoire kurde, ils s'emparent des villes d'Hamadan et Kermanchah. Légalistes, les conquérants informent le président du Conseil perse que leurs troupes occupent quelques villes, et ils invitent le gouvernement persan à reprendre possession de ces villes évacuées par les troupes ennemies...

En Palestine. Là, la résistance est plus conséquente. Là aussi, les troupes turques sont plus nombreuses, bien assistées par des Germano-Austro-Hongrois. Là aussi, les fortifications sont mieux construites et l'artillerie plus étoffée. Du coup, les Britanniques sont à la peine. Le 26 mars, le général Archibald Murray commence à envahir la province ottomane en tentant de percer la ligne ferroviaire Gaza-Beer-Sheva avec 16 000 soldats. L'attaque dirigée par les unités sous les ordres du général Charles Dobell est tenue en échec en raison d'une mauvaise organisation, d'un manque de communication entre les unités d'infanterie et de cavalerie, d'une pénurie d'eau potable et de la résistance des attaqués bien retranchés dans leurs abris. Les Turco-Germano-Austro-Hongrois, qui disposent du même nombre de soldats que leurs assaillants dans ce qui devient la première bataille de Gaza, perdent 2 500 hommes, tandis que les pertes britanniques s'élèvent à près de 4 000 hommes. Malgré cet échec, Murray est cependant autorisé à préparer un deuxième assaut. Il faudra 6 mois aux Britanniques pour le concrétiser...

Sur tous les fronts de l'empire turc, les généraux réclament de nouvelles troupes à Constantinople. En Perse où les Russes s'installent en territoire kurde, en Palestine où les Britanniques les pressent au sud de Jérusalem, en Arménie où les Russes poursuivent leurs attaques dans la région du lac Van et enfin dans l'immensité de la péninsule arabique où les troupes bédouines du roi Fayçal avec Laurence d'Arabie mènent des attaques de harcèlement sur toutes les pistes et les routes de ravitaillement y compris près de Damas. La Turquie fait revenir à la hâte ses maigres troupes engagées en Roumanie et près de la frontière grecque. Mais ce ne sont que quelques soldats alors qu'il lui faudrait des millions de guerriers impossible à trouver, encore moins facile à armer de façon moderne, pour contenir des ennemis qui l'assaillent de toutes parts. Alors, rien ne passe nulle part, le destin de l'Empire Ottoman parait scellé...

 

Mais il est temps de revenir à Barbentane. C'est l'Écho de mai qui donne des nouvelles de mars et c'est un petit opuscule de seulement 16 pages dont le portrait du lieutenant-colonel Pierre-Louis Constant orne la une. Trois pages sont entièrement consacrées à la biographie de ce dernier, barbentanais de naissance, qui vient de décéder. Il faut dire que ce militaire a de la bravoure et du courage...

Pour les fêtes de Pâques, le chanoine Pierre Courbier, vicaire général, vient "seconder" le curé Aimé Guigues, qui se remet à peine de ses opérations. A noter qu'à la traditionnelle "messe des hommes", celle de la première heure du dimanche de Pâques, 750 à 800 hommes communient...

Pour la communion solennelle et la confirmation à Châteaurenard, j'ai relevé 7 garçons et 10 filles...

L'épisode des Rinfillières est le grand évènement mystique de l'année 1917, il va enflammer les esprits et donnera lieu à de nombreux pèlerinages, au moins jusqu'en 1920...

Au Martyrologe sont inscrits Louis-Antonin Vial décédé le 10 mars et Louis-Jean Bertaud mort à une date encore inconnue lors de l'édition de cet Écho...

Les versements d'or sont très conséquents, puisque selon l'Écho, la somme de 300 000 francs devrait être atteinte. La relance de l'Écho pour faire encore plus de dons est à lire...

Dix francs sont donnés par les époux Roubaud de Paris pour les blessés. Dans la liste des exemptés et réformés du conseil du 27 mars, j'ai compté 20 Barbentanais(3). Neuf sont ajournés, ils doivent repasser en conseil le 28 (le mois n'est pas précisé), sept sont de nouveau exemptés, deux sont envoyés au Service auxiliaire, un autre au service armé et le dernier est visité à domicile...

Le 28 mars est célébré un service religieux en mémoire de Louis Vial grièvement blessé à Verdun le 3 décembre, et décédé à Mâcon le 10 mars...

En Mars 1917 2 poilus barbentanais sont Morts pour la France :

· Louis-Antonin Vial. Il est né à Barbentane, journalier au PLM, soldat de 2ème classe, 32 ans, marié, deux enfants. Il est incorporé pour son service militaire le 11 octobre 1905 au 4ème régiment d'Afrique. Il fait la campagne de Tunisie de 1905 à 1907 et il est libéré de ses obligations militaires le 28 septembre 1907. Il devient manœuvre au PLM d'Arles à partir du 20 mars 1909, mais il démissionne le 20 octobre 1910 pour devenir journalier à la gare PLM de Barbentane. Il est réincorporé le 1er août 1914 comme trompette au 19ème régiment d'artillerie. Il est cité le 6 décembre 1916 comme un "modèle de courage et de sang froid, toujours volontaire pour les missions périlleuses, sert d'exemple à ses camarades". Il est grièvement blessé le 4 décembre 1916 à 7h00 du matin par deux éclats d'obus, dont un lui transperce le poumon, au cours du ravitaillement en munitions d'une batterie de 1ère ligne située au fort Deville dans le secteur de Verdun. Il reçoit la Médaille militaire avec Croix de guerre et palme le 26 janvier 1917. Après plusieurs opérations, il décède des suites de ses blessures à l'hôpital de Mâcon (Saône-et-Loire) le 10 mars 1917. Un service funèbre en sa mémoire est célébré en l'église de Barbentane le 28 mars 1917. Il repose maintenant dans le caveau de famille au vieux cimetière du village ;

· Pierre-Louis Constant. Il est né à Barbentane, militaire de carrière, 72 ans, marié, 1 enfant. Il était lieutenant-colonel au 8ème régiment territorial d'infanterie. Il s'engage le 31 mars 1864, il est promu officier le 9 août 1870. C'est un vétéran de la guerre de 1870, et de la campagne de Tunisie entre 1881 et 1883, il est officier de la Légion d'honneur. Retraité depuis le 22 février 1902, il se fixe à Steenbecque (Nord, 59). Le 2 août 1914, malgré ses 70 ans, il se met à la disposition de l'armée et il est affecté à un poste à la forteresse de Maubeuge. Il est fait prisonnier le 8 septembre 1914 lors de la reddition de cette place-forte. Interné à Torgau en Allemagne, il est libéré dans l'été 1915 à cause de son grand âge, et sa première visite est pour voir ses sœurs à Barbentane. Il décède le 26 mars 1917. Lors de ses funérailles à Steenbecque le 31 mars, comme aucun régiment français n'est à proximité, ce sont des soldats britanniques, avec musique, qui lui font une haie d'honneur de la maison mortuaire jusqu'au cimetière. A la descente du cercueil dans la tombe, un piquet d'honneur, genoux à terre, tire des salves de fusil. Un service funèbre en sa mémoire est célébré le 19 avril en l'église de Barbentane. Il n'est pas considéré comme Mort pour la France, mais son nom est inscrit sur le nécrologe qui est dans l'église.

Dans le courrier militaire, Louis Gontard est effaré par le nombre de morts et de blessés, il signale que le thermomètre est descendu à -26 ; Fernand Barral écrit de Salonique où il est avec Jean Bouché ; Jean Bourges note un -22° ; François Veray, qui a vu Martial Rey, constate d'on ne sait où, qu'il fait beau le jour, mais froid la nuit ; Joseph Chaix est maintenant à l'hôpital d'Avignon, il doit aller à Lyon se faire réformer ; Louis Meyer pense venir à Barbentane pour Pâques ; Jean-Marie Auzépy est toujours à Verdun où ça a tapé dur ces derniers jours ; Etienne Bernard est heureux de correspondre avec les Barbentanais ; Joseph Griot, qui a été trépané, a toujours des maux de tête ; Marius Escalier, reconnu inapte à la marche pour cause de blessure, est devenu conducteur d'auto à Lyon ; Jean Marceau est sur la rive droite de la Meuse dans un village détruit, il constate qu'il faudra beaucoup de courage aux anciens habitants pour revenir s'installer dans leurs ruines ; Jean Vernet est dans la république de Koritza où il s'est battu contre des comitadjis bulgares ; le caporal Jean Fontaine écrit d'un bout de France reconquis (Somme ?) où les poilus ont été accueillis avec un enthousiasme délirant par des Français libérés des Allemands ; François Marteau a bon moral, il est avec Monsieur Rey, son ancien professeur de l'école "libre" de 1898 à 1903 ; Henri Rouqueirol poursuit des boches qui font des choses atroces et Jean Fontaine constate que si son secteur est calme, dans le "Nord" on a l'air de faire du bon travail...

Dans l'état religieux, on note un baptême en mars, 3 enterrements en mars et 4 en avril...

L'Écho se termine sur une note louant le bienfait de l'humilité...

Guy

Vapeur norvégien Algol coulé par l'U-81

Membres fondateurs du journal clandestin La Libre Belgique

Le village détruit de Vraulx-Vraucourt dans l'Aisne lors de l'opération Alberich

Civils français déportés au camp d'Holzminden en Allemagne

Le 23, les princes sont reçus une dernière fois au château de Laxenbourg, une résidence royale près de Vienne, par leur beau-frère Charles Ier. Ils rentrent finalement en France porteurs d'une lettre de ce dernier qui reconnaît le bien-fondé des exigences françaises pour une paix séparée : restitution de l'Alsace-Lorraine par l'Allemagne à la France, retour à l'indépendance de la Belgique en grande partie occupée par l'Allemagne, indépendance de la Serbie (avec accès convenable de celle-ci à la mer Adriatique) et une promesse du monarque viennois d'influencer les alliés de l'Autriche-Hongrie pour qu'ils acceptent les exigences ne dépendant pas directement l'Autriche-Hongrie. Le 31 mars, le prince Sixte de Bourbon-Parme remet la lettre de Charles Ier au Président français Raymond Poincaré accompagnée de quelques commentaires verbaux (lorsque la France aura informé ses alliés, l'empereur s'emploiera à influencer Guillaume II pour l'inciter à un compromis). Le 23, à la conférence austro-allemande de Kreuznach, Charles Ier propose de céder la Galice occidentale à l’Allemagne, à condition que cette dernière rende l’Alsace-Lorraine à la France. Le chancelier allemand Georg Michaelis, Ministre-président de Prusse, refuse tout net. Dépité, Charles Ier se prépare alors, et en grand secret, à signer tout seul une paix de compromis avec les Alliés. Mais en France les choses ont changé. Le nouveau Premier ministre Alexandre Ribot, républicain strict, est beaucoup moins conciliant qu'Aristide Briant son prédécesseur. Il s'indigne que des princes étrangers, même s'ils sont belges et alliés, se mêlent des affaires de la République française. Il décide alors de faire stopper les négociations. Le 31, malgré les efforts de Poincaré pour ne pas faire capoter ce mince espoir d'arrêter la guerre pour 1917, Ribot rajoute les exigences italiennes qu'il sait incompatibles avec une paix de compromis : cession du Trentin, de la Dalmatie, des îles de la côte et de Trieste à l'Italie...

En France. La pénurie de charbon et de pétrole est générale. Les réquisitions de blé et de farine s'étendent dans tous les départements pour assurer le ravitaillement de la population. Le 5 mars, le général français Édouard de Castelnau qui revient de sa mission en Russie fait état de ses doutes sur la capacité de ce pays à poursuivre efficacement la guerre. Il écrit "On sent gronder tous les soldats, soit sur le front, soit en arrière du front" et, à propos des capacités de l'armée russe à poursuivre le combat "Si l'armée française vaut vingt, l'armée russe ne vaut guère plus que huit ou neuf". Le 7, d’abondantes chutes de neige se produisent à Paris, cette neige ne disparaît que le 11 mars. Le 13, la loi donne la possibilité d'ouverture de crédits aux petites et moyennes entreprises du commerce et de l'industrie. Cette loi va permettre la constitution des banques populaires...

Depuis son arrivée à Paris, le ministre de la Guerre Hubert Lyautey est l'objet d'une campagne de dénigrement menée par des parlementaires qui le présentent comme une sorte de Bonaparte au retour d'Égypte, prêt à fomenter un coup d'État. Du 11 au 14 au matin, il est à Londres où il a de fructueuses discussions avec les Britanniques sur la nécessité de l'unité de commandement. Malgré une discussion prévue en comité secret, Lyautey ne veut pas débattre officiellement de l'aviation à l'Assemblée nationale, car il sait que tout ce qui se dit au cours de ces réunions est connu des Allemands. L'après-midi du 14, devant les députés réunis en comité secret (tribunes évacuées), il commence son discours par "Je regarde, en pleine responsabilité, que c'est exposer la défense nationale à des risques pleins de périls...». Il est aussitôt interrompu par une bronca de grande ampleur "On n'a qu'à supprimer le parlement !" crie un député. Le vacarme est tel qu'il doit quitter la tribune. Il démissionne le soir même après avoir dit à Guillaume de Tarde "Tu avais raison, je n'ai jamais rien compris à cette race [les politiques]". Lyautey envoie tout de même le texte du discours qu'il n'a pas pu prononcer aux responsables politiques ; seul Gaston Doumergue répond pour dire qu'il l'approuve entièrement. Deux jours après, dans l'impossibilité de trouver quelqu'un pour remplacer Lyautey, c'est le Premier ministre, Aristide Briand avec son cabinet, qui démissionnent...

A partir du 15, la censure française interdit la publication des évènements qui se passent en Russie. Le 18, quand les nouvelles peuvent être publiées, certains journaux titrent "La Russie est libre" en faisant un parallèle entre les événements russes et la Révolution de 1789...

Le 16 mars, les services du contre-espionnage français arrivent enfin à arrêter à Marseille une ressortissante suisse du nom de scène de Régina Diana qui fait dans l'espionnage subtil et intelligent. Cette Genevoise, de son vrai nom Marie-Antoinette Avvico (ou Awico), "travaille" sous de nombreux pseudonymes, ce qui a dérouté longtemps la Sûreté française. A priori, rien ne la destinait à devenir espionne. Fille de blanchisseuse, son père italien disparaît peu après sa naissance. Elle travaille avec sa mère jusqu’à l’âge de 16 ans, puis se fait un nom d’artiste dans les cabarets genevois, celui de Regina Diana. Sa forte corpulence plait aux hommes, alors Marie-Antoinette tire une partie de ses revenus des largesses de ses amants et de la prostitution, mais de manière très discrète. Avec les premières années de guerre, les affaires de son mari, garagiste à Genève, périclitent, mais il compense en faisant de la contrebande de caoutchouc avec les Allemands. Pourchassé, il s’enfuit avec leur fille, qui est déposée dans un orphelinat protestant dans la Drôme. En septembre 1916, Marie-Antoinette part pour Paris, bien décidée à "y trouver un engagement". C’est là qu’elle accepte de rendre à l’occasion de petits services rémunérés pour un certain "Louis", patron de "Charles", ami zurichois d’un autre de ses amants genevois, dit "Weil". Au départ, il ne s’agit que de faire quelques observations sur les dernières modes vestimentaires des Parisiennes, voire de noter au passage les numéros de régiment qui sont inscrits sur les cols des soldats de la place. Elle se méfie. On lui promet 5 000 francs et un faux passeport. Fauchée, elle accepte. Volubile, elle dit à qui veut l’entendre qu’elle part soigner son mal de gorge dans le Midi et se produit dans les casinos pour gagner de quoi ouvrir une maison de "rendez-vous" à Lyon, ou encore soigner sa mère malade. Grâce à ses charmes, elle parvient à approcher de nombreux militaires et recueillir des renseignements très intéressants sur les préparatifs de l'offensive Nivelle. Elle note des déplacements de troupes dans la Somme, mentionne la pénurie de charbon et aussi des renseignements sur les mouvements contestataires. Ces informations, elle les écrit avec une encre sympathique sur de banales cartes postales qu'elle poste simplement à destination de son contact allemand qui réside à la Pension Walter à Zurich. Futée, elle signe ses cartes toujours avec un pseudonyme différent. Hélas pour elle, son honorable correspondant est très connu en tant qu'espion, et ses nombreuses cartes sont souvent interceptées, mais sans que l’on sache l’identité du signataire. Début mars, ses commanditaires l'incitent à aller s'installer à Marseille avec pour objectif de compter les aéroplanes, noter si on construit des casernes et savoir si les soldats portugais ont débarqué. Ce brusque changement d'adresse dans les envois des cartes en destination de son honorable correspondant zurichois met les agents de la Sûreté sur sa piste, alors elle est vite retrouvée...

Le 20, le nouveau gouvernement s'installe. Alexandre Ribot, ancien ministre des Finances, remplace Briand au poste de Premier ministre. Il cumule cette responsabilité avec le celle de ministre des Affaires étrangères(1). Les ministres de la Justice (René Viviani) et de l'Intérieur (Louis Malvy) ne changent pas. Paul Painlevé devient ministre de la Guerre, Joseph Thierry arrive aux Finances et André Maginot remplace Gaston Doumergue aux Colonies. Au parlement, le nouveau gouvernement expose son programme et obtient l'unanimité des suffrages dans le vote de la Chambre. Le 23, le nouveau gouvernement émet une protestation auprès des États neutres afin de dénoncer les destructions opérées par l'Armée allemande pendant son retrait vers la Ligne Hindenburg. Le dimanche 25, la France passe à l'heure d'été afin de réaliser des économies sur le charbon et l'éclairage. Après une énergique intervention du nouveau ministre de la Guerre, la Chambre vote l'incorporation de la classe 18 et le renvoi des agriculteurs incorporés dans la Réserve Territoriale (RAT) dans leurs foyers. La nouvelle paye des combattants qui sont aux tranchées, un franc par jour, est votée par les deux Assemblées...

En Grande-Bretagne. Pour éviter des émeutes, les Bourses des comestibles dressent les prix maxima pour les principales denrées. Devant les évènements russes, le responsable du parti conservateur et aussi ministre des Finances, Arthur Bonar-Law, affirme qu'un gouvernement démocrate en Russie permettra aux Alliés de mieux préciser leurs buts de guerre. Créé en janvier à l'initiative du Premier ministre David Lloyd George, le Cabinet de guerre impérial où sont invités les principaux responsables des dominions britanniques, se met en place. Pour justifier cette nouvelle instance, Lloyd George déclare à son conseiller militaire, le colonel Maurice Hankey, "Si nous voulons leurs hommes, nous devons les inviter à nos conseils". Le Canada, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, l'Afrique-du-Sud, l'Inde et aussi quelques autres dominions de moindre importance rejoignent ce Cabinet impérial, surtout que la possibilité d'une autonomie plus large est promise pour l'après-guerre. Le ministre des finances, au nom du gouvernement, fait voter par la Chambre des Communes la révision des certificats d'un million d'exemptés et de réformés. Il donne pour raison que cette mesure est indispensable pour assurer les effectifs "en raison des prochains et très gros combats" sans autre précision...

En Russie. Depuis le début de l'année 1917, se combinent en Russie différentes épreuves qui vont rendre l'empire ingouvernable pour le tsar. L'hiver est particulièrement glacial avec des températures de -40 assez régulièrement jusqu'à Moscou, ce qui provoque une raréfaction des denrées alimentaires, mais pas la pénurie. Malgré un vote de la Douma pour augmenter le pouvoir des municipalités en matière d'approvisionnement, les problèmes s'aggravent sans trouver de solution. La lassitude face à la guerre augmente. Depuis longtemps le pays est secoué par des soubresauts contestataires, mais aucun n'a atteint ceux qui vont se dérouler à compter du 9 janvier. Lors de cette première grève de l'année, des manifestations se déroulent à Petrograd, Moscou, Bakou, Nijni Novgorod. L'idée d'une grève générale se fait jour. Un rapport de l'Okhrana (police politique secrète du tsar) sur la situation à Petrograd conclut ainsi "la société aspire à trouver une issue à une situation politique anormale qui devient, de jour en jour, de plus en plus anormale et tendue"...

Le 3 mars, les ouvriers de la plus grande entreprise de Saint-Pétersbourg (Petrograd), l'usine Poutilov, se mettent en grève pour obtenir davantage de nourriture. Les premiers incidents importants éclatent le 5, avec la rumeur de l'instauration d'un rationnement, ce qui déclenche la panique. Le lendemain, l'usine en rupture d'approvisionnement, est contrainte de fermer. Des milliers d'ouvriers sont alors réduits au chômage technique et se retrouvent oisifs contre leur gré. Inquiet, Mikhaïl Rodzianko, alors président de la Douma, demande la mise en place d'un gouvernement disposant de la confiance du peuple. Dans le même temps, le tsar Nicolas II, absolument inconscient du danger et rassuré par un entourage totalement incompétent, quitte Petrograd pour Moguilev (maintenant Mahiliow en Biélorussie), une ville située à 800 kilomètres plus au sud. Le 8 mars, pour la Journée internationale des femmes et par -40°, plusieurs cortèges de femmes (étudiantes, employées, ouvrières des faubourgs) manifestent dans le centre-ville de Petrograd pour réclamer du pain, ce qui n'a rien de révolutionnaire. Leur action est soutenue par des ouvriers au chômage ou qui cessent le travail pour rejoindre les manifestantes aux cris de "Du pain, du travail". Les rangs des manifestants grossissent jusqu'à atteindre 90 000 personnes. Les slogans prennent alors une tonalité plus politique. Aux cris contre la guerre, les grévistes ont mêlé des "Vive la République !" et des grandes ovations saluent un régiment de Cosaques qui refusent d'intervenir. Malgré la défection d'une majorité de soldats des régiments Volinski et Pavlovski qui excluent de tirer sur la foule, on relève quand même une quarantaine de morts parmi les manifestants et un officier est tué par ses hommes. Dans la nuit, des centaines d’arrestations sont effectuées, ce qui attise les tensions. Le lendemain, le mouvement de protestation s'étend, près de 200 000 grévistes convergent vers le centre-ville. N'ayant reçu aucune consigne précise, les Cosaques sont débordés et ne parviennent plus à disperser la foule des manifestants. Le 10, des meetings s'improvisent et la grève devient générale. La forteresse Pierre-et-Paul et d'autres bâtiments publics sont pris d'assaut. Comme les manifestations s'amplifient, les slogans deviennent de plus en plus radicaux. Aux cris classiques de "Donnez-nous du pain !" s'ajoutent maintenant "A bas la guerre !" et "A bas le Tsar !". Des confrontations avec les forces de l'ordre provoquent des morts et des blessés des deux côtés. Face à ce mouvement populaire et spontané, les rares dirigeants révolutionnaires présents à Petrograd restent prudents, estimant, comme le bolchevik Alexandre Chliapnikov (membre du comité central du parti), qu'il s'agit là d'une émeute de la faim plus que d'une révolution en marche. Dans la soirée, Nicolas II ordonne de "faire cesser par la force, avant demain, les désordres à Petrograd". Le refus de toute négociation et de tout compromis va faire basculer le mouvement en une révolution. L'empereur mobilise les troupes de la garnison de la ville pour mater la rébellion. Le 11, vers midi, la police et la troupe ouvrent le feu sur une colonne de manifestants. Plus de cent cinquante personnes sont tuées. Traumatisés par l'ordre de tirer sur la foule, de nombreux soldats commencent à passer dans le camp des manifestants. Prenant les ordres à contre-pied, la 4ème compagnie du régiment Pavlovski ouvre le feu sur la police montée, ce qui déclenche des désertions massives dans les troupes chargées de faire régner l'ordre. Affolé, Rodzianko prend la décision d'envoyer un télégramme à la Stavka (Grand Quartier Général) de Moghilev, où se trouve Nicolas II, pour lui demander les pleins pouvoirs "La situation est grave. Les troupes de la capitale ne sont plus fiables. La capitale est livrée à l'anarchie. Le gouvernement est paralysé. L'acheminement des denrées et du combustible est complètement désorganisé... Il faut qu'une personnalité reconnue par le pays soit chargée de former un ministère". Croyant à de l'exagération, le tsar ne tient aucun compte du message. L'insurrection aurait pu s'arrêter là mais, dans la nuit du 11 au 12, un événement fait basculer la situation. Deux unités d'élite, traumatisées d'avoir tiré sur leurs "frères ouvriers" se mutinent. En quelques heures, la sédition se répand à l'ensemble des troupes de la ville. Au matin du 12, soldats et ouvriers fraternisent. Ils s'emparent de l'arsenal et de tous les établissements publics, ils distribuent des fusils à la foule et occupent les points stratégiques de la capitale. Au cours de la journée, la garnison de Petrograd (environ 150 000 hommes) passe du côté des insurgés. Rodzianko réitère ses demandes dans un second télégramme et y ajoute "Si le mouvement gagne l'armée, l'Allemand triomphera, la Russie sombrera inéluctablement et, avec elle, la dynastie". Le tsar répond qu'il revient dans sa capitale y rétablir l'ordre et, qu'en attendant, il proroge la Douma, un temps suspendue. Mais il est maintenant trop tard. Prenant alors le pouvoir de la rue, les militants révolutionnaires organisent et canalisent le mouvement. Comme au cours de la révolution de 1905, la création d'une instance pour fédérer ouvriers et soldats s'impose. Dans l'après-midi du 12, une cinquantaine de militants de tendances révolutionnaires différentes -bolcheviks, mencheviks(2), socialistes-révolutionnaires- organisent un Comité exécutif provisoire des députés ouvriers. Ce Comité décide de la création d'un journal, les Izvestia (Les Nouvelles), il appelle les ouvriers et les soldats de la garnison à élire leurs représentants. C'est l'acte de naissance du Soviet de Petrograd, assemblée de six cents personnes environ. Le Soviet est dirigé par un comité exécutif composé de onze révolutionnaires qui se sont cooptés, et présidé par le menchevik géorgien Nicolas Tchkhéidzé (Nicolas Tchéidzé). Dans son train de retour vers Petrograd, Nicolas II est bloqué par des grévistes. Il ne peut plus se rendre à sa résidence officielle de Tsarskoïe Selo. Il note dans son journal "Tout autour de moi, je ne vois que trahison, lâcheté et tromperie". A Moscou et dans d'autres grandes villes, les nouvelles de Petrograd déclenchent des grèves générales et provoquent l'élection de Comités révolutionnaires provisoires locaux...

Parallèlement à la constitution de ce soviet, se met en place un autre organe de pouvoir. Faisant fi des directives du tsar, des membres de la Douma (Rodzianko, Goutchkov, Paul Milioukov) créent un Comité provisoire de la Douma d'Empire, dont Rodzianko est président, pour "le rétablissement de l'ordre gouvernemental et public". Pour ces députés, la priorité est au retour à l'ordre, et dans l'urgence parvenir à faire rentrer les soldats mutinés dans leurs baraquements. Le 14, sous la présidence du prince Gueorgui Lvov, se met en place un gouvernement provisoire russe. Celui-ci déclare vouloir poursuivre la guerre aux côtés des Alliés malgré les mutineries et désertions qui minent l'armée russe. Dès lors, Rodzianko laisse tomber le souverain et décide d'émettre des directives visant à protéger le nouveau gouvernement. Après avoir fait emprisonner les anciens ministres pro-tsaristes, il envoie des télégrammes aux généraux Mikhaïl Alekseïev, commandant suprême des armées, et Nicolas Rouzski, commandant du Front nord, pour leur demander expressément de ne faire avancer aucune troupe vers Petrograd. Comme le tsar est maintenant à Pskov, quartier général du Front nord, il demande également à Rouzski de tout mettre en œuvre pour le persuader d'abdiquer. Entre ce comité et le soviet de Petrograd, de longues négociations aboutissent le 15 mars à un compromis. Le soviet reconnaît, en attendant la convocation d'une Assemblée constituante, la légitimité d'un gouvernement provisoire à tendance libérale, composé majoritairement de représentants du Parti constitutionnel démocratique (et ne comptant aucun socialiste dans ses rangs). En contrepartie, ce gouvernement provisoire de Russie est sommé d'appliquer un vaste programme de réformes démocratiques, fondé sur l'octroi des libertés fondamentales, le suffrage universel, l'abolition de toute forme de discrimination, la suppression de la police, la reconnaissance des droits du soldat-citoyen et une amnistie immédiate de tous les prisonniers politiques. Ce compromis marque la naissance d'un double pouvoir, où s'opposent deux conceptions différentes de l'avenir de la société russe. D'un côté, le gouvernement provisoire est soucieux de faire de la Russie une grande puissance libérale à tendance capitaliste et d'orienter la vie politique russe sur la voie du parlementarisme. De l'autre, les soviets tentent d'instaurer une autre façon de faire de la politique, en représentant de manière directe les "masses". Jusqu'à ce compromis, l'incertitude régnait sur l'attitude qu'allaient adopter Nicolas II et les chefs militaires. Finalement, à la surprise générale, l'État-major fait pression sur l'empereur pour que celui-ci abdique "afin de sauver l'indépendance du pays et assurer la sauvegarde de la dynastie". Le général Mikhaïl Alekseïev, soutenu par les commandants des cinq fronts, réussit à convaincre le tsar que l'abdication est le seul moyen de poursuivre la guerre contre l'Allemagne. Temporairement, le grand-duc Nicolas devient généralissime. Au soir du 15 mars, Nicolas II renonce au trône en faveur de son frère, le grand-duc Mikhaïl Alexandrovitch Romanov. Mais c'est un tollé général, car remplacer l'empereur par un autre empereur ne peut satisfaire le peuple en colère. Devant la protestation populaire, Mikhaïl Alexandrovitch Romanov renonce à la couronne le lendemain. En cinq jours, sans avoir opposé la moindre résistance, l'Ancien Régime russe s'écroule comme un château de cartes. C'est la fin du tsarisme avec les premières élections au soviet des ouvriers de Petrograd. Malgré quelques centaines de victimes, la chute rapide et inattendue du régime a un coût très limité. Le succès des manifestations de Petrograd suscite dans le pays une vague d'enthousiasme et de libéralisation, qui témoigne de la désaffection complète du peuple vis-à-vis du tsarisme. La nouvelle du mouvement révolutionnaire est maintenant connue de toutes les troupes sur les différents fronts, elle provoque des cris d'enthousiasme, et les soldats entonnent des chants patriotiques. L'escadre russe de la mer Baltique se révolte, donnant du même coup le signal de la révolte dans toutes armées russes...

Les principales villes et provinces de l'Empire adhèrent à la Révolution, et le nouveau gouvernement, présidé par le prince Lvov, fait cette déclaration qui satisfait le peuple russe et les peuples alliés "La Russie, victime d'une agression préméditée et préparée de longue date, continuera, comme par le passé, à lutter contre l'esprit de conquêtes d'une race de proie qui s'imagine pouvoir établir, au-dessus de ses voisins, une hégémonie intolérable et faire subir à l'Europe du XXème siècle la honte de la domination du militarisme prussien"...

Le 17, Pavel Nikolaïevitch Milioukov, le nouveau ministre des affaires étrangères du gouvernement provisoire, essaye de rassurer les Alliés, et il confirme la poursuite de la lutte à leurs côtés. Le 18, les Bolcheviques s'activent et éditent leur premier journal La Pravda (ce qui signifie Vérité ou Justice). Le 19, de nombreux soviets demandent l'arrestation de la famille impériale pour trahison. Le 20, pour calmer les manifestants, le gouvernement provisoire décide l'arrestation de Nicolas II et de sa famille d'autant qu'il détient des lettres très compromettantes de la tzarine à l'Allemagne. Le tsar et son épouse sont placés séparément en résidence surveillée à Tsarskoïe Selo. Le grand-duc Nicolas est informé par le ministre de la Guerre que ses relations avec la dynastie rendent indésirable son maintien au commandement en chef. C'est le général Mikhaïl Alekseïev qui le remplace, ce qui ne fait qu'avaliser une situation de fait, puisqu'il occupe ce poste depuis l'automne 1915. Les généraux des principales armées prêtent serment de fidélité au gouvernement provisoire et les grands-ducs aussi. Le 22, la France, la Grande-Bretagne et l'Italie reconnaissent officiellement le gouvernement provisoire russe. Le même jour, une tentative de meurtre, sans conséquence, est commise par un officier contre le nouveau ministre de la Justice, Alexandre Kerenski. Le 23, le soviet de Petrograd lance un appel à la paix, et se prononce pour la renonciation à toute conquête territoriale ainsi que pour l’ouverture immédiate de négociations avec "les ouvriers des pays ennemis". S'adressant plus particulièrement aux ouvriers allemands, il proclame "Nous proposons aux Allemands de nous imiter et de renverser Guillaume II qui a déchaîné la guerre". Le 25, des constitutionnels démocrates, très minoritaires, conçoivent un parti républicain et se prononcent en faveur de la création d'une République Russe sur le modèle français. Le 29, le gouvernement provisoire reconnaît le droit à l'indépendance des nations de l'Empire. Le lendemain, une note concède l'indépendance polonaise sous réserve d’une alliance militaire avec la Russie. Craignant un complot, le gouvernement fait placer le grand-duc Nicolas ainsi que d'autres membres de la famille Romanov en résidence surveillée...

En Belgique Occupée. Après avoir néerlandisé l'université de Gand, le gouverneur-général allemand Moritz von Bissing poursuit sa Flamenpolitik. Le 21 mars, Théobald von Bethmann Hollweg signe le décret qui sépare la Belgique en deux régions administratives : la Flandre et la Wallonie. Il sépare la province de Brabant en deux parties : l'arrondissement de Nivelles est rattaché à la Wallonie. La Flandre, quant à elle, a Bruxelles pour capitale et regroupe les quatre provinces du nord du pays ainsi que les arrondissements de Bruxelles et de Louvain. Considérant que Namur est la ville la plus centrale de la Wallonie, il en fait sa nouvelle capitale. C'est la première séparation de la Belgique sur une base linguistique. Pendant ce temps, la résistance passive est toujours très active grâce à ses 200 petits réseaux qui font essentiellement du renseignement pour les Alliés, et édite le journal La Libre Belgique clandestine dont la devise est "La Belgique pouvait être envahie, mais conquise, jamais !"...

En Allemagne. La crise alimentaire n'est plus niée, ce qui rend le climat angoissant pour toutes les familles. Le 4 mars, dans une note officieuse, le gouvernement avoue ses intrigues au Mexique. Dans un entretien avec des journalistes, le maréchal Paul von Hindenburg laisse entendre que la guerre sera terminée à l'été et qu'un grand coup se prépare. Le 14, Berlin officialise sa rupture des relations diplomatiques avec la Chine. Malgré ses 78 ans, alors qu'il se trouve à Berlin pour une démonstration aéronautique, le comte Ferdinand von Zeppelin, inventeur et industriel de renom, tombe brusquement malade. A la suite d'une l'opération aux intestins, il contracte une pneumonie et meurt le 8 mars. Il a droit à des funérailles nationales à Stuttgart, capitale du Wurtemberg, là où sont installées ses usines de dirigeables. Les deux zeppelins drapés de noir qui survolent la cérémonie lancent des fleurs au moment solennel de la lente descente du cercueil dans sa tombe. Le vice-généralissime de l'armée ottomane, Enver-Pacha, séjourne un temps au grand quartier général, où il confère avec l'empereur et les responsables militaires Paul von Hindenburg et Erich Ludendorff. Le nouvel emprunt est mal accueilli et le ministre de la Guerre publie un appel où il dit textuellement "Des gens sots croient que la guerre finira plus vite, si l'on ne souscrit pas ; mais elle ne fera, en ce cas, que commencer". Le 25, des émeutes sont signalées à Hambourg et à Kiel, elles sont rapidement réprimées et dans le sang, par les autorités qui craignent une contagion à la russe. Le 31, le chancelier Théobald von Bethmann Hollweg prononce un discours au Reichstag où il affirme que jamais 1'Allemagne n'a soutenu la monarchie en Russie. Il précise que le pays ne veut pas la guerre avec les États-Unis, mais il reconnaît que la situation militaire demeure indécise. Pour la première fois depuis août 1914, les sociaux-démocrates majoritaires rejettent le budget au Reichstag...

En Autriche-Hongrie. Depuis son accession au trône le 21 novembre 1916, Charles Ier a pris personnellement le commandement de l'ensemble des forces armées de l'Empire. Il est en conflit permanent avec le chef de l'État-major général de ses armées, le général Conrad von Hötzendorf. De guerre lasse, le 1er mars, l'empereur congédie Hötzendorf, et le remplace sur le champ par Arthur Arz von Straußenburg qui s'est distingué durant la campagne de Roumanie. En plus de ses compétences, ce nouveau généralissime bénéficie d'une réputation d'affabilité ainsi que d'amabilité qui convient à Charles Ier. Il lui sera un fidèle et zélé serviteur. Pour bien marquer la rupture, le nouveau Grand Quartier Général austro-hongrois est transféré du Duché de Teschen (maintenant Cieszyn au sud de la Pologne) à la ville thermale de Baden à 26 kilomètres au sud-ouest de Vienne. Le 16, le ministre autrichien des Affaires étrangères Ottokar Czernin met le chancelier allemand Théobald von Bethmann-Hollweg au courant de la possibilité d’ouvrir des négociations de paix avec la France, mais il n’arrache aucune concession, même partielle, sur la restitution de l’Alsace-Lorraine à la France...

En Italie. A Milan, la Suissesse Marie Schwarz est condamnée à 15 ans de prison pour espionnage au profit de l'Allemagne...

En Grèce. Les évènements révolutionnaires russes font perdre au roi Constantin Ier son principal protecteur, l'ex-tzar Nicolas II. Le 20mars, il déclare "Les grandes nations civilisées de l'Entente lui rendront justice", il rajoute que son grand désir "a toujours été de maintenir la neutralité [de la Grèce]" et il conclut "Quand les fumées de la guerre auront disparu, les nations qui combattent pour défendre leurs droits nous rendront les nôtres"...

Aux États-Unis. Ce n'est pas la guerre, mais on s'en rapproche à grands pas. Le 1er mars, la Chambre des représentants adopte une loi sur l'armement des navires de commerce. Le 2, la presse publie un résumé du télégramme Zimmermann et le gouvernement reçoit des assurances d'intentions amicales d'un certain nombre de républiques sud-américaines ainsi que du Japon. Le 3, la Chambre des représentants vote par 403 voix contre 13, l'élargissement des pouvoirs du président. Le 7, dans le discours qu'il prononce au Capitole, le président Woodrow Wilson laisse entendre que le pays pourrait être associé au conflit européen. Mais, dans sa session ordinaire, quelques élus au Sénat s'opposent à la loi de neutralité armée et à l'armement des navires de commerce. Toutefois, 83 sénateurs sur 96 expriment leur volonté de s'associer au projet du Président. Le 12, Wilson ignore l'opposition du Sénat et impose l'armement des navires de commerce. Dans les faits, l'Amirauté avait déjà commencé à armer les navires qui se rendent régulièrement en Europe. Le 12, après le torpillage du vapeur Algonquin dans l'Atlantique par l'U-62, la presse unanime pense que c'est l'acte guerrier qui va permettre aux USA de déclarer la guerre à l'Allemagne, mais comme il n'y a aucun mort dans ce naufrage, il n'y a pas de suite. En vue d'étayer son entrée en guerre, le gouvernement prépare un livre noir qui doit recenser tous les complots allemands contre les États-Unis (incendies, torpillages, etc...). Le 17, à la suite du torpillage du vapeur Vigilencia par l'U-70 dans l'Atlantique, le gouvernement décide la convocation du Congrès en session extraordinaire pour le 2 avril. Le président du Sénat préconise que, jusqu'à ce que le pays soit prêt, il prenne à son compte l'entretien, la nourriture, l'équipement d'un million de soldats français. Le ministre du Commerce annonce que toutes les mesures sont prises en vue de la mobilisation des navires côtiers. Le ministre du Travail expose les mesures prises pour la mobilisation des ressources industrielles et le gouvernement demande l'envoi d'une mission française pour l'instruction des étudiants. Le 27, Léon Trotski et sa famille quittent les États-Unis pour rentrer en Russie...

Manifestation de femmes à Petrograd le 8 mars 1917

Le général Maurice Janin chef de la mission militaire française en Russie

Le nouveau Président du Conseil, Alexandre Ribot

Marmitage des tranchées allemandes par les Britanniques

Mortier allemand de 420, grand destructeur de fortifications

Entrée du général Frederick Maud dans Bagdad

La partie du front français où vont se dérouler les offensives d'avril

Manifestation à Petrograd

Canadiens à l'assaut de la ligne Hindenburg

Réunion du Soviet de Petrograd

Les officiers du navire corsaire Möve à leur retour en Allemagne

Les restes du château de Coucy

La ville palestinienne de Beer-Sheva aux portes du désert du Néguev

Personnel médical d'un hôpital russe près de Reims

Artilleurs australiens prenant position près de Vaulx-Vraucourt

Dentellières au Puy-en-Velay

Mars 1917 - Dans le Monde en Guerre

En ce très rigoureux mois de mars 1917, la Russie impériale et tricentenaire explose en quelques jours. Une paix de compromis, péniblement et secrètement concoctée, avorte. Le monde musulman est déchiré, de nouveaux mécréants rentrent de vive force dans une ville sainte de l'Islam, mais ils se sont parés des habits de libérateurs, alors on fait contre mauvaise fortune bon cœur, du moins pour l'instant…

Dans le Monde Politique

Processus de Paix de Charles Ier Empereur d'Autriche-Hongrie. De la mi-février à la mi-mars, les deux princes belges Sixte et Xavier de Bourbon-Parme font l'aller-retour de Paris à Neuchâtel en Suisse. Là, ils rencontrent le comte hongrois Thomas Erdödy de Monyorokerek et Monoszlo qui est un ami personnel de l'empereur Charles Ier, mandaté par lui pour entamer des négociations de paix séparée. Dans une conférence secrète qui se tient en Savoie le 5 mars, le représentant italien réclame plusieurs provinces austro-hongroises. Les 5 et 8 mars, Sixte de Bourbon-Parme est reçu personnellement par le Président français Poincaré pour lui signifier l'avancée des discussions. Considérant que les revendications italiennes sont un point de blocage, ils décident de ne pas les mettre en avant. Le 19 à Genève, une nouvelle entrevue se déroule entre les princes belges et le comte hongrois. Puis, en grand secret, en voiture et en train, les deux princes se rendent à Vienne où, à partir du 21, ils rencontrent plusieurs fois Charles Ier et son ministre des Affaires étrangères, le comte bohémien Ottokar Czernin von Chudenitz...

Soldats russes en Finlande à l'écoute des nouvelles de Petrograd

Légionnaires français au Moyen-Orient

Avion allemand abattu par Guynemer à Hoéville le 16 mars 1917

L'espionne suisse Marie-Antoinette Avvico (Regina Diana) arrêtée à Marseille

Maquette du château de Coucy avant sa destruction sauvage par les Allemands

Transport de charbon dans la campagne française enneigée

C'est l'Écho de mai, qui relate les événements de mars 1917...

(1) En mars 1917 Alexandre Ribot est un vieux politicien de 75 ans, presque totalement voûté. D'ailleurs, Georges Clemenceau, son ancien allié mais avec qui il était fâché depuis longtemps, le surnomme "Le saule pleureur". A sa nomination à la présidence du Conseil, Clémenceau a ce mot cruel "On dit que les meilleurs abris sont voûtés. M Ribot est voûté, mais il n'en est pas plus sûr pour autant".

(2) Le parti des Mencheviks (Minoritaire) est un courant socialiste russe se réclamant du marxisme. Il regroupe les minoritaires du 2ème congrès du Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR) qui s'est tenu à Londres en 1903. Ils s'opposent aux Bolcheviks (Majoritaire) qui seront à l'origine de la création du Parti communiste de l'Union soviétique. Les Bolcheviks menés par Lénine prônaient l'organisation d'un parti de cadres, formé de révolutionnaires professionnels, par opposition à la conception des Mencheviks qui, autour de Julius Martov, préconisaient un parti de masse, où l'adhésion était ouverte au plus grand nombre.

(3) Depuis 1914, temps de guerre oblige, il existe plusieurs visites pour les conscrits. Une première, où tous les garçons du village sont convoqués en même temps au chef-lieu du canton (Châteaurenard). Là, entièrement à poil, dans une pièce où la température ne doit pas être inférieure à 15°, ils passent à tour de rôle devant au moins un médecin, et d'autres officiels (préfet, sous-préfet, maire, militaire, etc...). A l'issue de cette "cérémonie", le conscrit est soit bon pour le service, soit réformé, soit ajourné. Les réformés passent une contre-visite où ils peuvent être réformés définitivement ou ajournés. Les ajournés passent généralement une contre-visite dans un délai variable où ils peuvent être de nouveau ajournés (maladie temporaire) ou réformés définitivement.

L’Écho de Barbentane de mai 1917

Par manque de place sur cette page, j’ai mis en entier l’Écho de Barbentane

de mai 1917 sur une feuille à part : cliquez-ici pour le consulter

Le cuirassé français Danton, torpillé par l'U-64 le 19 mars

Le navire hôpital britannique Glenart Castle endommagé par une mine

Le destroyer britannique Albacore endommagé par une mine

Lieu des principales attaques de U-Boote en mars 1917

Soldats néo-zélandais dans la Somme

Femmes françaises au travail dans une usine d'obus

Soldats albanais en Roumanie

Sous-officiers français en "stage" mitrailleuse

Prisonniers allemands dans un camp au Maroc

Barge de transport sur le Tigre en Mésopotamie

Munitionnettes dans une usine de placage pour avions à Paris

Artillerie turque se repliant sur Gaza

Quelle folie la guerre !

Zone de Texte: Pour revenir à la page d'accueil de mon site de Barbentane, cliquez ici !!!
Zone de Texte: Vous pouvez toujours m'écrire, cliquez ici et ce sera fait
Ou alors à cette adresse : bne.lagramillere@free.fr

Barbentane, le plus beau village de l'Univers

Zone de Texte: Pour accéder aux archives des Écho déjà publiés, cliquez ici !!!

Tous mes remerciements à toutes celles et ceux qui m’ont aidé dans ces tâches de reconstitution de notre patrimoine barbentanais : prêt de brochures, de photos, des Écho de Barbentane, aide, corrections, traducteurs et autres…

Guy

Rééducation de soldats français aveugles

Prévôté du détachement français au Moyen-Orient

Artillerie turque à Gaza

Guerre ou pas, l'humour en carte postale garde tous ses droits

Explosion d'une mine française près de Bois-le-Prêtre en Lorraine

Soldats allemands en Argonne

Personnel soignant et blessés à l'hôpital de Breuillet en Charente-Maritime

Canon de 75 et mitrailleuse anti-aérienne près de Reims