BARBENTANE

en octobre 1915

Documents annexes

à télécharger

au format PDF

Sur le front russe, dans les marais du Pripet où la boue automnale est l'une des composantes principales de la guerre, il est impossible de mener une activité militaire. Du coup, les opérations vont se dérouler essentiellement au nord, près de la Baltique, et au sud sur la rivière Styr...

Près de la Baltique, les Allemands réorientent leurs actions vers Riga au nord, et essayent d'encercler Dvinsk, la grande ville qui est située sur la route de Saint-Pétersbourg. Après les reculs stratégiques de l'été, les Russes redeviennent maîtres du terrain car ils sont plus adaptés aux conditions climatiques de l'automne et de l'hiver. D'ailleurs, dans un communiqué officiel en date du 3 octobre, l'état-major du tsar déclare "Le passage méthodique de la défensive à l'offensive s'effectue avec une habileté et une insistance dignes de troupes de grande valeur". Ce beau texte laisse assez froid les Allemands qui mènent une opération en tenaille, et avec de l'artillerie de gros calibre, en vue de prendre Dvinsk. Fidèles à leur tactique, chaque fois que cela est possible envers des unités trop avancées, les Russes mènent des contre-attaques, souvent très meurtrières. La population de Dvinsk(11), son administration avec l'essentiel de ses usines, sont évacuées vers l'est. Les Russes veulent en faire un point dur, un point de fixation, un Verdun avant l'heure, pour enrayer la marche des Allemands vers l'est. Sa périphérie se couvre de tranchées adaptées à l'hiver. Prendre la ville par un assaut frontal va demander d'énormes efforts, ce qui n'entame pas, pour le moment, la volonté des Allemands d'y arriver. 700 000 feldgraus(12) et 300 canons lourds se massent à ses abords et, le 6, les premiers assauts se déroulent au nord-ouest de la ville. Comme en France, la première ligne de tranchée est conquise au prix de lourdes pertes. Comme en France encore, cela ne va pas plus loin. Les conditions atmosphériques aidant, tout le monde se met sur la défensive et, à part les escarmouches quotidiennes inhérentes à la guerre de tranchées, le front se stabilise. De temps en temps, quand la météo le permet, des avions allemands bombardent la ville et les ensembles ferroviaires des alentours qui ravitaillent les défenseurs de la cité...

Partie assez rapidement, la poussée au nord vers Riga, qui est le grand port russe de la mer Baltique, se trouve, elle aussi, très ralentie. Les navires russes viennent assez souvent contrebattre les batteries allemandes qui sont stationnées, loin, au sud de la ville...

Le 15, des sous-marins britanniques "nettoient" la mer Baltique. Un contre-torpilleur est coupé en deux, les autres unités allemandes s'enfuient(32) vers des endroits où les hauts fonds les protègent. Les importations de minerai de fer suédois vers l'Allemagne sont immédiatement stoppées...

Au sud du Pripet, c'est toujours une guerre de mouvement. Avec la boue, la progression austro-hongroise s'en trouve ralentie pour ne pas dire arrêtée. En plus, une partie des unités sont détournées pour mener la nouvelle guerre balkanique qui vient de commencer. Comme au nord, les Russes mettent à profit ces conditions favorables pour se ressaisir et reprendre l'offensive. Même s'ils sont mieux adaptés matériellement et physiologiquement, ce ne sont pas des surhommes, et les opérations se mènent le plus souvent au ralenti. Le 12, dans la région de Loutsk, l'armée tsarine enfonce le front sur le fleuve Styr et récupère des pièces d'artillerie avec 2 000 soldats et 160 gradés, tous sont amenés en captivité. En certains endroits, les armées austro-hongroises reculent franchement...

 

Sur le front italien, les Transalpins mènent deux offensives le long du fleuve Isonzo. Près de sa source, dans le secteur de Tolmino, et à son embouchure dans le Carso à Goritza pour tenter de percer en direction du grand port de Trieste qui reste l'objectif principal de la nation. Au nord, dans les Alpes Carniques, le front se réactive en ce début de mois...

Au nord-ouest, à la pointe du lac de Garde, le 15 octobre et après 3 jours de lutte, les transalpins prennent la zone fortifiée de Pregasina qui domine la vallée du Ledro. C'est le point avancé du groupe fortifié de Riva, à l'ouest du lac de Garde. Les assaillants s'établissent solidement sur les positions conquises. Le 27, les troupes italiennes complètent la conquête de la rive gauche du fleuve du Panola, en occupant plusieurs localités...

En venant vers l'est, la progression des Italiens dans les Alpes Carniques est notable, malgré l'activité de l'artillerie austro-hongroise, mais c'est juste une occupation territoriale, sans aucun objectif stratégique...

Près des sources de l'Isonzo, la progression est plus importante sur les hauteurs de Santa-Maria et de Santa-Lucia. De leur côté, les austro-hongrois qui se battent toujours à 1 contre 2, mais qui sont très bien équipés en artillerie, l'utilisent sans compter pour éviter de trop reculer. Les attaques et les contre-attaques se succèdent fréquemment, sans progrès réels de part et d'autre...

A partir du 18 débute la troisième offensive italienne de l'Isonzo près de son embouchure. Elle n'a pas plus de succès que les précédentes. Elle se poursuit par des duels d'artillerie. Le 25, c'est un nouvel assaut sur un front de 8 kilomètres au sud de Goritza et les progrès sont sensibles. Mais, comme en Artois, en Champagne et en Russie devant Dvinsk, la première ligne cède en certains points, mais le front ne s'écroule nulle part...

En fin de mois, l'aviation italienne accomplit des raids heureux sur le plateau de Bainsizza et sur le Carso. Les ensembles ferroviaires de Valle-Laca avec la ligne de Goritza à Trieste sont sérieusement touchés. Des campements et des colonnes marches sont aussi bombardées...

 

Dans les Balkans, sans revenir aux origines de la guerre 14-18, c'est bien la Serbie qui, en refusant d'ouvrir ses frontières aux enquêteurs austro-hongrois après l'attentat de Sarajevo le 29 juillet 1914, est l'élément déclencheur de la Première guerre mondiale. Depuis cette date, la Serbie fait partie de la coalition alliée mais, à part la région de Belgrade, elle n'a que très peu été touchée par les combats. Bombardée par des monitors qui naviguent sur la Save, Belgrade est prise le 30 novembre 1914 par le général Oskar Potiorek puis libérée par le maréchal Radomir Putnik le 15 décembre suivant. Depuis, la Serbie est régulièrement bombardée, mais de loin. Sur le front de l'est, les empires centraux guerroient alors presque exclusivement contre les armées impériales russes. Depuis longtemps les Serbes ont évacué Belgrade, jugée bien trop près de la frontière austro-hongroise et l'ont remplacée par Nis, dite Capitale de guerre, qui est située presque au centre du pays...

En ce début octobre, les incidents de frontière se multiplient entre soldats bulgares et serbes. Tout le monde sait, bien que cela ne soit pas encore officiel, que la Bulgarie va attaquer la Serbie. D'ailleurs, dès le 1er octobre, les Alliés font savoir au gouvernement serbe qu'ils interviendraient si elle était menacée. Le 2, un bataillon allemand essaye de forcer le passage de Semendria au nord du pays, mais c'est un échec. Le lendemain, c'est l'Autriche-Hongrie qui crée des incidents de frontière avec la Roumanie...

En prévision de l'attaque bulgare, et à l'invitation pressante du Premier ministre grec Elefthérios Venizélos en date du 28 septembre, le 5 octobre, des troupes franco-britanniques sont déroutées des Dardanelles pour être réorientées vers le port grec de Salonique. Au final, ce sont 400 000 soldats et 2 000 canons qui seront débarqués en ce lieu. Ce corps expéditionnaire, dit Armée d'Orient(13), est placé sous le commandement du général d'origine carcassonnaise Maurice Sarrail qui remplace le général Maurice Bailloud resté aux Dardanelles. Les buts de guerre qui lui sont assignés sont simples. D'une part assurer le ravitaillement de l'armée serbe qui manque de tout par la voie ferrée qui relie Salonique à Nis et, d'autre part, combattre l'armée bulgare à l'est pour éviter l'encerclement des armées serbes...

La stratégie d'invasion de la Serbie prévue par le maréchal allemand August von Mackensen qui commande l'ensemble des opérations pour les empires du centre, est tout aussi simple. Au nord, sur la Save et le Danube, les troupes allemandes et austro-hongroises se dirigeront vers le sud après avoir pris Belgrade, au sud-ouest les troupes austro-hongroises se dirigeront vers Pristina et, à l'est, les troupes bulgares qui sont chargées de donner "Le coup de poignard dans le dos", se dirigeront vers Skopje au sud de Nis. L'objectif final est d'encercler l'armée serbe et de l'anéantir...

Dès le débarquement à Salonique, les unités alliées de l'armée d'orient s'embarquent dans des trains en direction du nord. Il est urgent pour elles de rejoindre la gare d'Uskub afin de prêter main forte aux armées serbes via la vallée du Vardar. Mais les Bulgares sont plus rapides, et les troupes s'arrêtent en gare de Stroumitza. Sur la mer Noire, deux escadres russes se mettent en position devant Varna et Gourgas pour assurer le blocus de ces ports et empêcher leur ravitaillement par la flotte turque...

Le 8, les Austro-Hongrois pénètrent en Serbie en franchissant la Drina. Le lendemain, les troupes des empires centraux franchissent le Danube et prennent Belgrade totalement évacuée. L'armée serbe résiste avec vaillance et, devant Belgrade, elle recule en bon ordre pour éviter l'encerclement. Le 12, l'armée Bulgare, dont le gouvernement n'a pas encore déclaré la guerre aux Serbes, s'ébranle en direction de Vlassina au sud de Nis. Malgré leur bravoure, les Serbes reculent partout, tout en infligeant des pertes sévères aux assaillants. Le 18, avant de reculer vers le sud, les Serbes minent le Danube, ce qui le rend impropre à la navigation. Le 21, la ligne de chemin de fer qui relie Salonique à Nis est coupée en plusieurs endroits par les Bulgares. Ce même jour, les escadres franco-britanniques bombardent les ports bulgares situés sur la côte de la mer Égée, notamment et pendant plusieurs jours, le port de Dédé-Agatch (maintenant Alexandroúpolis). Le 23, des pluies torrentielles gênent la progression des armées bulgares, mais ne les arrêtent pas et elles enlèvent Skopje en Macédoine. Le 25, les Alliés arrivent en gare de Stroumitza et ils continuent de progresser à pied par la vallée de la Tcherna pour tenter de rejoindre Velès. Ils seront bloqués à Gradsko. Ce même jour, les Bulgares prennent Uskub, évacuée par les Serbes, et près de Nis, ils font leur jonction avec les armées Allemandes venues du nord. Le lendemain, les Alliés débarquent des troupes à Dédé-Agatch pour essayer de couper la voie ferrée qui relie Salonique à la Turquie. Le 27, en forçant les Bulgares à abandonner Ichip, c'est le premier succès de l'Armée d'Orient. Ce même jour, les Serbes reprennent Velès. Le 28, les Alliés mettent en place un service de ravitaillement pour l'armée serbe à travers le Monténégro au départ du port d'Antivari (maintenant Bar), via le chemin de fer en direction de Belgrade. D'autres convois empruntent la route en traversant les montagnes monténégrines en direction de Nis. Le dernier jour du mois, les Serbes reculent encore et les Alliés sont bien trop loin au sud pour pouvoir leur prêter main forte. Le destin de la Serbie est scellé...

La propagande antiserbe menée depuis longtemps par l'Autriche-Hongrie a pour conséquence de nombreuses exactions commises par les militaires à l’encontre des civils. Viols, pendaisons, destructions de villages, de cultures, puits empoisonnés sont maintes fois mentionnés. Certains historiens parlent d'ailleurs de "solution finale" pour forcer les départs des populations serbes...

 

Mais revenons à Barbentane et c'est l'Écho de décembre qui en relate les nouvelles. C'est un portait de la reine de Belgique, Élisabeth(14) dite la Reine infirmière (titre par ailleurs bien usurpé), qui fait l'éditorial de cet Écho...

Il s'ensuit un article "Pour la Patrie", assez dithyrambique mais il est d'actualité. Il est suivi de la "belle page" du devoir d'une fillette rapporté par l'adjudant Émile Pialot...

La déclaration de guerre entre la Bulgarie et la France du 16 octobre 1915 est notée. Le samedi 6 novembre, 5 nouveaux soldats partent au front, dont Claude Barnard pour la Serbie...

7 malades sont cités, tous avec leur état de santé. A noter que pour Lucien Gautier, la censure est passée, et nous ne savons pas où il a été sérieusement blessé, avec amputation du médius de la main droite...

C'est Louis Fontaine, du 7ème génie d'Avignon, qui est décoré de la Croix de guerre pour un fait d'arme en date du 29 août dans la construction d'une sape, on ne sait pas où. Le vicomte Camille Terray est promu capitaine...

Depuis le 12 octobre, Louis-Joseph Raousset-Fortuné, dont on était sans nouvelles, signale qu'il est prisonnier à Limburg en Allemagne. Antonin Vernet et Émile Vayen sont portés disparus, hélas tous les deux sont déjà morts et on ne le saura que bien plus tard...

8 poilus sont inscrits au Martyrologe : Célestin Védrine, Frédéric Castan, Joseph Rey, Jean-Marie-Baptistin Bon (dit du Maliven), Léon-Martial Bruyère, Eugène Crozet, Paulin Marteau et Emmanuel de Courey fils de la vicomtesse Max de Courey, sœur du comte Terray...

En octobre 1915, 5 Barbentanais meurent pour la France :

· Jean-Marie-Baptistin Bon, dit Bon du Maliven, né à Barbentane, 20 ans, cultivateur, célibataire, il était soldat de 2ème classe au 413ème régiment d'infanterie. Il est tué le 1er octobre 1915 à La Sape n°IV dans le Pas-de-Calais lors de la bataille de l'Artois(15). Un service funèbre en sa mémoire est célébré le 20 novembre 1915 en l'église de Barbentane. Il est inscrit sur notre Monument aux Morts et sur le nécrologe qui est dans l'église. Sa photo, figure sur le Tableau d'Honneur en mairie de Barbentane ;

· Joseph Rey, né à Barbentane, 32 ans, cultivateur, marié, père d'un enfant, il était soldat de 2ème classe au 237ème régiment d'infanterie. Il est tué d'une balle en pleine tête le 5 octobre à Souchez dans le Pas-de-Calais lors de la bataille de l'Artois. Un service funèbre en sa mémoire est célébré le 13 novembre en l'église de Barbentane. Il est inscrit sur notre Monument aux Morts et sur le nécrologe qui est dans l'église ;

· Pierre Bertaud, né à Lyon, 21 ans, ciseleur d'or, il était soldat de 2ème classe au 1er groupe d'aviation. Il est tué à Vitry-la-Ville dans la Marne le 10 octobre 1915 par l'explosion d'une bombe qu'il plaçait sous un avion. Son frère Jean-Marie est lui aussi mort pour la France le 5 avril 1915. Bien qu'ils ne soient pas natifs du village, c'était des barbentanais de cœur car leur oncle, Jean-Marie Bertaud, pare l'autel et installe le catafalque dans l'église à chaque service funèbre en hommage aux morts pour la France. Un service funèbre en leur mémoire est célébré le 3 janvier 1916 en l'église de Barbentane. Son nom figure sur le nécrologe de l'église ;

· Frédéric-Vincent Castan, né à Bône (Algérie), 27 ans, bourrelier, marié à une Barbentanaise, père d'un enfant, il était soldat de 2ème classe au 3ème régiment de tirailleurs indigènes. Il est grièvement blessé le 27 septembre par un éclat d'obus probablement à l'épine de Védegrange dans la Marne, il décède à Paris à l'hôpital de la Charité le 22 octobre 1915. Un premier service funèbre est célébré le 25 octobre à 8h30 à l'église de Saint-Germain-des-Prés à Paris en présence de Barbentanais. Il est immédiatement enterré au cimetière d'Ivry (Val-de-Marne) et il est fort probable qu'il y soit encore. Un autre service funèbre en sa mémoire est célébré le 3 novembre 1915 en l'église de Barbentane. Il est inscrit sur notre Monument aux Morts et sur le nécrologe qui est dans l'église ;

· Emmanuel-Louis Laurent, né à Barbentane, 36 ans, marié, père d'un garçon de 5 ans mort au mois de mai 1915 en 4 jours par un mal implacable, ancien engagé volontaire, il était soldat de 2ème classe au 64ème bataillon de chasseurs-alpins. Il est tué dans une tranchée à Muhlbach-sur-Munster dans le Haut-Rhin par un éclat d'obus le 30 octobre au moment où il finissait une lettre. Son frère, Pierre, est lieutenant d'artillerie. Un service funèbre en sa mémoire est célébré le 9 décembre 1915 en l'église de Barbentane. Il est inscrit sur notre Monument aux Morts et sur le nécrologe qui est dans l'église. Sa photo, en civil, figure sur le Tableau d'Honneur en mairie de Barbentane.

Au mois d'octobre, 2 célébrations funèbres sont données. Henri Moucadeau le 19 octobre, et Célestin Védrine le 28 octobre. Une célébration est donnée en mémoire de Frédéric Castan le 3 novembre...

Dans la rubrique Nécrologie, mention est faite du décès de la mère supérieure des Sœurs de la Congrégation de Saint-Joseph-des-Vans (Ardèche) d'où sont originaires les sœurs qui gèrent l'hospice du village...

Un service solennel est célébré le 7 novembre en mémoire des soldats tombés au champ d'honneur depuis le début de la guerre...

Dans le courrier militaire, ce sont Louis Ayme et Joseph Revial qui soulignent la somme considérable en or recueillie au village ; c'est Jean-Baptiste Bonjean qui se fait arracher l'Écho avant d'avoir fini de le lire ; Léon Jaoul en date du 8 octobre signale de la neige ; c'est Paulin Marteau qui, avant d'en mourir, signale son opération très douloureuse ; Jean Martin annonce qu'il est toujours dans les tranchées à 20m des Boches ; c'est Guillaume Marteau qui relate les conditions de sa blessure à la cheville gauche, blessure pansée au poste de secours par Meyer, un Barbentanais ; c'est Léopold Michel qui, à Fez (Maroc), lors d'une promenade reconnaît Anastase ; c'est Joseph Fontaine qui depuis 20 jours ne s'est pas reposé, ni même lavé les mains ; c'est H. Glénat qui désespère de pouvoir causer avec quelqu'un "dans notre langue" ; c'est Gaston Nazon qui signale qu'au 149ème le canon de 75 est appelé Jean-Pierre ; c'est Louis Sérignan qui est tout heureux, bien qu'il ait perdu une jambe, d'être en France ; c'est Louis Bernard qui signale que de ses trois frères, l'un est en Serbie, l'autre en Belgique et le dernier en France ; c'est Louis Moucadeau qui remercie le service et le discours donnés à son frère Henri, mort au combat ; c'est Claude Bertaud qui a chanté la belle messe de Gounod et c'est quand même Charles Granier qui remercie l'Écho dans une lettre écrite en vers...

Dans l'état religieux, seuls 7 décès sont notés, dont un bébé de 9 mois...

Guy

La Situation dans le Monde en Guerre en octobre 1915

En ce premier mois de l'automne 1915, pas un seul rayon de soleil ne vient réchauffer la triste atmosphère saisonnière. Au contraire, la guerre avec son cortège funèbre de morts et de blessés, se généralise maintenant dans tous les Balkans. Cette région est assez méconnue, même maintenant. Vaste de 550 000km2, ce qui est l'équivalent de la France métropolitaine, elle a une géographie très complexe faite de nombreuses chaînes montagneuses et de vallées cloisonnées. D'ailleurs, elle tire son nom de la chaîne de montagne, dite "Стара" (Grand Balkans ou Vieille Montagne), qui traverse la Bulgarie d'est en ouest. Elle est composée d'une myriade de peuples et toutes les religions s'y côtoient, pas toujours de façon pacifique d'ailleurs. En 1915, à part quelques villes côtières, plus ou moins touchées par la modernité, la vie reste rude et les habitants sont de farouches agriculteurs qui ne se séparent jamais de leurs armes individuelles. Depuis 50 ans, elle se libère petit à petit du joug ottoman dans des guerres à répétition. La dernière, dite "deuxième guerre balkanique(1)", a duré 2 ans et s'est terminée le 10 août 1913, par le traité de Bucarest en Roumanie. Ce nouveau partage, où la Bulgarie perd une grande partie de ses conquêtes et de ses acquis des guerres antérieures, laisse un goût amer au belliqueux roi du pays, Ferdinand Ier, né prince Ferdinand de Saxe-Cobourg-Gotha, qui s'est généreusement octroyé le titre de tsar en 1908…

Situation des belligérants en ce premier mois de l'automne 1915. La Triple-Entente initiale, Grande-Bretagne, France et Russie, s'est élargie dès les premiers jours de la guerre en 1914 avec la Belgique, puis la Serbie et l'Albanie et enfin l'Italie depuis le 24 mai 1915(2). Les Empires-Centraux, Allemagne et Autriche-Hongrie, sont rejoints par l'Empire ottoman en octobre 1914 et, en ce mois d'octobre 1915, par la Bulgarie...

Près des côtes grecques, un chalutier français armé

Ruines du château de la Harazée près du Four-de-Paris (Meuse)

Transport de troupes austro-hongroises dans le Carso sur le front Italien

Automitrailleuse belge de type Mors sur le front russe

Un Blériot XI de l'armée serbe

Canon de marine allemand de 320 mm d’une portée de 45 km

Un Voisin de type III, un avion français,

Un projecteur anti-aviation de l’armée austro-hongroise sur le front de l’Izonso en Italie

Spahis algériens à Stroumitza en Serbie

Au cimetière de Moosch (Haut-Rhin), le carré des soldats français (photo autochrome)

Carte du front des Balkans et du Moyen-Orient

Pont-à-Mousson, un hôpital détruit par l’artillerie allemande

A Paris, gare de La Chapelle, grands blessés rapatriés d’Allemagne

Le général Sarrail sur le front d’Orient

Prisonniers allemands sur l’île d’Oléron (Charente-Maritime)

Quelle folie la guerre !

Zone de Texte: Pour revenir à la page d'accueil de mon site de Barbentane, cliquez ici !!!
Zone de Texte: Vous pouvez toujours m'écrire, cliquez ici et ce sera fait
Ou alors à cette adresse : bne.lagramillere@free.fr

Barbentane, le plus beau village de l'Univers

Tous mes remerciements à toutes celles et ceux qui m’ont aidé dans ces tâches de reconstitution de notre patrimoine barbentanais : prêt de brochures, de photos, des Écho de Barbentane, aide, corrections et autres…

Guy

Zone de Texte: Pour accéder aux archives des Écho déjà publiés, cliquez ici !!!

Tonneaux d’avoine pour les chevaux de la cavalerie britannique de l’armée d’Orient

Débarquement de vivres et de matériel par les Alliés à Salonique en Grèce

L’avion de type Voisin qui s’est écrasé au Trocadéro à Paris le 11 octobre 1915

Le 4 octobre, c'est l'entrée en guerre de la Bulgarie contre la Serbie, mais elle ne déclarera officiellement la guerre à la Serbie que le 14 du mois. Du coup, par le jeu des alliances, cette dernière se joint aux Empires-Centraux, et les Alliés comptent maintenant un ennemi supplémentaire. C'est aussi le constat d'un formidable échec quant aux buts de guerre de l'expédition des Alliés dans les Dardanelles. Prévue initialement pour avoir un accès militaire à la mer Noire, elle avait aussi comme objectif diplomatique d'encourager les Bulgares à venir dans le camp de la Triple-Entente, ou, au minimum, qu'ils restent neutres. C'est vraiment loupé et cela va complètement réorienter la stratégie des nations alliées dans les Balkans…

Le 21 octobre, c’est la première communication intercontinentale par TSF entre Arlington (USA) et la tour Eiffel à Paris...

 

Dans le monde politique

En France, Le 7 octobre, le général Joffre, chef de l’état-major, dans un rapport au gouvernement, annonce la suspension des opérations en Champagne et en Artois, l’armée n’ayant pu percer les deuxièmes positions allemandes. Le 9, c'est la parution du décret ordonnant la mobilisation des indigènes de plus de 18 ans dans l'Afrique Occidentale Française (AOF) pour qu'ils soient incorporés dans les armées métropolitaines et d'orient pour la durée de la guerre. Le 12, à la Chambre, René Viviani, président du Conseil, lit une déclaration sur la situation dans les Balkans et fait connaître que l’expédition de Salonique a lieu en plein accord avec le gouvernement britannique et avec la coopération des troupes russes. Malgré une séance mouvementée, l'ordre du jour de confiance est voté par 372 voix contre 9. Le lendemain, au Sénat, le président du Conseil annonce qu'il est autorisé à dire que l'Italie ne restera pas étrangère à l'action commune dans les Balkans. Suite à l'échec des négociations avec la Bulgarie et la Grèce, Théophile Delcassé, ministre des Affaires étrangères, donne sa démission et c'est René Viviani qui assure l’intérim. Le 23, Louis Malvy, ministre de l'Intérieur, soumet au Conseil des ministres un projet tendant à donner aux maires et aux préfets le droit de taxer toutes les denrées et matières nécessaires à la subsistance, le chauffage et l'éclairage. A partir du 25, et sur deux jours, le roi George V, le président de la République Raymond Poincaré, le ministre de la Guerre Alexandre Millerand et le général Joseph Joffre visitent les troupes britanniques et françaises sur le front. Le 27, Joseph Joffre porte à la connaissance des troupes un ordre du jour du roi britannique affirmant que "ses armées sont fières de se battre à côté de leurs camarades français". Le même jour, la Commission de l'hygiène publique à la Chambre se prononce contre l'incorporation de la classe 1917 (ceux nés en 1897 et qui ont à peine 18 ans), au 15 novembre et reporte leur incorporation au 15 mars 1916, soit avec un sursis de 6 mois. Le 29, c'est la démission du président du Conseil René Viviani après 16 mois d’exercice. Un nouveau ministère est constitué avec à sa tête Aristide Briand. Il se compose de 5 ministres d'état : Charles de Freycinet(3), Émile Combes, Léon Bourgeois, Jules Guesde et Denys Cochin ; avec Alexandre Ribot aux Finances, René Viviani à la Justice, Louis Malvy à l'Intérieur, le général Joseph Gallieni à la Guerre, l'amiral Lucien Lacaze à la Marine et Gaston Doumergue aux Colonies pour ne citer que les plus importants. Le dernier jour du mois, afin de lutter contre la hausse des prix, la préfecture de Paris fait placarder le prix de vente des denrées alimentaires pour la semaine...

En Belgique occupée, le 12 octobre, l'infirmière britannique, Édith Louisa Cavell est fusillée, avec 6 autres résistants. Âgée de 50 ans, membre à Bruxelles d’une organisation qui aide les prisonniers alliés à gagner les Pays-Bas, elle en a fait évader plus de 200. Arrêtée par traitrise le 5 août 1915, jugée le 7 octobre par un tribunal militaire allemand, elle est condamnée à mort le 11 octobre. Elle deviendra un des symboles de la lutte patriotique des Britanniques contre la barbarie allemande...

En Grande-Bretagne, le 13 octobre, Edward Grey expose à la Chambre des Communes la politique de la Quadruple-Entente(4) en Orient et fait une déclaration analogue à celle de René Viviani en France. Le 19, le très influent ministre anglo-irlandais Edward Carson, en désaccord avec la politique menée dans les Balkans, démissionne...

En Allemagne, le 8 octobre, par voie officielle, Guillaume II assure à la Grèce que la Bulgarie ne l'attaquera pas...

En Russie, le 4, le gouvernement, au nom de la Quadruple-Entente, remet un ultimatum à la Bulgarie pour lui demander de rompre "ouvertement avec les Puissances centrales" et de renvoyer, sous 24h, tous les officiers allemands et austro-hongrois attachés à son l’état-major. Le 20, le tsar de Russie adresse aux peuples slaves un manifeste dénonçant la trahison du tsar Ferdinand de Cobourg, prince allemand en Bulgarie...

En Grèce, le 4, Elefthérios Venizélos déclare à la Chambre grecque que son pays remplira rigoureusement ses obligations à l'égard de la Serbie et se rangera aux côtés de la Quadruple-Entente. Le lendemain, il est reçu par le roi de Grèce Constantin Ier, un germanophile convaincu qui n'hésite pas à s'habiller en maréchal allemand et qui a épousé Sophie de Prusse, la fille de Frédéric III d’Allemagne. Ce dernier déclare à son premier Ministre qu'il ne peut suivre sa politique et, malgré un vote de confiance de 142 voix contre 120 de la Chambre grecque à sa personne, il l'oblige à démissionner. Le 7, un nouveau cabinet, qui représente la neutralité absolue, est présidé par Aléxandros Zaïmis. Il ne s’oppose pas au débarquement allié à Salonique, mais repousse, par une note envoyée à Belgrade le 9, toute intervention armée aux côtés des Alliés et des Serbes. Pour ménager aussi les puissances de l'Entente, il leur déclare dans le même temps que "la neutralité grecque continuera à avoir le caractère de la plus sincère bienveillance". Le 17, Francis Elliot, l’ambassadeur britannique, promet au nouveau premier Ministre grec que son gouvernement cèdera l’île de Chypre à la Grèce si elle prend les armes en faveur de la Serbie. Le lendemain, la réponse est un "non" catégorique. Le 29, Aléxandros Zaïmis fait une communication au ministre des Affaires étrangères italien où il écrit que "contrairement à des bruits tendancieux répandus par la presse austro-allemande ou bulgare, la Grèce a rendu et continue à rendre à la Serbie et aux puissances de l'Entente des services inappréciables"...

En Italie, le Conseil des ministres du 6 octobre hésite sur la conduite à tenir et l'aide à apporter aux Alliés dans les Balkans. Le même jour, pour leur signifier leur départ, le ministre des Affaires étrangères remet aux personnels de l'ambassade bulgare à Rome leurs passeports. Le 11, une note officielle déclare que l'absence momentanée de troupes italiennes à Salonique n'implique pas une abstention de l'Italie ou un refus d'intervenir. Le 19, enfin, l’Italie déclare la guerre à la Bulgarie...

En Serbie, le 8 octobre, le gouvernement décide de transférer les ministères et les banques de Nis(5), jugée trop près de la Bulgarie, à Pristina située plus à l'ouest. Le 14, un communiqué constate que "la Bulgarie a commencé les hostilités, comme en 1913, traîtreusement, par surprise et sans déclaration de guerre". Le lendemain, le Gouvernement décide que, dans le cas d'une progression sérieuse de l’ennemi, son siège et les administrations de l'État seraient transférés à Mitrovitza, près de la frontière monténégrine. Devant les exactions commises contre les civils par les troupes ennemies, il demande aux femmes et aux enfants qui résident en Macédoine serbe d'aller se réfugier au Monténégro voisin. Le 28, tout en confirmant Nis comme leur capitale, les Serbes mettent cette ville en état de défense...

En Roumanie, comme la Grèce, ce pays se déclare neutre dans le conflit bulgaro-serbe le 14 octobre. Le 28, le président du Conseil roumain, Ion Bratianu, refuse le libre passage sur son territoire de l’armée russe qui veut aller renforcer les Serbes...

En Suisse, le dimanche 17 octobre, un avion allemand de type Aviatik, croyant bombarder la France, largue 8 bombes sur La Chaux-de-Fonds, ville frontalière, dans le canton de Neuchâtel. Apparemment, le pilote a visé l’usine à gaz et la voie ferrée de Saignelégier sans les atteindre. Les dégâts matériels sont minimes, mais 4 personnes sont blessées. Le 21, soit 4 jours après, la Suisse proteste officiellement à Berlin et demande des réparations...

Au Japon, le 19 octobre, le gouvernement adhère à la déclaration alliée du 5 septembre 1914, ce qui l’engage à ne pas signer de paix séparée avec les ennemis de la Triple-Entente...

Dans le monde des Arts et des Lettres, le 7 octobre 1915, alors que le marché de l'art français est fermé en raison de la guerre, le peintre mexicain Marius de Zayas et le photographe étasunien Alfred Stieglitz, ouvrent à New York, au numéro 500 de la cinquième avenue, une galerie d'art qu'ils nomment Modern Gallery. Malgré des expositions de prestige avec des tableaux de Georges Braque, Franck Burty Haviland, de Zayas, Arthur Dove, Francis Picabia, Pablo Picasso, Abraham Walkowitz, Vincent van Gogh, Constantin Brancusi, Paul Cézanne, Paul Gauguin, des sculptures d'Adolf Wolff, des photographies de Stieglitz et des objets d'art nègre, les ventes sont rares et elle déçoit ses créateurs...

Dans la vie publique, le 17 octobre, à New York c'est la naissance d'Arthur Miller, écrivain et dramaturge étasunien, il décèdera le 10 février 2005 à Roxbury aux USA. Le 24, toujours à New York, c'est la naissance de Bob Kane, dessinateur étasunien de comics et créateur de Batman, il décèdera le 3 novembre 1998 à Los Angeles aux USA...

Sur les fronts de batailles

Sur le front en France. Dès le début du mois, la situation dans les Balkans oblige les gouvernements français et britannique à prélever, dans l'urgence, des forces importantes sur le front occidental pour former rapidement un Corps expéditionnaire, destiné au nouveau théâtre d'opérations qui vient de s'ouvrir en Orient. Petit à petit, en remplacement, des troupes issues des colonies africaines et asiatiques vont venir combattre en France…

Les bombardements allemands se poursuivent avec la même régularité que depuis le début de l'été. Sur la côte belge, les flottes franco-britanniques, bien pourvues en canons à longue portée, coopèrent avec les artilleurs franco-belges pour détruire, eux aussi, les arrières ennemis notamment à Westende et Middelkerke. Petit exploit des artilleurs français, le 29 ils parviennent à détruire un train militaire allemand en gare de Burthecourt-aux-Chênes, au sud de Nancy...

La guerre des gaz s'intensifie. Les Britanniques sont les premiers des Alliés à s'en servir en Artois, bientôt les Français feront de même...

En octobre, trois grandes offensives, à l'initiative des états-majors franco-britanniques, se déroulent toujours sur le sol français :

· La plus ancienne, puisqu'elle a commencé le 20 juillet, se déroule dans les Vosges sur le massif du Linge. Elle est en sommeil depuis le 9 septembre. Elle se réactive le 12 octobre par une attaque surprise des Allemands au lance-flammes. Cet assaut leur permet de reprendre la première ligne française entre le Collet du Linge et le sommet du Schratzmännle. Une contre-attaque héroïque des chasseurs-alpins ne parvient pas à les en déloger. Le 16, une dernière attaque française échoue. Avec les premières neiges, un calme hivernal s'installe dans cette partie des Vosges. Dès lors, les deux camps vont se mettre à bétonner tout ce qui est possible et le massif se couvre d'ouvrages fortifiés(6). Toutefois, plus aucune attaque d'envergure n'aura lieu dans ce secteur jusqu'à la fin des hostilités, sauf les escarmouches quotidiennes où chaque camp s'évertue à harceler l'adversaire...

Pour cette folle attaque, qui aura duré près de trois mois, les pertes Françaises sont terribles avec 8 867 poilus, qui se répartissent en 1 157 tués, 7 611 blessés et 99 disparus. Les pertes allemandes sont moindres, avec 7 500 Allemands(7). Mais, avec le recul, on peut maintenant affirmer que tous ces hommes ont été sacrifiés inutilement...

· Dans la bataille "de diversion" qui se déroule en Artois, les circonstances ne permettent pas de réaliser le plan concocté par Foch et French le 30 septembre. Il s'agissait, pour une partie des Français, de conforter les positions acquises précédemment et surtout de conquérir des "plateformes" pour pouvoir installer de l'artillerie. Les britanniques, qui avaient beaucoup souffert, sont laissés au repos en vue d'une prochaine attaque vers le 4 octobre. Mais les Allemands ne laissent aucun répit aux assaillants, surtout à Loos face aux Britanniques. L'attaque projetée est remise de jour en jour. Finalement, le 11, les Français se lancent dans un timide assaut près de Vimy qui, sans préparation d'artillerie ni aménagement du terrain, est un échec complet. Le 13, les Britanniques, avec à nouveau l'emploi des gaz, se ruent sur les Allemands. En 10 minutes, devant la redoutable Redoute Hohenzollern, 180 officiers et 3 583 soldats sont fauchés(8). Le lendemain, 14 octobre, Joffre et le commandement britannique arrêtent tous les combats. Foch et French sont seulement autorisés à procéder à des rectifications du front pour le rendre linéaire. L'offensive de l'Artois est terminée. Elle se solde par une tragédie humaine pour des résultats peu mirobolants. Certes, les Français ont conquis la vallée de la Souchez et partiellement la crête de Vimy, les Britanniques ont pris Loos et sont aux abords d'Hulluch, sans plus. Lens est encore loin, très loin...

Le bilan de cette bataille est une conquête de 2 kilomètres de terrain en profondeur sur une longueur de 9 kilomètres au prix de 62 000 combattants britanniques(9), 48 000 français et 30 000 allemands tués, blessés ou disparus. Si Foch ne brilla guère, le maréchal John French, peu apprécié de ses subordonnées par sa conduite tactique des opérations, est accusé d'avoir fait mauvais usage de ses réserves humaines et les réclamations pour le remplacer se multiplient...

· Dans la Seconde Bataille de Champagne, malgré des succès locaux comme à Maisons de Champagne, l'offensive est arrêtée par Pétain le 1er jour du mois. Deux raisons sont avancées, d'une part les stocks de munitions sont trop faibles, d'autre part, les pertes sont trop importantes. Cette interruption momentanée est mise à profit pour éliminer les bouts de tranchées éparses qui sont toujours tenues par les Allemands et rendre le front uniforme...

Le 6, l'offensive repart et elle enlève rapidement la butte de Tahure. Elle n'ira pas plus loin, car les Allemands se sont, eux aussi, réorganisés en consolidant leurs positions favorables, ce qui empêche toute nouvelle progression. Pendant plusieurs jours encore, sous des bombardements incessants, parfois au gaz, des actions sont encore entreprises. Les 6 et 7 octobre, un assaut permet de prendre la butte de la Brosse-à-Dents et de consolider les positions devant celle de Tahure...

Comme en Artois, la Seconde Bataille de Champagne cesse. La progression est au maximum de 3 kilomètres, plus généralement 2 kilomètres sur les 25 kilomètres de la longueur du front de l'attaque. Les pertes françaises sont catastrophiques, avec près de 180 000 poilus (27 851 tués; 98 305 blessés et 53 658 prisonniers ou disparus). Les pertes allemandes sont bien moindres avec 140 000 tués, blessés, disparus et prisonniers…

Au final, pour toutes ces attaques, on est très loin des résultats espérés. En Champagne, les cavaliers, amenés tout spécialement pour exploiter la percée souhaitée, se sont mués en courageux chasseurs à pied. Un an après le début de la guerre des tranchées, ces batailles démontrent, dans le sang, que sur le front occidental on ne peut plus traverser les lignes pour retrouver une guerre de mouvement. Si prendre une première ligne est faisable au prix de lourdes pertes, en prendre une deuxième reste très hypothétique, et ne parlons pas des suivantes qui ne sont même pas abordables. Alors, les stratèges, tant Alliés qu'Allemands, se mettent sérieusement au travail avec des ingénieurs pour trouver des solutions techniques. L'artillerie de tranchée et l'aviation seront les premières à profiter de ces innovations...

A Verdun, où il ne peut rien se passer selon l'état-major français, et en application d'un décret militaire pris par le général Auguste Dubail le 12 août, les artilleurs travaillent à désarmer les forts situés à l'est de la ville. L'opération se termine le 15 octobre. 43 batteries lourdes, 11 batteries plus légères et 128 000 obus sont réacheminés vers les autres théâtres d'opération. Les forts de Douaumont, Hardaumont, Thiaumont, Vaux, Froideterre, La Lauffée, Souville, Belleville, Saint-Michel, Moulainville et Belrup ne sont plus que des carcasses vides...

A partir du milieu du mois, les Allemands, en vue de contrebalancer les attaques du Linge, de Champagne et de l'Artois, lancent de violentes, mais sporadiques attaques, au nord d'Arras et au Vieil-Armand dans les Vosges. Ce sont des attaques de diversion, elles n'ont pas l'ambition de percer. A partir du 19, à l'est de Reims dans la Marne, c'est plus sérieux. L'attaque se déroule sur un front de 10 kilomètres sans aboutir. Elle reprendra le 27 au même endroit, sans plus de succès. Le lendemain, elle parvient à percer sur une centaine de mètres à la butte de Tahure en Champagne…

 

Dans la guerre aérienne, la campagne de bombardement des Alliés sur les ensembles ferroviaires allemands se poursuit. Par l'accroissement du matériel, essentiellement des Voisin III qui peuvent emporter 150kg de bombes, et avec de nouveaux pilotes récemment formés, les escadrilles sont plus conséquentes que durant l'été. Les soixante avions simultanément en l'air sont très souvent dépassés. Les villes allemandes comme Trêves et la plaque tournante de Metz sont particulièrement visées plusieurs fois dans le mois. En Champagne, l'aviation tactique française fait ses premiers pas, mais ce n'est pas sans risques. En volant trop haut, les pilotes ne peuvent pas distinguer les tranchées amies des ennemies. Et, en volant trop bas, les avions sont faciles à descendre. Alors, on délaisse les premières lignes pour ne s'attaquer qu'aux positions arrières. A chaque fois que la météo le permet, des avions, souvent en solitaires, attaquent les boyaux, les rassemblements de troupes et les convois de ravitaillement. Le coup est rude pour les Allemands qui sont obligés de camoufler leurs boyaux particulièrement visés. Le 19, et pour la première fois, des avions sont détruits au sol sur le terrain allemand de Burlincourt, au nord-est de Château-Salins. Le 22, c'est celui de Cunel, entre Argonne et Meuse, qui est visé. De temps en temps, des Zeppelins, ou des Taubes, font de même sur les arrières français, mais c'est de façon tellement inégale que c'est sans conséquence ou presque. Les raids de Zeppelin sur la Grande-Bretagne se poursuivent de nuit, mais le mauvais temps rend ces bombardements quasi inefficaces...

Dans la guerre maritime, en Méditerranée, le sous-marin allemand U 33 qui bat pavillon austro-hongrois, quitte Cattaro le 28 septembre. Le 1er octobre il coule le vapeur français Provincia, le lendemain c'est au tour du navire britannique Arabian, puis du Sainte Marguerite, un autre navire français. Le 3, c'est l'Antonie, un vapeur britannique. Le 4, c'est le Britannique Craigston suivi du Yunan, un vapeur français. Le 5, ce sont les Britanniques Burrsfield et X130, le lendemain c'est le Grec Dimitrios et les Britanniques Scawby et Silverash. Le 7, il croise la route du transport auxiliaire français des Chargeurs Réunis, l'Amiral Hamelin au large de la Sicile, dans la mer Ionienne. C'est un vapeur de 5 000 tonnes dont les soutes sont chargées de 2 000 obus de gros calibre, 15 000 obus de 75, 2 millions de cartouches pour fusils et mitrailleuses. Il va ravitailler l'Armée d'Orient et il transporte aussi 312 soldats, des artilleurs et des rampants de l'aviation. Le sous-marin l'attaque à 7h00 du matin au canon, puis après avoir laissé une partie des hommes s'embarquer dans les chaloupes, il le coule à la torpille. L'alerte est donnée par le Danneborg, un yacht royal Danois, qui prévient les secours par radio. Les contre-torpilleurs français Mameluck et l'Amiral Herber qui naviguaient dans les parages arrivent une douzaine d'heures après, trop tard pour mener la chasse à l'assaillant. Les survivants sont recueillis par le navire hôpital britannique Dunluce Caste qui fait route vers la ville de Moudros sur l'île grecque de Lemnos. 55 soldats et 8 hommes d'équipage périssent dans ce naufrage, 48 sont blessés. Le U 33(10), commandé par le capitaine Konrad Gansser, est déjà une légende. En moins d'un mois, il rajoute 35 000 tonnes de navires coulés à son tableau de chasse déjà bien pourvu depuis son premier navire français le Pâquerette attaqué le 5 avril 1915...

Le 9 octobre les Allemands avouent officiellement la perte de 45 sous-marins...

Des femmes bénévoles emballent du pain pour les Poilus

En Italie, évacuation de la vallée du Ledro dans le Trentin-Haut-Adige

Hôpital militaire près du front belge (photo autochrome)

A Salonique, l’armée d’Orient défile devant les généraux Bailloud et Sarrail

L’Écho de Barbentane de décembre 1915

(1) Juste pour mémoire, c'est au cours de cette guerre qu'a eu lieu, et pour la première fois, l'utilisation de l'avion comme arme aérienne tant pour le renseignement que pour le bombardement. Belgrade a été bombardée par des aviateurs bulgares avec des grenades à main et, le 6 février 1913, un avion grec lance, sans succès, de petites bombes au-dessus de la flotte ottomane dans les Dardanelles.

(2) Ne pas oublier que, bien qu'aux antipodes, le Japon a, lui aussi, déclaré la guerre à l'Allemagne le 23 août 1914.

(3) Pour tout cheminot qui se respecte, l'ingénieur ariégeois Charles Louis de Saulces de Freycinet (1828-1923) est le père de la multiplication des lignes de chemin de fer qui ont tant servi l'aménagement du territoire. Pour lui, et malgré une rentabilité médiocre prévisible, "chaque préfecture et sous-préfecture se doivent d'être reliées", dans le but de désenclaver les régions mal desservies. Il est aussi le concepteur d'une norme pour la taille des écluses, connue depuis sous le nom de gabarit Freycinet. C'est lui aussi qui a fait adopter le fusil Lebel et le canon de 75, modèle 1897, par l'armée française.

(4) Bien que cette dénomination de Quadruple-Entente soit souvent employée, surtout par les journaux, ce n'est pas un terme officiel. Il sous-entend les pays de la Triple-Entente du début auquel s'est jointe l'Italie.

(5) Nis, ou Nich ou bien encore Niš, est la ville capitale de guerre de la Serbie depuis la fin de l'année 1914, c'est aussi l'une des plus anciennes villes des Balkans et d'Europe dont l'origine date de l'âge de fer. Par facilité, je n'utilise que la graphie Nis que l'on retrouve sur presque toutes les cartes de cette époque.

(6) Tous ces vestiges sont encore visibles de nos jours, beaucoup d'entre eux, pour ne pas dire la presque totalité, n'existaient pas au moment de la bataille.

(7) Malheureusement, si les pertes françaises pour chaque bataille sont assez faciles à trouver, il n'en est pas de même pour les autres combattants, qu'ils soient allemands, russes, etc... Et, parfois, les estimations des pertes sont plus que vagues...

(8) Parmi eux, John Kipling, le fils unique de Rudyard Kipling, le grand écrivain, chantre de l’engagement britannique dans la Grande Guerre. Après le conflit, inconsolable, Kipling parcourra les routes de la Gohelle pendant des années pour tenter de retrouver le corps de son fils, sans succès. Identifiés en 1991, les restes de John Kipling reposent maintenant au cimetière du Saint-Mary’s Advanced Dressing Station Cemetery, à Haisnes dans le Pas-de-Calais.

(9) La violence de la bataille de Loos peut se mesurer au très faible nombre de soldats britanniques tués lors du premier jour de l’attaque qui ont une tombe connue, à peine 2 000 sur les 8 500 qui ont disparu ce jour-là.

(10) L'U 33 ne sera jamais coulé. Il finira la guerre après avoir avarié 8 navires, en avoir coulé 82 autres pour un total de 200 000 tonnes. Il sera remis aux autorités alliées le 16 janvier 1919.

(11) Cette ville, maintenant lettone, se nomme Daugavpils et c'est devenu la deuxième localité de ce pays.

(12) Feldgrau : c'est le nom de la couleur gris-vert de l'uniforme de l'infanterie allemande. Par extension, c'est aussi devenu le nom des soldats allemands pendant les deux conflits majeurs du XXème siècle.

(13) A cette date, les éléments qui sont restés dans les Dardanelles prennent l'appellation de Corps Expéditionnaire des Dardanelles et cela jusqu'au retrait définitif des troupes de la presqu'île de Gallipoli.

(14) Élisabeth Gabrielle Valérie Marie de Wittelsbach, duchesse en Bavière, est née le 25 juillet 1876 à Possenhofen (Bavière, Allemagne). Elle décède le 23 novembre 1965 à Laeken (Bruxelles). Elle épouse Albert Ier, roi des Belges, le 2 octobre 1900 à Munich (Allemagne) et lui donne 3 enfants : Léopold III (1901-1983), Charles de Belgique (1903-1983) et Marie-José de Belgique (1906-2001). Elle est la troisième reine des Belges. Malgré ses origines, pendant la guerre de 14-18 elle fait le choix de la Belgique au détriment de l'Allemagne, ce qui lui vaudra une grande popularité auprès des Belges et la reconnaissance des États alliés.

(15) Sur l'Écho de janvier 1916, lors de son service funèbre, il est noté mort en Champagne, mais c'est une erreur car, au mois d'octobre, son régiment était bien en Artois comme cela est noté sur sa fiche SGA.

Arrière du front près de Tahure en Champagne

Aviateurs allemands faits prisonniers à Moreuil dans la Somme le 3 octobre

Convoi français de ravitaillement dans les Balkans

Cagnas près de Flirey dans la Meurthe-et-Moselle

En Suisse, la ville de La Chaux-de-Fonds est bombardée par erreur

Carte géophysique des Balkans

En 1919, la dépouille d'Édith Cavell est rapatriée à Londres

et elle reçoit tous les honneurs de la nation Britannique

Camouflage d’une route à Nomény près de Pont-à-Mousson dans la Meurthe-et-Moselle

Par décalage pour son édition, c’est l’Écho de décembre 1915 qui relate les événements d’octobre et début novembre...