BARBENTANE

en avril 1915

Par décalage pour son édition c’est l’Écho de juin 1915 qui relate les évènements d’avril et début mai...

L’Écho de Barbentane de juin 1915

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De leur côté, les Turcs se déploient dans la zone pour repousser un débarquement sur les deux rives des Dardanelles. Cette force est commandée par le général allemand Otto Liman von Sanders, avec des officiers allemands et turcs dont l'officier supérieur est Mustafa Kemal, un lieutenant-colonel de 34 ans, excellent tacticien. Tous s'accordent sur le fait qu'il est nécessaire de garder le contrôle des hauteurs surplombant le détroit. Kemal, en fin connaisseur de la péninsule de Gallipoli, considère que le cap Helles et Gaba Tepe sont les emplacements les plus probables pour un débarquement. A contrario, von Sanders estime que la baie de Besika sur la côte asiatique au sud du détroit est vulnérable car le terrain est plus favorable pour les troupes alliées qui pourraient prendre à revers les principales batteries protégeant le détroit. À ces considérations tactiques, il faut ajouter que les Turcs veulent une défense à proximité des rivages et, au contraire, les Allemands optent pour des défenses en profondeur à l'abri des tirs meurtriers des navires. Forces qui devraient ensuite se déplacer de façon rapide sur les plages de débarquement. Pour régler cette controverse(8), on partage les options tactiques. Les forces de Kemal se déploient sur les hauteurs ainsi que le long de la côte égéenne de la presqu'île. Les autres unités, plus nombreuses, s'installent sur la rive asiatique de la Turquie. Profitant du répit laissé par le regroupement de l'armée d'invasion, on consolide les forts, on fait des stocks de munitions, on construit des routes, on piège les plages possibles de débarquement, on rassemble des flottilles d'embarcations pour pouvoir traverser rapidement le détroit, on crée même une petite escadre aérienne composée de quatre appareils de reconnaissance...

 

L'attaque, initialement prévue pour le 23 avril, est repoussée de deux jours en raison du mauvais temps. Les débarquements doivent être réalisés sur six plages dans la péninsule. Une division doit prendre le contrôle du cap Helles et avancer vers les hauteurs d'Achi Baba. Les unités ANZAC débarquent au nord de Gaba Tepe d'où elles peuvent traverser la péninsule et isoler les forces ottomanes au sud. Les Français sont chargés de réaliser une attaque de diversion à Kum Kale avant de rembarquer pour soutenir l'attaque contre le cap Helles. D'autres opérations de diversion doivent être menées par la marine, dont une prévue en solitaire est confiée au néo-zélandais Bernard Freyberg(9). Il devra rejoindre à la nage la côte du golfe de Saros au nord de la péninsule pour y allumer des fumigènes sous la mitraille...

 

Le débarquement au cap Helles est réalisé sur 5 plages. Sur la plage Y, les Alliés ne rencontrent presque pas de résistance, et des reconnaissances sont menées dans l'intérieur des terres sans plus d'opposition. Mais comme les ordres sont de sécuriser cette tête de pont, aucune action n'est entreprise pour prendre le contrôle du village de Krithia, alors virtuellement sans défense. Lorsque les Alliés reprennent leur offensive le 28 avril, les Ottomans qui avaient redéployé un bataillon, parviennent à repousser toutes les attaques. Les débarquements les plus difficiles ont lieu sur la plage V située en contrebas de l'ancienne forteresse de Sedd el Bahr et sur la plage W à la pointe occidentale de la péninsule. Sur la plage V, l'attaque est menée à bord d'un charbonnier transformé, le River Clyde, qui est volontairement échoué sous la forteresse pour que les troupes puissent débarquer via des rampes sur les flancs du navire. Les autres soldats approchent des plages à bord de chaloupes ouvertes et sans protection. Sur ces deux plages, les Turcs occupent de solides positions défensives et ils infligent de lourdes pertes aux assaillants. Les soldats émergeant un par un des flancs du River Clyde sont décimés par les mitrailleuses situées dans la forteresse et sur les 200 hommes à débarquer, seuls 21 atteignent la plage. Le matin du 25 avril, les défenseurs sont à court de munitions et n'ont plus que leurs baïonnettes pour affronter les Alliés. Sur les hauteurs de Chunuk Bair, un régiment d'infanterie reçoit l'ordre de Kemal "Je ne vous ordonne pas de combattre, je vous ordonne de mourir. Le temps que vous mourriez, d'autres troupes et commandants pourront arriver et prendre vos places". C'est exactement ce que font ces valeureux soldats. Les Britanniques parviennent à prendre le contrôle des plages V et W au prix de pertes s'élevant à plus de 60%. Un seul officier irlandais survit à l'attaque et, seulement onze soldats de cette unité sortent indemnes de la campagne de Gallipoli sur un effectif de 1 012 hommes. Après les débarquements, les Alliés font peu d'efforts pour profiter de leur avantage, et en dehors de quelques opérations de reconnaissance, le gros des troupes reste à proximité des plages. L'offensive alliée perd donc de son élan et les Ottomans peuvent se regrouper et se renforcer. Les Alliés déploient alors des hydravions et d'autres appareils de reconnaissance sur l'île grecque de Ténédos mais leur nombre est insuffisant pour répondre aux besoins des services de renseignement...

 

Le même jour, alors que les troupes alliées débarquent, le sous-marin australien AE2 torpille la canonnière Peyk-i Şevket à Çanakkale. Il s'échoue ensuite par accident non loin d'un fort ottoman mais parvient à reprendre la mer sans dommage. Peu après, son périscope est repéré par un cuirassé ennemi qui tire sur les plages de débarquement et le AE2 préfère se replier. Après avoir franchi le détroit des Dardanelles, ce sous-marin entre dans la mer de Marmara vers 8h30 mais son commandant laisse reposer son submersible sur le fond et attend la nuit avant de continuer. Il fait surface dans la soirée pour recharger ses batteries et envoie un message radio à la flotte. Même si le débarquement au cap Helles se déroule comme convenu, celui des ANZAC plus au nord rencontre de grandes difficultés, et son commandant envisage même de faire évacuer la plage. Le succès du sous-marin australien est l'un des facteurs qui le fait changer d'avis et cette bonne nouvelle est relayée aux troupes pour remonter leur moral. Le AE2 navigue dans la mer de Marmara pendant cinq jours en réalisant de fréquentes apparitions en surface pour donner l'impression d'un grand nombre de sous-marins alliés, mais ses attaques contre les navires ottomans échouent du fait de problèmes mécaniques avec ses torpilles...

 

Dans l'après-midi du 27 avril, 17 bataillons turcs se ruent contre les six brigades alliées dans la baie ANZAC. Avec le soutien de l'artillerie navale, les Alliés parviennent à tenir tête aux assaillants durant la nuit. Le lendemain matin, les Britanniques et les Français qui ont débarqué à la droite de la plage S après leur opération de diversion contre Kum Kale, tentent de prendre le village de Krithia. Cette offensive se révèle complexe et mal coordonnée d'autant plus que les soldats sont épuisés par les débarquements successifs. Le soir, l'avancée alliée s'arrête donc à mi-chemin entre le cap Helles et le village de Krithia. Les attaquants ont perdu 3 000 hommes. Avec l'arrivée de renforts ottomans dans la zone, la perspective d'une victoire rapide dans la péninsule s'éloigne, et les combats se transforment alors en une guerre de tranchées...

 

Revenons aux nouvelles de Barbentane. L'édito de l'Écho de Barbentane du mois de juin est entièrement consacré à la gloire du général Gallieni, le gouverneur de Paris…

 

Sur la demande du curé, et en raison des évènements, les vêtements et autres étalages de luxe sont bannis de la communion solennelle et de la confirmation. Les enfants sont habillés sobrement, mais les traditions sont respectées avec un rassemblement dans la cour du presbytère, rue de la Clastre, avant d'aller en cortège à l'église…

 

L'Écho a récupéré des articles de journaux sur les pères prémontrés publiés par le bulletin paroissial de Tarascon. On y apprend que l'abbaye de Leffe située en Belgique occupée a subi les pires tourments de la guerre, bâtiments dévastés, famine, froid, pillage et dégradations en tout genre. Pire, 150 personnes ont été fusillées directement au couvent et 600 autres à proximité, les femmes et les filles outragées, les pères menacés. Pour info, après la guerre de 14-18, la notion de crime de guerre n'existe pas, il faut attendre 1945 pour qu'elle prenne corps. Toutefois, les articles 227 à 230 du Traité de Versailles du 28 juin 1919 donnaient aux Alliés le droit de poursuivre devant leurs tribunaux militaires les responsables des atrocités commises par les Allemands. 1 059 individus ont été recherchés pour crimes de guerre par divers pays ayant engagé contre eux des poursuites. Dans la liste des criminels de guerre on retrouvait le chargé de police de Valenciennes, Von Tolksdorff, arrêté à Wiesbaden et condamné à 2 ans de prison par le Conseil de guerre de Lille pour actes de brutalité. Le lieutenant Wickel (second du général Von Luttwitz) un des acteurs du sac de la ville de Louvain (il faisait partie du terrible régiment des "hussards de la mort" du Kaiser Franz Osterreich). Le capitaine Holtz, responsable du terrible Bagne de Sedan (premier camp d'extermination). Von Zindrowski, le commandant Horn, le lieutenant de police Von Spigelberger celui qui avait œuvré avec férocité dans la ville de Saint-Mihiel, etc... De toute façon, tous ces véritables criminels de guerre furent acquittés au début de l'année 1920 par la Cour suprême de Leipzig !!!

 

Paul Bonnet, Barbentanais et ancien curé de divers villages des Bouches-du-Rhône, vient de mourir à l'âge de 63 ans…

 

On y apprend que Sœur Thérèse de l'Enfant-Jésus est la protectrice des soldats sur le champ de bataille. Deux nouveaux départs de réservistes et 7 conscrits de classe 1916 reçoivent leur affectation. Au livre d'or, les promotions se succèdent et Louis Moucadeau (du Petit-Mas) est cité à l'ordre du jour de son régiment pour fait glorieux…

 

Chez les prisonniers, le lieutenant-colonel Pierre-louis Constant écrit d'une jolie maison sur les bords du lac de Constance (partie allemande) où il attend sa libération due à son grand âge (69 ans). L'Écho donne aussi des nouvelles des blessés et des malades…

 

Le mardi 27 avril, c'est le service funéraire pour Pierre Reboul au cours duquel son agonie est retracée. Il repose maintenant à l'ossuaire du vieux cimetière de Barbentane…

 

Le comte Pierre Terray âgé de 64 ans, maire, mais réquisitionné car officier d'état-major, demande aux parisiens qui en ont la possibilité, d'héberger un temps les permissionnaires convalescents que leurs familles ne peuvent accueillir, soit qu’elles se trouvent en zones de combats, soit en territoires occupés.

 

En ce mois d'avril 1915, 3 soldats barbentanais décèdent au combat…

 

Pierre Reboul, 22 ans, meurt à l'hôpital du Lac à Gérardmer (Vosges) le 4 avril 1915. Il est né le 2 juin 1892 à Barbentane, célibataire, cultivateur, soldat de 2ème classe au 63ème régiment de chasseurs alpins. Il est grièvement blessé le dimanche 28 mars dans une tranchée en Alsace par une balle qui lui a traversé la main et fracturé le genou gauche. Il succombe à une hémorragie après l'amputation de sa jambe. Il est titulaire de la Croix de guerre. Il est noté dans l'Écho de juin 1915. Un service funèbre a été célébré en sa mémoire le 27 avril. Enterré une première fois dans le vaste "champ des morts" de Gérardmer, il repose maintenant dans l'ossuaire du cimetière de Barbentane...

 

Jean-Marie Bertaud, 30 ans, est tué le 5 avril 1915 à Flirey (Meurthe-et-Moselle) dans une tranchée face à l'ennemi. Il est né le 30 octobre 1884 à Lyon (Rhône), soldat de 2ème classe au 275ème régiment d'infanterie, il est marié avec des enfants. Son frère Pierre décédera lui aussi au front le 10 octobre 1915. Bien que non natifs de Barbentane, ils sont considérés comme barbentanais de cœur car c'est leur oncle, Jean-Marie Bertaud, qui pare l'autel et met le catafalque dans l'église à chaque service funéraire en hommage aux morts de la guerre. Un service funèbre commun pour les deux frères sera célébré en l'église de Barbentane le lundi 3 janvier 1916 (Écho de février 1916). Ils figurent tous les deux sur le nécrologe qui est dans l'église…

 

Joseph-Michel Sarrazin (dit Michel), 30 ans, meurt le 16 avril 1915 à l'hôpital de Saint-Benoît, en Belgique occupée selon l'Écho(10). Il est né à La Cluse (Hautes-Alpes) le 24 mars 1885, berger, il est soldat de 2ème classe au 42ème régiment d'infanterie coloniale. Dans les l'Écho de juin et juillet, on signale qu'il a été blessé au ventre dans des combats nocturnes à Hattonchâtel (Meuse) dans la nuit du 21 au 22 septembre 1914. Il meurt des suites de ses blessures dans un lazaret allemand, probablement en février, mais son décès est noté du 16 avril 1915 sur sa fiche militaire. Il s'est marié avec Césarie Berlandier le 30 octobre 1913 à Barbentane et il est le papa d'une fille qu'il n'a pas connue puisque née le 19 janvier 1915. Enterré sur place, il est fortement probable qu'il repose toujours au même cimetière. Un service funèbre est célébré en sa mémoire le 27 mai en l'église de Barbentane. Il est inscrit sur le Monument aux Morts et sur le nécrologe de l'église...

 

Le courrier militaire est comme toujours très riche, c'est Jean-Baptiste Bonjean qui envoie ses amitiés sous la mitraille. Jean Fontaine a assisté à une bénédiction de lauriers cueillis sur le champ de bataille. Le poète Anastase envoie un quatrain, une œuvre semble-t-il collective. Sébastien Fauque "monte" aux tranchées pour la première fois. Siméon Moucadeau lance des grenades dans les tranchées boches pour leur "troubler le cerveau". Martial Granier est toujours aussi guerrier. C'est Gaston Dailly, un natif de Landivisiau dans le Finistère, qui a profité de la cantine de la gare du Nord et qui l'écrit à l'Echo. Joseph Revial vient de passer 8 jours dans les tranchées avec de l'eau et de la boue jusqu'au ventre. C'est Pierre Ayme qui nous relate une drôle d'histoire de tranchée, mais il touche deux quarts de vin par jour et un peu d'eau de vie, alors... C'est Léopold Michel qui signale un affreux accident de train à La Valbonne (Ain). C'est quand même Georges Marty qui signale humoristiquement qu'à la messe du dimanche les orgues étaient représentées par le bruit de la mitraille allemande qui visait un avion français…

 

Dans l'état religieux, pas de naissance ni de mariage, seulement des décès…

 

Guy

 

(1) C'est à la date du 24 avril 2015 que Recep Erdogan, l'actuel 1er Ministre islamiste turc, compte fêter le centenaire du débarquement allié à Gallipoli pourtant effectué le 25 avril, dans l'espoir de masquer le massacre des notables arméniens. Pour cela, il a invité 102 représentants des états impliqués à titres divers dans le conflit 14-18, sans oublier d'inviter le président arménien, Serge Sarkissan. Celui-ci a dénoncé "une invitation indécente" et l'a appelé "au courage d'affronter son propre passé" et à la "reconnaissance non sélective de la mémoire de l'humanité entière".

(2) La majorité des 192 000 Arméniens de Van et de sa périphérie furent décimés par les troupes ottomanes lors du génocide.

(3) Forte tête, Roland Garros fera de nombreuses tentatives d'évasion et il sera déplacé dans de nombreux camps de prisonniers. C'est d'ailleurs au fort d'Ingolstadt, en Bavière, qu'il rencontrera un capitaine, alors un illustre inconnu dénommé Charles de Gaulle. Rencontre qui sera plus ou moins romancée dans le magnifique film La Grande Illusion de Jean Renoir réalisé en 1937. Il ne parviendra à s'évader qu’au bout de trois ans, le 15 février 1918, déguisé en officier allemand en compagnie du lieutenant Anselme Marchal. Affaibli par ses années de captivité, myope, il meurt au combat dans l'explosion de son avion le 5 octobre 1918 à la veille de ses 30 ans. Son Spad s'écrase sur la commune de Saint-Morel, dans les Ardennes, non loin de Vouziers où il est enterré. Une statue de Roland Garros est érigée au Barachois, à Saint-Denis de La Réunion, département de sa naissance. C'est parce qu'il avait adhéré au Stade français en 1906, avec le parrainage de son condisciple d'HEC Émile Lesieur (athlète et joueur de rugby), que ce dernier exigea fermement en 1927 que l’on donnât le nom de son ami au stade de tennis parisien avec cet argument "je ne sortirai pas un sou de mes caisses si on ne donne pas à ce stade le nom de mon ami Roland Garros".

(4) Cet avion servira de modèle de base pour tous les avions de chasse jusqu'à nos jours.

(5) Si du côté français cette bataille est répertoriée sous le nom "bataille des Éparges", du côté allemand c'est "bataille de Combres", noms des deux villages encadrant cette crête.

(6) Louis Pergaud, auteur de La Guerre des Boutons est tué dans les combats, et Maurice Genevoix, blessé, relatera sa participation dans son livre "Ceux de 14, Les Éparges".

(7) Les comitadjis (littéralement : comité exécutif) sont des insurgés nationalistes bulgares et macédoniens qui luttent contre les Turcs au cours des XIXème et XXème siècles. Ils contestent la division de leur territoire entre la Bulgarie et l'Empire ottoman faite lors du Congrès de Berlin (1878), puis entre la Bulgarie, la Serbie et la Grèce après les guerres balkaniques (1912-1913).

(8) Controverse stratégique qui est toujours d'actualité, même au XXIème siècle.

(9) Cet officier, ami de Churchill depuis le début de la guerre, a reçu pour cet acte de bravoure la croix de Victoria (Victoria Cross). Lors de la deuxième guerre mondiale, il participe aux batailles en Crête puis Afrique du Nord. Il devient le général commandant les troupes néozélandaises en Italie et, en février 1944, il ordonne le bombardement de l'abbaye de Monte Cassino, un grand centre culturel médiéval situé dans les Abruzzes (pour la petite histoire, elle est située à quelques kilomètres de Pizzone). Cette initiative est toujours très controversée.

(10) Impossible de localiser cet hôpital, ni en France occupée, ni en Belgique occupée, ni en Allemagne. Pour l'instant, l'emplacement exact de ce lazaret Saint-Benoît et de son cimetière est toujours un mystère.

Les États-Unis "arraisonnent" 2 croiseurs corsaires allemands, le Kronprinz Wilhelm et le Prinz Eitel Friedrich dans le port de Newport. Les équipages sont internés dans un camp proche au titre d'"invités" jusqu'à l'entrée en guerre des USA le 6 avril 1917. Pendant leur réclusion, ces marins bâtissent un village typiquement allemand avec des matériaux de récupération...

 

Le 1er avril (le 19 mars du calendrier julien), en Russie, c'est l'exécution pour trahison du colonel Miasoïedov. Son espionnage au profit des Allemands n'a jamais pu être formellement prouvé, mais comme c'était aussi un pilleur notoire, personne ne s'est vraiment offusqué de cette liquidation sommaire. En fait, il est le bouc émissaire parfait qui sert un temps de soupape à une déferlante de haine à l'égard de la famille impériale russe qu'on soupçonne de sympathie, pour cause de liens de parenté étroits, envers la famille impériale allemande. Le ministre de la Guerre Vladimir Alexandrovitch Soukhomlinov, son supérieur quasiment incompétent, est gravement mis en accusation. Grand ami de Raspoutine avec lequel il entretient des liens financiers très intéressés, il sera néanmoins obligé de démissionner de son poste en juin et remplacé par Alexeï Polivanov...

 

Au Mexique, le général Alvaro Obregón obtient des victoires militaires décisives sur les troupes révolutionnaires, mais désordonnées, de Pancho Villa. Du coup, Carranza peut assumer seul la Présidence du pays à partir du 1er mai 1915...

 

Dans l'Afrique australe, le lundi 19 avril, les forces britanniques occupent Keemanshoop, la deuxième ville du Sud-Ouest africain (maintenant la Namibie). Les 25 et 26 avril, la colonie allemande de ce pays capitule à Gibeon. Cette bataille oppose les troupes sud-africaines commandées par le brigadier-général sir Duncan Mackenzie, à l'armée allemande. Cette dernière subit un revers décisif, perdant le quart de ses effectifs, toute son artillerie et 4 de ses 6 mitrailleuses lourdes. Les sud-africains déplorent la mort de 24 d'entre eux avec 66 blessés…

 

Au Moyen-Orient, le chérif Hussein de La Mecque envoie secrètement son fils Faysal à Damas. Il affirme que le soutien britannique est nécessaire au déclenchement de toute insurrection de la péninsule arabe. Le comité arabe rédige le "protocole de Damas", un projet de coopération avec la Grande-Bretagne. En Égypte, à quelques milles au nord-est de la dépression d'El-Kantara, un détachement de cavalerie turque est mis en fuite par les patrouilles britanniques. À Ramleh, une station balnéaire près d'Alexandrie; une tentative d'assassinat a lieu contre le Khédive d'Égypte, mais elle échoue. Au Caire, la cavalerie indienne met en fuite une troupe turque. Avec le concours d'un hydravion, le cuirassé français Saint-Louis bombarde efficacement les ouvrages portuaires d'El-Arish (port syrien entre le canal de Suez et Gaza) en infligeant des pertes considérables aux troupes turques installées sur place. Sur la côte méditerranéenne de Syrie, près de Saint-Jean-d'Acre, un croiseur français détruit un pont ferroviaire...

 

Dans l'Adriatique, au large d'Otrante, le croiseur-cuirassé Léon-Gambetta est torpillé par un sous-marin autrichien. Tous les officiers ont péri à leur poste et il y a seulement 110 marins survivants...

 

En Mésopotamie, à Schaiva, une expédition turque est défaite par les Britanniques, ceux-ci ne sont plus maintenant qu'à quelques kilomètres de Bassora (située à l'extrême est de la Syrie, sur l'estuaire commun du Tigre et de l'Euphrate)...

 

En Perse, des troupes turques occupent des lambeaux de territoire. Les soldats persans se retirent sans combattre…

 

Le 9 avril, la ville arménienne de Zeïtoun (Cilicie) est prise d’assaut par les troupes ottomanes. La population est désarmée, les notables arrêtés ou pendus, et des déportations massives sont effectuées vers la région de Deïr-ez-Zor, dans le désert de Syrie. Dans la ville de Van (maintenant à l'extrême est de la Turquie), déjà affaiblie par la mobilisation de ses 4 000 soldats par le gouverneur Turc afin de laisser une ville sans réelle défense, les 30 000 Arméniens retranchés ne disposent plus que de 1 500 hommes armés avec très peu de munitions. Plus au nord dans la région que les Russes viennent d’évacuer, les Turcs ravagent 80 villages et massacrent 24 000 Arméniens(1). Le 22 avril, le catholicos (chef de l’Église orthodoxe) arménien demande au Vatican d’intervenir diplomatiquement auprès des autorités turques pour faire cesser les persécutions et les massacres. Le 24 avril 1915, le ministre de l'Intérieur Talaat Pacha du gouvernement Jeunes-Turcs donne l'ordre de l'arrestation des intellectuels arméniens selon un plan établi à l'avance par Enver Pacha. L'opération débute à 20h à Constantinople et elle est conduite par Bedri Bey, le chef de la police. Dans la nuit, 235 à 270 intellectuels arméniens sont alors arrêtés, en particulier des ecclésiastiques, des médecins, des éditeurs, des journalistes, des avocats, des enseignants et des hommes politiques. Une seconde vague d'arrestations est lancée le 25 avril, elle conduit à l'arrestation de 500 à 600 personnes supplémentaires. Au total, on estime que 2 345 notables arméniens ont été arrêtés en quelques jours, avant d'être déportés puis massacrés dans leur majorité au cours des mois suivants(2). Le 29 avril, dans le but de provoquer un soulèvement et de justifier ainsi les massacres en cours, un communiqué officiel du ministère turc de la Guerre dénonce l’animosité des Arméniens du Caucase et des provinces arméniennes contre les Turcs, suscitée par des comités établis en Europe...

 

Dans la guerre maritime autour des îles Britanniques, les U-boots font des ravages. Ils coulent sans distinction tout ce qui flotte, y compris des navires de pêche pourtant protégés par les conventions internationales. La marine du Kaiser semble beaucoup tenir au nombre de victimes pour produire une plus forte impression en l'Allemagne. A l'inverse, un seul sous-marin allemand, simplement avarié, a réintégré le port d'Anvers assez facilement. La capture d'un navire suédois par les Allemands soulève de violentes protestations à Stockholm. Des navires allemands sont coulés par leurs propres mines laissées à la dérive. Elles font aussi de sérieux dégâts sur la navigation dans la mer du Nord. En sus des submersibles, des hydravions allemands s'attaquent maintenant au trafic dans la Manche, sans grands résultats en ce mois d'avril. Des bâtiments de guerre allemands ont saisi 4 chalutiers à vapeur hollandais. Du coup, tous les échanges maritimes entre le Royaume-Uni et la Hollande sont momentanément suspendus. Un sous-marin allemand qui vient de torpiller un chalutier, empêche par la force un autre chalutier de lui porter secours. Sur mer, la guerre devient aussi barbare que sur terre...

 

Dans la guerre aérienne, l'ingénieur Raymond Saulnier invente un dispositif qui permet la synchronisation du tir à la mitrailleuse à travers les pales de l'hélice. Comme son dispositif n'est pas encore tout à fait au point, il monte simplement des plaques de fer sur l'hélice en face d'une mitrailleuse qui est, pour la première fois, installée solidairement sur un avion. Malgré une certaine fragilité structurelle, l'Allemagne met en chantier de nouveaux dirigeables Zeppelin, ceux de la série R. Ces aéronefs pourront transporter des charges de 40 à 50 tonnes et atteindre une vitesse de 100 à 130 km/h en utilisant cinq ou six moteurs Maybach d'environ 260ch chacun. Ils seront capables de voler à 4 000m d'altitude, ce qui leur permettra de monter bien au-dessus des tirs de la DCA ainsi que des avions de chasse et, grâce à l'installation de nombreuses mitrailleuses, ils seront aptes à se défendre seuls tous azimuts. Malgré leur énorme rayon d'action pour l'époque, près de 8 000 kilomètres en 4 jours, ils ne rentreront en escadre qu'au début de 1918, bien tard pour pouvoir peser militairement sur le conflit. Le 18 avril 1915 une panne mécanique contraint un aviateur français à atterrir dans un champ derrière les lignes ennemies à Ingelmunster, près de Courtrai (Belgique flamande). Son pilote, le sous-lieutenant Eugène Adrien Roland Georges Garros, aviateur aux exploits déjà mondialement connus sous le nom de Roland Garros(3), est fait prisonnier avant d'avoir pu mettre le feu à son avion. Ce Morane-Saulnier monoplan et monoplace(4) est celui sur lequel est monté le système de tir révolutionnaire de Raymond Saulnier qui était si efficace qu'il avait déjà abattu 3 avions depuis le 1er avril. Il est aussitôt étudié par Anthony Fokker qui tentera de le copier. Après des échecs répétés, d'autres ingénieurs allemands auront recours à un système complètement différent, basé sur un brevet de 1913, rendant la mitrailleuse complètement synchrone avec l'hélice. Ce nouveau système, dit Fokker, équipera en premier le Fokker E III avec lequel l’aviation allemande va dominer les airs jusqu’au milieu de l'année 1916, jusqu'à ce qu'il soit lui même copié par les Alliés…

 

L'avion stratégique n'évolue guerre, ce ne sont guère plus de trois à cinq avions qui forment une escadrille de bombardement. Les aviateurs alliés bombardent Habsheim, Charleville-Mézières, Fribourg-en-Brisgau (avec un dirigeable), Ostende, Haltingen. Des raids plus ciblés sur les gares sont lancés à Courtrai, Tourcoing, Roubaix, Staden, Roulers, Bollwiller, Chambley, Arnaville, Friedrichshafen et Valenciennes. Les dirigeables allemands, parfois accompagnés d'avions Taube pour leur protection rapprochée, bombardent en France Nancy et Bailleul, en Grande-Bretagne Ipswich et Bury (Suffolk), Newcastle (Tyne and Wear) ainsi que Walton (Essex). Au mépris de la neutralité hollandaise dans le conflit, un Zeppelin a survolé l'île d'Ameland. La DCA s'améliore, les avions volant bas sont systématiquement visés, parfois descendus. Malgré une signalétique adaptée, un aviateur allemand lance des bombes sur l'hôpital de Mourmelon...

 

Comme les armes classiques ne suffisent pas à faire reculer l'ennemi, l'Allemagne lance en ce mois d'avril 1915 une nouvelle arme non conventionnelle : les gaz ! Malgré les conventions de La Haye de 1899 et 1907 qui interdisaient l'utilisation de projectiles contenant des gaz asphyxiants ou toxiques, les belligérants considéraient, en toute mauvaise foi, que l'utilisation de gaz irritants était autorisée. Le 27 octobre 1914 à Neuve-Chapelle, au sud d'Ypres (Flandres belges), les Allemands font pleuvoir une pluie d'obus de 105mm sur les lignes françaises. Les soldats ne font pas attention aux vapeurs que dégagent les explosions. C'est pourtant le début de la guerre des gaz. Toutefois, mal utilisé et peu prégnant, ce gaz irritant de type lacrymogène ne permet pas aux unités allemandes de percer, au grand dam de l'état-major. Le 31 janvier 1915 sur le front de l'Est, 18 000 obus contenant ce même gaz sont tirés sur les positions de l'armée impériale russe le long de la Rawka à l'ouest de Varsovie lors de la bataille de Bolimov. Cependant, là encore, le froid intense bloque l'action du gaz et les Russes ne remarquent pas sa présence. Le 22 avril 1915, l'armée allemande dispose de 168 tonnes de chlore déployées dans 5 730 bonbonnes en face de Langemark-Poelkapelle, au nord d'Ypres. À 17h00, dans une légère brise d'est, le gaz est libéré formant un nuage gris-vert qui dérive vers les tranchées tenues par les troupes coloniales françaises. Celles-ci paniquent et s'enfuient créant un vide de 7 km. Cependant, les troupes allemandes se méfiaient du gaz et, manquant de renforts, elles ne peuvent exploiter cette brèche avant que les troupes canadiennes et belges ne se déploient hâtivement pour la boucher. Les gouvernements de l'Entente se plaignirent que cela était une violation flagrante des lois internationales. L'Allemagne répondit que ces traités interdisaient seulement les obus chimiques, pas les conteneurs de gaz. Dans ce qui devint la deuxième bataille d'Ypres, les Allemands utilisèrent les gaz trois autres fois contre la 1ère Division canadienne, et Le British Official History signale qu'à la colline 60 "90 hommes moururent du gaz dans la tranchée avant qu'ils n'aient pu atteindre une station médicale ; sur les 207 qui furent amenés à la station la plus proche, 46 moururent presque immédiatement et 12 après de longues souffrances". Toutefois il était relativement facile de se protéger du chlore utilisé dans ces premiers gaz. D'abord, il laisse flotter un nuage gris-vert facilement détectable et il suffit, pour en atténuer les effets nocifs dans les poumons, de se protéger la bouche et le nez avec un mouchoir humide imbibé d'urine, toutes choses naturellement présentes dans les tranchées. D'autre part, il ne faut surtout pas s'enfuir en courant, ni même s'allonger au fond des tranchées, mais au contraire rester le plus possible debout en protégeant sa respiration par les moyens du bord, ce qui rend les soldats encore plus attentifs aux assauts ennemis qui eux, du fait de leur déplacement, sont encore plus sensibles aux effets du chlore. Hélas, cela ne va pas durer bien longtemps et ces gaz vont devenir de plus en plus meurtriers rajoutant de l'horreur à l'horreur…

 

Au début du mois, dans le sud de la Meuse, la 1ère armée française se prépare à attaquer pour reprendre la butte des Éparges(5). C'est un surplomb rocheux haut de 346m, large de 700m sur 1 100m de long qui, comme un gros doigt pointé vers l'ouest, s'avance en surplomb sur la plaine de la Woëvre, au nord de Saint-Mihiel. Grâce à des sapes permettant de grignoter du terrain, les soldats français avancent méticuleusement au pied de cette crête conquise par les Allemands en septembre 1914 et énergiquement défendue. Le 5 avril un assaut est ordonné par le général Herr après une préparation d'artillerie de 30 minutes faite par 400 canons de tous calibres. Le temps est pourri, les combattants montent aux tranchées ennemies dans un cloaque de boue et de neige qui rend parfois les fusils inutilisables. La bataille est d'une violence inouïe, certains soldats signalent qu'ils circulent au milieu de débris humains et que ceux-ci en tapissent les tranchées. En 4 jours, après des avancées et des reculs, les soldats français arrivent à atteindre un objectif intermédiaire (le point C) sans parvenir à prendre l'objectif final assigné (le point X) situé le plus à l'est ainsi qu'une partie sud du massif qui restent dans les mains allemandes. Le 9 avril, les combats d'affrontement cessent. Le bilan est supérieur à 6 000 morts, blessés ou disparus(6) dans chaque camp pour un gain de terrain dérisoire, même si la possession de la partie ouest de cette crête est un avantage certain. Pendant 2 ans, jusqu'en avril 1917, les combats se poursuivront en ce lieu par des explosions de mines quasi mensuelles sans qu'aucune modification d'importance n'ait lieu...

 

Le 22 avril, débute la deuxième bataille d'Ypres. À cet endroit le front forme une boursouflure assez large à l'est de la ville. Il est tenu au centre par des troupes canadiennes fraîchement débarquées d'outre-Atlantique le 17 avril, au sud par des troupes britanniques et au nord par des troupes françaises coloniales (Algériens et Martiniquais). Encore plus au nord, se trouve l'infanterie belge. La bataille débute par un lâcher de gaz qui décime les troupes coloniales, laissant un trou béant dans les lignes françaises. Les Allemands sont eux mêmes surpris par ce succès, mais ils n'osent pas s'engager en masse dans la trouée, de peur des gaz. Les Canadiens, dans un élan salvateur, bouchent le trou conjointement avec des troupes belges venues du nord. Maîtrisant leur peur des gaz, les 12 000 soldats nord-américains se battent comme des lions et parviennent à contenir l'avancée allemande dans des limites raisonnables. Ils y gagnent là une réputation de bravoure qui ne se démentira pas tout au long du conflit. Il faudra un gros mois pour que l'armée française se ressaisisse, panse ses blessures et reprenne sa place à cet endroit du front...

 

Sur le front de l'est, malgré des conditions météo peu favorables avec le début de la débâcle, les Russes poursuivent leurs multiples offensives sur le Niémen, dans le Caucase et les Carpates, où toutes les contre-attaques autrichiennes sont repoussées. La Suède et la Russie entament des pourparlers en vue de la construction d'une voie de chemin de fer entre les deux pays. Le 9 avril, les Russes traversent avec succès la chaîne principale des Carpates où ils font 2 700 prisonniers, dont 530 officiers. Mais les Autrichiens reçoivent des renforts allemands, et lancent de nombreuses contre-attaques. Sur ce front de 380 kilomètres, 4 millions d'hommes se font face et, dans un nouveau mouvement offensif, les Russes s'emparent d'une hauteur autour du col d'Uzsok (maintenant frontière entre la Pologne et l'Ukraine) au cours duquel les troupes austro-allemandes perdent 18 000 hommes. Malgré les renforts venus d'Allemagne, une contre-attaque marquée par une ténacité exceptionnelle échoue. Plusieurs aéroplanes russes, qui sont capables de transporter une vingtaine de passagers, bombardent la gare de Soldau en Prusse-Orientale. En réplique, un avion allemand largue des bombes sur Varsovie et Lomza en Pologne. Plus au nord dans la Prusse-Orientale et en Courlande, depuis le milieu du mois, les Allemands préparent une offensive. Mais c'est n'est qu'une feinte destinée à masquer la véritable contre-offensive visant à arrêter définitivement la percée russe dans les Carpates avant qu'elle ne débouche dans la vaste plaine hongroise...

 

Plus au sud sur le Danube, l'artillerie serbe ouvre le feu contre l'île d'Anakale, et les Autrichiens ripostent en bombardant Tekia, sur la rive serbe. A Semlin, les Serbes mènent des raids contre les canonnières fluviales ennemies. À la frontière serbo-bulgare, plusieurs milliers de comitadjis bulgares(7), vêtus d'uniformes militaires, envahissent Valandovo en Serbie, ce qui oblige la poignée de soldats serbes à se retirer jusqu'à Stroumitza. Puis, grâce à l'arrivée de troupes venant de villes voisines, ils reprennent l'offensive et poursuivent les comitadjis au-delà de la frontière. À la frontière grecque, les comitadjis mènent des actions de sabotage sur les chemins de fer, ce qui irrite très fortement le gouvernement de ce pays. Échaudé, le gouvernement bulgare, pour empêcher de nouveaux incidents de comitadjis, prend des mesures militaires sévères à ses frontières…

 

Aux Dardanelles, dans la mer Égée, après la cuisante défaite maritime du 18 mars, les états-majors français et britannique se préparent à débarquer en force. L'objectif est de neutraliser les batteries ottomanes pour permettre aux dragueurs de mines de nettoyer le détroit en toute sécurité, afin que les navires alliés puissent accéder à la mer de Marmara. Aux 78 000 hommes de la force expéditionnaire, les Britanniques ajoutent les troupes australiennes et néo-zélandaises qui sont stationnées en Égypte où elles s'entraînent en prévision de leur déploiement en France. Ces forces sont regroupées en un corps d'armée dénommé ANZAC. Cette unité est déployée aux côtés d'une autre division britannique, de la Royal Naval Division et de l'armée française d'Orient commandée par le général Albert d'Amade. Cette dernière est composée de troupes coloniales et métropolitaines. Au final, ce sont près de 500 000 soldats alliés qui seront engagés dans ces combats. Dès le début avril, toutes ces troupes sont regroupées sur l'île grecque de Lemnos, la plus proche du détroit. La confiance règne. Les officiers supérieurs alliés méprisent les armées ottomanes qu'ils considèrent comme "faibles", et ils font distribuer aux troupes australiennes et britanniques en Égypte un dépliant qui indique "De manière générale, les soldats turcs manifestent leur volonté de se rendre en tenant leur fusil à l'envers et en agitant des vêtements ou des haillons de toutes les couleurs. Un véritable drapeau blanc doit être considéré avec la plus profonde suspicion car il est improbable que les soldats turcs possèdent quoi que ce soit de cette couleur". Pire encore, les informations données aux officiers subalternes sont le plus souvent issues de guides touristiques achetés en Égypte. En prélude à l'invasion, une intense activité maritime a lieu. Les navires bombardent les côtes turques du golfe de Saros sur la côte égéenne jusqu'à Smyrne sur la côte asiatique. Les quelques hydravions embarqués sur les navires en font de même. Dans la mer Noire, les navires russes donnent, eux-aussi, du canon contre les fortifications turques et, en Anatolie, ils détruisent des navires à vapeur et des voiliers chargés du ravitaillement des troupes. A l'entrée du Bosphore, ils coulent un torpilleur turc et en endommagent gravement un autre. Un sous-marin anglais s'échoue à la pointe de Kephis, l'équipage est fait prisonnier par les Turcs. Le croiseur britannique Minerva et des contre-torpilleurs obligent un torpilleur turc à s'échouer sur les côtes de l'île de Chio, dans la mer Égée...

Débarquement des troupes françaises, en l’occurrence la Légion Etrangère, sur l’île de Lemnos en Grèce

La situation de la Guerre en Avril 1915

 

En ce mois d'avril 1915, on se bat sur un front de 2 668 kilomètres en Europe ! A l'ouest, sur un total de 948 kilomètres, les troupes françaises en occupent 870, les troupes britanniques 50, les troupes belges 28. A l'est, les Russes tiennent un front de 1 370 kilomètres. Au sud, les Serbes et Monténégrins occupent un front de 350 kilomètres.

 

Sur le plan politique et économique, la classe 1917 est appelée en France par "mesure de simple prévoyance", et le ministre britannique du Trésor, David Lloyd George, exige le passage à l’économie de guerre. À New-York, le cours du mark allemand subit une perte de 1/5 de sa valeur nominale. Les partis socialistes hongrois, autrichien et allemand se réunissent à Vienne (Autriche). Les participants se prononcent en faveur de la création, après la guerre, d’un tribunal d’arbitrage international. L'exportation des pommes de terre est interdite, sous toutes ses formes, en Hollande. Une conférence des délégués chinois et japonais, réunis à Pékin, étudie un règlement concernant le régime de la Mandchourie. Une note du comte Bernstorff, ambassadeur d'Allemagne aux États-Unis, reproche à ce pays de fournir du matériel de guerre aux Alliés. En réponse, Mr Bryan, ministre des Affaires étrangères, fait connaître que les USA resteront neutres, mais continueront la vente donc l'exportation d'armes et munitions aux Alliés. En Espagne, le comte de Romanones, chef du parti libéral, souligne dans un discours que, l’équilibre de la Méditerranée étant sur le point d’être rompu à l’est par la prise de Constantinople, il doit en compensation être rétabli à l’ouest par l’annexion de Tanger au domaine espagnol. Dans la capitale britannique, le 26 avril, c'est la signature, en grand secret, du traité dit "Pacte de Londres" entre la Grande-Bretagne, la France et l'Italie. Ce pacte prévoit que l’Italie entrerait en guerre aux côtés de l’Entente dans un délai d’un mois et, en échange, elle recevrait en cas de victoire le Trentin, le Tyrol du Sud, la Marche julienne, l’Istrie (à l’exception de Fiume), une partie de la Dalmatie, de nombreuses îles de la mer Adriatique, ainsi que Vlora et Saseno en Albanie avec le bassin houiller d'Antalya en Turquie. De plus, sa souveraineté serait confirmée sur la Libye et le Dodécanèse. Dans moins d'un mois, l'Italie rentrera effectivement en guerre aux côtés des Alliés...

300 prisonniers allemands arrivent en gare de Croix-de-Vie en Vendée

Soldats français chargés du ravitaillement en munitions marchant dans la boue

Plages de débarquement dans les Dardanelles le 25 avril 1915

Déroulement de la bataille aux Éparges en 1915

Campement provisoire de soldats turcs sur la presqu’île de Gallipoli

Plan de la deuxième bataille d’Ypres en avril 1915

Femmes pompiers en Angleterre

Canon de 155 long installé dans la Meuse

Aux Éparges, enterrement d’un brave

Miltrailleuses turques dans les Dardanelles

Détail des plages de débarquements au Cap Helles dans les Dardanelles

Poussée allemande lors de la deuxième bataille d’Ypres en avril

Barges de débarquement sur les plages de Gallipoli

Cimetière allemand installé début 1915 à Apremont dans la Meuse

Plage W où débarquent les soldats britanniques sur la péninsule de Gallipoli

Aux Eparges, une tranchée creusée dans des débris humains

Le capitaine Charles de Gaulle en avril 1915

Le célèbre sous-marin australien AE2

Morane-Saulnier type N équipé d'une mitrailleuse fixe

Le ravin de la Mort aux Éparges

Sur le front à Ypres, soldats français équipés de masque à gaz très rudimentaire

Sur le front à Ypres, soldats allemands se protégeants du froid

Comitadjis bulgares qui font le coup de main en Serbie et en Grèce

Un Zeppelin dans le ciel britannique

En Turquie, cadavres d’Arméniens massacrés

Convoi de munitions britanniques en route vers Ypres

Raymond Poincarré en inspection dans les Vosges enneigés

Roland Garros en avril 1915

Quelle folie la guerre !

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Guy

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