BARBENTANE

en février 1915

Par décalage pour son édition c’est l’Écho d’avril 1915 qui relate les évènements de février 1915...

Quelle folie la guerre !

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Barbentane, le plus beau village de l'Univers

L’Écho de Barbentane d’avril 1915

Tous mes remerciements à toutes celles et ceux qui m’ont aidé dans ces tâches de reconstitution de notre patrimoine barbentanais : prêt de brochures, de photos, des Écho de Barbentane, aide, corrections et autres…

Guy

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Documents annexes

à télécharger

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Sur le front oriental, l'armée russe progresse toujours à travers le Caucase. Mais la résistance turque devient plus dure. D'ailleurs, le mardi 16 février débute en Champagne une offensive qui a pour but d’interdire tout transport de troupes allemandes en Russie en fixant le maximum d’effectifs dans cette région. Depuis octobre 1914 le ministre turc de la Guerre, Enver Pacha, fait libérer des prisonniers de droit commun pour les enrôler dans des bandes de brigands de 10 à 15 individus, les Tchètès, qui seront chargés de massacrer les déportés arméniens. Un représentant des Arméniens de Zeïtoun (Cilicie) déclare à l’état-major russe de l’armée du Caucase que 15 000 Arméniens seraient prêts à attaquer les communications turques si des munitions leur étaient fournies. Victimes de discriminations, désarmés, pillés, les Arméniens se retournent progressivement contre les Turcs. Le génocide arménien est en marche...

Sur le front des Carpates, l'armée russe progresse toujours vers l'empire austro-hongrois, sans rencontrer une grosse résistance et en mettant hors-de-combat plus de 40 000 soldats. Par contre, sur la Vistule, après une progression régulière, les combats redoublent d'intensité. Avec l'arrivée de renforts, les Allemands tentent une opération en tenaille sur les flancs nord et sud de l'armée russe. Les combats deviennent acharnés et les pertes humaines sont considérables. L’armée allemande de Prusse-Orientale dirigée par le maréchal von Hindenburg prend l’offensive au sud-est des lacs Mazures dans le but de s’emparer de Varsovie. Finalement, l'armée russe au centre du dispositif se retire et évite l'encerclement. L'offensive allemande échoue...

En Grande-Bretagne, pour la 1ère fois, on installe une mitrailleuse sur un avion Vickers FB5...

A Paris, et au début du mois, se tient une conférence des ministres des Finances alliés. Pour assurer la convergence des opérations militaires, David Lloyd George, ministre britannique des Finances, soumet au président Poincaré, l’idée d’un organe central où seraient représentés les hauts commandements britannique, français et russe. La Chambre française vote la création d'une "Croix de guerre" destinée à commémorer les actions d'éclat de nos plus vaillants soldats. La "Journée du 75" (insignes vendus dans toute la France au bénéfice de l’Œuvre pour le front) obtient un succès très remarquable…

Mais revenons à Barbentane et c'est l'Écho du mois de mars qui relate les évènements de janvier et février 1915...

Jean Cocteau(1) écrit des poèmes en l'honneur de Joffre et Castelnau que l'Écho publie...

Je ne sais pas pourquoi, mais il y a un fort déséquilibre entre les sexes au sein de la paroisse. Pour la confirmation du jeudi 29 avril, j'ai compté 6 garçons pour 23 filles !!! A moins que les garçons ne fuient ce sacrement par peur du soufflet...

Bien que les articles ne soient jamais signés, l'Écho est dirigé d'une main ferme par Aimé Guigues, le curé du village de 1906 à 1924. Il est secondé, un temps, par le vicaire Bucelle avant que celui-ci ne soit lui aussi versé dans le service auxiliaire à Marseille, puis à l'hôpital de Grasse (06). On sait par une photo parue dans l'Écho d'octobre 1913 que des civils participent aussi à sa rédaction, mais on ne connait pas leurs noms...

C'est la première fois, du moins dans l'Écho, qu'est relaté un moment de "faiblesse" supposée du XVème corps. Cette polémique mettra des années à s'éteindre. Le XVème corps, composé presque exclusivement de soldats méridionaux, est maintenant totalement réhabilité. Point de faiblesse dans ses rangs, seulement des attaques absurdes sans aucune portée stratégique, sous un feu ennemi exterminateur qui se solderont par des centaines de milliers de morts et de blessés (voir à ce sujet le document annexe que vous pouvez télécharger en cliquant-ici). C'est peut-être aussi pour réhabiliter le Midi que l'Écho fait l'éloge des hauts gradés de l'époque. Dans l'article on trouve "Barbentane s'honore du général d'artillerie Mouret". Ce modeste bout de phrase m'a fait prestement réagir et, après de longues recherches, nous avons enfin pu reconstituer sa biographie. Trop longue pour être mentionnée ici car c'est un homme qui a fait date, j'ai préparé un document annexe que vous pouvez télécharger en cliquant-ici...

Le livre d'or des officiers et gradés est une mine de renseignements. Il manque toutefois les plus gradés comme le général Léon-Augustin Mourret déjà cité, mais aussi le lieutenant-colonel Pierre-Louis Constant pourtant cité comme prisonnier dans l'Écho de décembre 1914...

C'est la marquise d'Andigné qui relate la libération, mais aussi l'abattement de son fils, Fortuné(2)...

Au martyrologe, Antoine Diciani est noté mort en captivité des suites de ses blessures le 17 décembre, alors que sur les fiches militaires il est porté mort le 20 août 1914 à Dieuze en Moselle (voir le mois de décembre 1914 pour sa biographie)...

Le 4 février 1915, Ange-Pierre Berlandier, 22 ans, soldat au 4ème régiment d'infanterie coloniale est tué à Massiges-Virginy dans la Marne dans une charge nocturne à la baïonnette. Il est inscrit, sous son prénom usuel de Pierre, sur le Monument aux Morts et avec l'initiale "A" de son vrai prénom, sur le nécrologe qui est dans l'église.

Pierre Michel, de la Ramière, est porté blessé pour la 3ème fois...

Fin février et début mars, 12 nouveaux Barbentanais vont rejoindre leur affectation...

Si les médailles sur le front sont courantes, peu sont décernées à des agents de la police rurale. Il faut quand même noter que cette attribution de la médaille d'honneur en argent date du 30 mai 1914, avant l'entrée en guerre...

Juste pour la petite histoire, le receveur des postes en 1915 se nommait Prieron et sa fille ou une de ses filles, Adrienne...

La production de l'Ouvroir est toujours importante et le fourneau économique tourne à plein régime avec la fourniture de 600 à 700 rations par semaine...

Un Barbentanais est à l'honneur dans un journal national. J'avoue que ce bref article m'a fait fouiller la toile de fond en comble et, miracle d'Internet, j'ai retrouvé ce journal avec la photo citée...

Dans l'état religieux, on note 5 naissances pour le mois de février, 5 décès en ce même mois dont un enfant d'un an et 3 décès en mars...

Dans le courrier militaire, c'est encore le froid, la boue, la neige, et les dangereuses marmites(3) pleuvent. Louis Fontaine est tout joyeux d'avoir eu des mitaines confectionnées par l'ouvroir de Barbentane. Louis Mus manie le deuxième degré dans son Rendez-vous de chasse. Louis Moucadeau sur le front belge n'est pas content car il n'a pas encore vu de Barbentanais dans son secteur. Alexandre Gibaud vient d'être nommé sergent après une mission dangereuse. Martial Granier se demande comment il est encore vivant. Joseph Mus fait la triste expérience d'être enterré vivant. Jules Issartel s'étonne de se retrouver armé à 45 ans. Georges Débès qui vient d'être nommé sergent-major est heureux de quitter son fusil pour un sabre et un révolver. Pierre Fouilland, blessé, prie pour la paix. Mais, tradition militaire oblige, Léopold Michel trouve le moyen de s'amuser un peu...

Guy

(1) Ayant été réformé, Cocteau décide néanmoins de participer à la guerre de 1914 comme ambulancier avec un convoi sanitaire civil. Adopté par un régiment de fusiliers marins, il vit à Dixmude (Belgique). Il vole avec Roland Garros mais est rapidement démobilisé pour raison de santé.

(2) Fortuné d'Andigné (11/12/1868 - 28/08/1935), fils de Noémie de Robin de Barbentane (fille unique du fameux Léon de Robin, marquis de Barbentane) et du général Léon d'Andigné, il est le grand-père de Marie-Camille Séguier d'Agoult, l'actuelle propriétaire du château d'Andigné. Capitaine, fait prisonnier en 1914, il est interné à Crefeld. Blessé et en mauvaise santé il a été libéré par les Allemands. Après une période d'abattement, il a repris du service au front et il a fini la guerre comme lieutenant-colonel. La famille d'Andigné avait un beau château, dit Monet, à Beaufort-en-Vallée (Maine-et-Loire) d'où écrit sa maman.

(3) Marmites : dans l’argot des combattants français, c'est la désignation des projectiles d'artillerie allemands en particulier des Minenwerfer sans doute en raison de leur forme et de leur poids.

Carte de l’ensemble des fronts européens durant la guerre 14-18

La situation de la guerre en février 1915…

En ce mois de février sur le front occidental la situation n'a pas varié. On se dispute chaque centimètre de terrain. Une tranchée perdue un jour se doit d'être reprise à l'ennemi le lendemain, surtout si elle revêt le plus petit intérêt stratégique. Les conditions météo, pourtant toujours aussi exécrables, si elles ralentissent un peu les opérations d'infanterie, n'empêchent cependant pas la guerre d'artillerie de se poursuivre avec encore plus d'intensité. Les Allemands bombardent Soissons avec des projectiles incendiaires qui atteignent la cathédrale ; ils bombardent très violemment Pont-à-Mousson et Reims où, en une seule nuit, 5 000 obus tombent autour de la cathédrale. Bien évidemment, les Français répliquent avec autant de vigueur. Devant cette débauche de munitions, une crise va bientôt éclater...

Dans l'impossibilité de créer une brèche dans les lignes allemandes qui aurait permis une reprise de la guerre de mouvement, les stratèges de l'ouest, plus ou moins jaloux de leurs homologues russes, cogitent sur une possible opération visant à affaiblir l'Allemagne. Tous arrivent à la conclusion que si la Russie, qui a un "réservoir" humain impressionnant, stoppe ou simplement ralentit ses opérations guerrières par manque d'approvisionnements, la guerre sur le front occidental risque de tourner à l'avantage des Allemands. Winston Churchill, Premier Lord de l'Amirauté, entrevoit une possibilité. En l'état actuel de la guerre, il ne peut pas soutenir matériellement l'effort russe car la mer Baltique est sous contrôle allemand et la mer de Marmara sous contrôle turc son allié. En ce début d'année 1915, le port de Mourmansk qui, malgré sa position dans la mer de Barents est libre de glace toute l'année, n'existe pas encore (en fait, il sera créé durant l'année). Les ports russes sur le Pacifique sont jugés trop éloignés du front et encore plus de la Grande-Bretagne. Il ne lui reste plus qu'une possibilité : prendre le contrôle du détroit des Dardanelles pour avoir accès à la mer de Marmara par la mer Égée puis du détroit du Bosphore, pour avoir accès à la mer Noire et ainsi alimenter la Russie par le grand port d'Odessa qui est relativement près du front oriental. De ce fait encore, Churchill obligerait les Turcs à se redéployer vers le sud, soulageant d'autant les efforts russes dans le Caucase. L'opération avait également pour objectif stratégique de pousser la Bulgarie et la Grèce, deux anciennes possessions ottomanes, à rejoindre le camp des Alliés. La marine britannique trouvait ainsi le moyen d'utiliser toute une flottille de navires guerriers qui n'étaient pas de taille à être utilisés contre la flotte allemande en mer du Nord et se trouvaient en surnombre dans les ports britanniques. Il y avait aussi en Égypte des troupes fraîches néo-zélandaises et australiennes, les populaires ANZAC (Australian and New Zealand Army Corps), mais aussi des Français de l'armée d'Orient. Bien sûr, la flotte française de la Méditerranée était une composante de cette opération. C'était un plan très ambitieux, hélas mal préparé, commandé par des chefs plus orgueilleux que compétents, cette opération tournera au fiasco, mais nous n'en sommes pas encore là...

Le 17 février, en prélude à la future invasion, un hydravion de reconnaissance survole le détroit des Dardanelles. Deux jours plus tard, les Marines franco-britanniques bombardent les forts turcs qui en défendent l'entrée. Gênées par les conditions météo, ces opérations vont se renouveler plusieurs fois, ce qui permet à l'armée turque, commandée par un lieutenant-colonel de 34 ans, Mustafa Kemal, un des meilleurs tacticiens du moment, de redéployer son artillerie qui reste toujours aussi dangereuse pour les navires malgré les forts détruits...

Dans le Sinaï, l'attaque turque contre le canal de Suez échoue devant des troupes égyptiennes que soutiennent 2 navires français. L'armée ottomane d'invasion reflue vers Gaza...

Sur le front oriental, les Russes progressent toujours en Pologne et en Prusse Orientale contre les Allemands ; au centre dans les Carpates contre les Austro-Hongrois et dans le Caucase contre les Turcs. Mais les conditions changent. L'armée allemande se réorganise, déplaçant des troupes de l'ouest pour les positionner sur son front est, elle reprend l'offensive...

En ce mois de février 1915 un nouveau front s'ouvre. Les dernières escadres de haut-bord qui étaient en mer avant août 1914 étant au fond de l'eau, la Marine du kaiser n'ose plus s'aventurer en mer du Nord de peur de perdre la totalité de ses navires. En plus, qu'ils soient à quai ou au large, ces navires coûtent cher et immobilisent un personnel nombreux, en plus très qualifié, pour rien. Du coup, un redéploiement tactique s'opère vers les sous-marins. Faciles à construire, nécessitant très peu d'hommes pour les manœuvrer, par nature furtifs, peu gênés par la météo de surface, ils feront plus de dégâts que tous les superbes cuirassés qui tirent sur leurs chaînes et qui commencent à rouiller dans les ports de la mer Baltique. Stratégiquement, comme les Marines alliées lui imposent un blocus hermétique, l'Allemagne décide avec ses submersibles d'en faire autant pour empêcher le ravitaillement des Îles Britanniques. Certes, les premiers U-Boote (abréviation d'Unterseeboot, qui signifie sous-marin en Allemand) de 1915 sont loin techniquement de ceux qui seront mis en service en 1917. Mais avec seulement 13 hommes d'équipage, 2 torpilles et un rayon d'action leur permettant tout juste d'aller en mer d'Irlande en passant par la Manche, ils paveront le fond de ces deux mers de nombreuses carcasses de navires militaires et marchands en tout genre. D'ailleurs, le 4 février, le gouvernement allemand annonce que les eaux territoriales des Îles Britanniques seront désormais considérées comme "zone de guerre" ; les navires de commerce ennemis seront détruits, même s’ils transportent des passagers ; les navires neutres ne seront pas épargnés. En effet, selon l’Allemagne, la flotte marchande britannique abuserait du pavillon neutre pour se mettre à l’abri. Bien sûr, tous les pays neutres, à commencer par les USA, protestent énergiquement contre cet acte de guerre, mais cela ne change pas grand chose, car même les navires-hôpitaux ne sont pas épargnés. Sont coulés en février les navires britanniques comme Le Dulwich, le Cambank, le Dowshire, le Branksome-Chine, l'Oakby, le Western-Coast, le Deptford ; les français le Ville-de-Lille, le Rio-Parana, l'Île- d'Elbe, l'Harpalion ; des norvégiens comme le Belridge et le Regin. L'U29 sera coulé pendant ces opérations de torpillages. En réponse, le canal de Suez est fermé aux bateaux neutres le mardi 9 février. Puis le 12 février, 34 avions britanniques et français font des dégâts considérables à Zeebrugge et à Ostende, bases des U-boot. Ils renouvelleront cette opération avec encore plus d'avions 5 jours plus tard. Mais cela n'empêche pas que devant l'hécatombe de bateaux coulés, la Grande-Bretagne ferme la mer d'Irlande à la navigation le 24 février...

En Allemagne, la ration journalière de pain par personne est de 225g. Rosa Luxemburg, condamnée à un an de prison en 1914 pour menées antimilitaristes, est incarcérée le 19 février. Berlin annonce officiellement que les Jeux Olympiques prévus en 1916 dans la cité n'auront pas lieu...

Par contre, le dimanche 21 février 1915 à San Francisco (USA), c'est l'ouverture de l’Exposition Universelle avec la participation de 45 nations, dont les belligérants actuels. Cette expo commémore l'inauguration du canal de Panama et la construction de la ville de San Francisco en 1776, puis sa reconstruction après le séisme de 1906. Elle attira 19 millions de visiteurs...

Localisation précise du détroit des Dardanelles

Le sous-marin australien HMAS AE2

Zone d’attaque des U-Boot à la fin de l’année 1915

Un U-Boot de la 1ère génération

Vue d’ensemble de la mer Méditerranée

L’antimilitariste allemande Rosa Luxemburg en 1917

Une chambre dans un hôpital militaire d’Amiens (Somme)

Ouvrières dans une usine d'obus en avril 1915 - Photo autochrome

Combattants arméniens de l'armée russe

Soldats français au repos à Caix (Somme) le 17 février 1915

Canon de 120 long, La Tarasque, montée sur rail

Soldats d’infanterie français avec baïonnette et barda en janvier 1915